La révolte des commencements de Michel Simon - Par Samir Belahsen

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Le récit de Michel Simon se concentre sur plusieurs personnages dont les vies sont profondément affectées par les événements tumultueux de la guerre civile

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« La paix n'est pas un vain mot, mais un comportement. »

Félix Houphouët-Boigny  

« On peut se tromper, c'est humain, mais il faut se garder de vouloir tromper les autres. »

Félix Houphouët-Boigny   (1905 - 1993)

Le 19 septembre 2002 commençait la guerre civile ivoirienne, des soldats rebelles tentent de prendre les principales villes du pays : Abidjan, Bouaké et Korhogo. 

Pour Abidjan, ils échouent mais réussissent à occuper Bouaké, dans le centre et Khorogo dans le Nord.

Les « Forces nouvelles » (FAFN) occupent la moitié nord du pays, le sud reste tenu par les Forces armées de Côte d'Ivoire fidèle au Président Laurent Gbagbo.

Le 24 janvier 2003, les accords de Linas-Marcoussis sont signés. En novembre 2004 les accords sont remis en cause. Il a fallu attendre 2007 et l’accord politique de Ouagadougou du 4 mars 2007 qui sera remis en cause lors de l'élection présidentielle de 2010. La victoire militaire des Forces républicaines de Côte d'Ivoire met fin à la guerre.

L’histoire

Le récit de Michel Simon se concentre sur plusieurs personnages dont les vies sont profondément affectées par les événements tumultueux de cette époque. 

L’auteur dépeint un tableau vivant des réalités de la crise ivoirienne, illustrant comment les conflits politiques, l'ethnicité et les inégalités sociales exacerbaient les tensions au sein de la société ivoirienne.

Les protagonistes, souvent issus de milieux modestes, se retrouvent pris dans un tourbillon de violence et de désespoir. Le roman explore leurs luttes pour la survie et leur quête d'identité dans un contexte où la notion de « l’ivoirité » devient un enjeu central. 

Les personnages sont confrontés à des choix difficiles qui mettent à l'épreuve leurs valeurs morales et leur loyauté envers leur pays.

Les personnages cherchent à comprendre leur place dans une société en pleine mutation, marquée par des conflits ethniques et politiques.

Le roman illustre la résistance des Ivoiriens face à un système politique perçu comme injuste et corrompu.

Michel Simon explique les effets dévastateurs de la crise sur les parcours individuels et collectifs, en insistant sur l'impact psychologique et social des conflits.

Le style de Michel Simon est caractérisé par une prose incisive et évocatrice, qui plonge le lecteur au cœur des émotions des personnages. L'auteur utilise une narration immersive pour donner vie aux luttes internes et externes des protagonistes, rendant palpable le climat d'angoisse et d'incertitude qui règne pendant cette période chaotique.

En somme, La Révolte des commencements est une œuvre puissante qui offre une réflexion profonde sur les défis auxquels fait face la Côte d'Ivoire durant sa crise, tout en mettant en avant la résilience et l'espoir des individus face à l'adversité.

Kouadio représente la jeunesse ivoirienne en quête d'identité et de justice. Il est révolté par les injustices sociales et politiques qui l'entourent, ce qui le pousse à s'engager dans des actions de révolte.

Aminata est une femme forte et déterminée, elle incarne la résilience des femmes durant la période de crise. Elle lutte  pour sa survie, celle de sa famille mais aussi en cherchant à redéfinir son rôle dans une société en mutations.

Le Colonel symbolise le pouvoir et l'autorité. Son rôle est crucial dans le contexte de la rébellion, car il représente à la fois l'oppression et les conflits internes au sein des forces armées.

Soro, l’ami de Kouadio est un personnage complexe, il illustre les dilemmes moraux auxquels sont confrontés ceux qui choisissent de se battre pour un changement. 

Sa loyauté envers ses amis et sa communauté le poussent à prendre des décisions difficiles.

Maman Kadi représente la figure maternelle Ivoirienne qui illustre la sagesse et la tradition. Elle offre une perspective sur l'impact des conflits sur les générations passées et présentes, tout en transmettant des valeurs essentielles à ses enfants.

Tous ces personnages évoluent dans un contexte où les tensions ethniques, politiques et économiques exacerbent les conflits, rendant leurs quêtes de paix et d'identité encore plus complexe. À travers leurs histoires, Michel Simon magnifie les thèmes de la résistance, de l'espoir et souvent de la désillusion face aux défis d'une nation en crise.

D’autres romans ivoiriens abordent la rébellion et l'histoire récente de la Côte d'Ivoire :

"Les petitesse" de Véronique Tadjo explore les conséquences de la guerre civile en Côte d'Ivoire à travers le regard de différents personnages.

"L'honneur des voleurs" de Ahmadou Kourouma où il évoque également des thèmes liés aux conflits et aux rébellions.

"L'envers du décor" de Kouadio Konan Bertin qui examine la crise politique et les répercussions sociales de la rébellion à travers le prisme des vies des personnages.

"Des rêveries" de Koffi Kwahulé qui est une narration poétique où l'auteur explore les réalités difficiles de la guerre et de la paix en Côte d'Ivoire.

Ces œuvres reflètent la richesse de la littérature ivoirienne contemporaine.

Chauvinisme ethnique

Le 26 août 1995, Henri Konan Bédié alors président depuis la mort d'Houphouët-Boigny, avait réintroduit le concept d’ivoirité. Selon lui, ce concept permettait à la Côte d'Ivoire de mieux préserver son identité. Cela devait surtout lui permettre d'évincer son principal rival, Alassane Ouattara originaire du Nord du pays de la course à la présidentielle.

C’est ce qui a fini par raviver un certain chauvinisme ethnique en Côte d'Ivoire. Ce chauvinisme ethnique, souvent latent dans plusieurs sociétés africaines, est parfois utilisé pour renforcer l'identité nationale au détriment des autres groupes ethniques finit par exacerber les divisions et les conflits. 

Les conséquences de cette politique ont été profondes, contribuant à des violences et à des crises politiques ultérieures, surtout quand des puissances étrangères s’ingénient à  mettre de l’huile sur le feu.

Cette xénophobie est, bien entendu, apparue lorsque l'économie de ce pays a cessé de générer massivement des emplois. Les flux migratoires provenant des pays musulmans pauvres et surpeuplés du Sahel continuaient et continuent encore. 

Si le but de l'ivoirité semblait être avant tout d'empêcher les populations « étrangères » de participer à la compétition pour le pouvoir politique et d'accéder aux terres et aux emplois de la fonction publique, les souffrances endurées par les Ivoiriens  pendant toute cette période nous rappellent que l’usage politicien de l’ethnicité prépare souvent des crimes de guerre…

Tachons, ce 19 septembre à ne jamais l’oublier…

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