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LA TRIBUNE ET LES NÉO-CAMELOTS DU ROI (Actualisé)
Eric Zemmour médiocrate de la pensée - Emmanuel Macron, obnubilé par sa réélection – Pierre de Villiers, général à la retraite, ancien patron de l’armée française habité par les démons des généraux de l’Algérie française.
La France rapetisse et se nanise. Loin est le temps où la french théorie scintillait dans le firmament. Aujourd’hui, ce sont des pygmées et des médiocrates de la pensée qui donnent le la. Ils ne parlent pas au monde. Ils causent entre eux. Ils n’expliquent plus la France. Ils la pleurent. Ils bêlent, en criant au loup mondialisé, contre le chacal européen et surtout de peur de ce serpent à sonnette qu’est l’immigré. Cnews les héberge tous les soirs. Seyf Remouz les décortique.
En part de marché, la chaine Cnew est en passe de détrôner BFM. Ne parlons pas, pour ne citer que les chaines d’info continue, de LCI ou de France Info, en queue de peloton. Chaque soir, avec Éric Zemmour et Pascal Praud, Cnews se mue en agora pour propos oraculaire. Elle ressasse inlassablement que la France, aujourd’hui défigurée, se dirige vers sa perte. Il y a certes le talent de ces orateurs qui ont pignon sur médias, mais il y a surtout les sujets sulfureux, toujours les mêmes, qui font recette et audience. Avec la répétition du pédagogue obstiné, ils prédisent, tous les soirs, les catastrophes qui guettent la France et annoncent, avec ténacité, qu’un jour, l’appel du muezzin couvrira le glas des églises. Pour eux, ce n’est qu’une question de temps. Et plus et surtout une affaire de démographie, cette obsession des minorités anxieuses, puissantes et agissantes.
Dans le champ médiatique français, Bolloré et surtout Maxime Saada, cette ombrelle protectrice de Zemmour et de Praud, sont à la tête d’un groupe qui fait preuve d’un cynisme insolent et éhonté. Avec Canal plus, le groupe a un pied dans la banlieue où il encense la société de la diversité, de la dérision ou, comme dirait Renaud Camus, de l’hébétude avec rap, amuseurs de tout poil et Tutti quanti. Et un autre pied, avec Cnew, ce muséum, chaque jour renouvelé, du passé de la France en péril, la France de jadis qui n’est plus évoquée qu’avec des trémolos dans la voix et la larme au coin de l’oeil. Ainsi, cette chaine a le plateau ouvert pour tout ce que l’hexagone compte comme nostalgiques d’une France mythifiée et dont la grandeur se rapetisse à vue d’œil. Par une mondialisation dénoncée de manière incantatoire. Par une Europe honnie et décriée, depuis 2005. Et surtout par l’immigré accablé du maléfique don de transformiste qui, pire que de défigurer la France, cherche à la faire disparaître de surface de la terre.
Maréchaussée du politiquement incorrect, ce « quarteron » d’idéologues, pas nombreux mais suffisamment organisés et puissants, déverse, chaque soir, des bidons d’essence sur un pays déjà largement embrasé par la violence urbaine, par les gilets jaunes, par les actes terroristes les plus intolérables. C’est ce qui d’ailleurs les fait carburer. Car pour eux « good news. No news ». Ils se sont trompés sur Donald Trump, sur Jair Bolsonaro, sur Narendra Modi, sur Boris Johnson, mais rien n’y fait. Ils restent debout, droits dans leurs bottes. Animés par la sainteté de leur croisade, ils sont aujourd’hui aux avant-gardes d’un combat idéologique résolument identitaire et belliqueux.
Le combat gramscien de la fondation du 2-Mars
Cnews est la dernière acquisition de cette guerre intellectuelle larvée, entamée il y a exactement 20 ans, le 11 septembre prochain. La doyenne de ce combat, c’est Elizabeth Lévy qui avait lancé, avec son mentor d’alors, Philipe Cohen, tous deux chevènementistes à l’époque, la « Fondation 2 mars »[2]. Un think tank résolu à avoir des victoires idéologiques avant les succès politiques. Cohen décédé prématurément, c’est elle qui fera publier, en 2002, par l’israélite franco-marocain, George Bensoussan, « Les territoire perdus de la République », expression devenue un mantra politique et mot de passe entre confréries. Levy est, depuis 2017, la régulière complice de Pascal Praud, comme l’est aussi Ivan Rioufol, auteur d’un essai, « La guerre civile qui vient » qui peine à dissimuler son plaisir de sa prophétie en devenir. Il y a aussi l’obséquieux William Goldnadel, souverainiste en France et Likoud en Israël. Sans compter le grotesque qui s’ignore, Jean Missiha, un homme sans retenue ni surmoi. Je passe sur les invitations régulières des politiques, toujours du même bord, Pierre de Villiers, Jordan Bardella, Robert Ménard ou Gilbert Collard. Tous ces gens-là préfèrent la France brandie par l’opportuniste Zineb El Ghazoui à celle défendue par l’ambassadrice de la Francophonie, Leila Slimani.
Pompiers pyromanes
Cnews, avec Causeur d’Elizabeth Lévy, ou Valeurs Actuelles de Geoffroy Le Jeune, sont les désormais vieux sonneurs de tocsin qui peinent à dissimuler leur goût pour les allumettes. Ce sont eux qui, aujourd’hui, donnent « la mesure et le la » dans le débat public. Ils l’empoisonnent tout en se fendant bien la gueule, à la barbe et au nez de leurs adversaires. Autosuffisant, avec le rire gras, ils sont déjà la morgue des vainqueurs. Il faut dire que depuis près de dix ans, ils sont aidés par les évènements. Bouffis de certitude d’avoir déjà, en partie, gagné la bataille de l’opinion, les voilà maintenant prêts à réclamer la guerre tout court pour que la victoire soit la plus complète possible. Pourquoi pas « la solution finale » ?
La tribune des militaires est le dernier avatar de ce combat idéologique. N’en déplaise à ses thuriféraires, elle est scélérate. Que les militaires l’aient écrit (et se firent même aider pour la rédiger) est une chose. Autre chose est la manipulation des conditions de sa diffusion. C’est là que réside le machiavélisme. Attendre le 21 avril, pour la rendre publique, c’est tout bonnement retors. Un vrai coup politique médiatiquement réfléchi et un vrai clin-d ‘œil à l’histoire.
La tribune est rapportée par un canard de combat, Valeurs actuelles avant qu’elle ne soit propulsée par des compères, des complices dans Cnews. Car ces gens-là travaillent la main dans la main. Que les militaires, dont bon nombre sont au FN, soient embrigadés, avec ou sans leur accord, dans cette manœuvre importe peu. Le gouvernement, pas naïf, s’est empressé de se situer sur le même registre en parlant de « quarteron de militaires en charentaises ». C’est que, dans cette formule, probablement imaginée par des communicants, la réaction convoque aussi l’histoire, de Gaule et l’Algérie.
C’est là un stratagème politique de haute volée. Il faut manquer du flair d’un chien truffier pour ne pas voir la portée politique de cette tribune. Geoffroy Le jeune, patron de Valeurs Actuelles ainsi que Charlotte d’Ornellas, invitée régulière chez Pascal Praud, ne pouvaient ignorer cette date de l’histoire. Difficile d’imaginer que cette dernière n’ait pas mis dans la confidence les copains de Cnews. Dès lors, la seule question qui vaille, c’est pourquoi tous ces gens-là font la Sainte-Nitouche, plaidant la coïncidence ? Pascal Praud va plus loin. Pour lui, il faut s’intéresser à la raison plus qu’au raisonneur, manière de déconstruire le fameux « d’où tu par les camarde ?»
Il me revient qu’avec l’affaire Mohamed Merah, Gilles Kepel avait établi un lien entre l’attaque de l’école juive d’Ozar Hatorah, le 19 mars 2012, et le cinquantenaire des Accords d’Evian. Cette analyse fut tellement aphrodisiaque que personne n’avait, à l’époque, rien trouvé à redire. Gilles Kepel avait fait d’un médiocre soudard, un inculte et d’une brute épaisse, qui sait à peine écrire, un sémiologue hors-pair, plus puissant que Roland Barthes lui-même.
Ces gens-là sont les mêmes qui nous bassinent à longueur d’année avec la figure tutélaire du Général de Gaule allant jusqu’à voir dans le général, limogé par Macron, Gérard de Villiers (qui doit être derrière cette tribune), l’homme providentiel auquel ils aspirent (quand ils ne pensent pas, pris par l’hubris, qu’Éric Zemmour, pourrait les incarner à l’Elysée. Moi, je le redis, banco, chiche !). Là, il y a une contradiction douloureuse. La tribune est tout ce qu’il y a de plus antigaulliste
Si le combat contre le terrorisme islamiste est impérieux, il ne peut être prétexte à tout. Le Maroc, pays musulman, est résolument engagé, depuis 2003, dans le combat contre ce « fascislamisme », sans foi ni loi. Légitime, cette lutte est menée quotidiennement et farouchement, sans que le Maroc, devenu par la force des choses un pays d’immigration, n’ait besoin de boucs-émissaires.
Or, ces gens-là. Oui ces gens- là, sont devenus les nouveaux hérauts de l’Action française et les néo-camelots du roi. Dans les années 80, ils faisaient tous partie de ceux qui, pour un mot, « un détail de l’histoire » avaient ostracisé Jean-Marie Le Pen, un homme finalement plus courageux qu’eux, plus courageux que sa descendance et les héritières de son pactole politique. Aujourd’hui, ces gens-là, oui ces gens-là ne font ni dans la nuance ni dans … le détail.
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