*Sociologue, membre du Conseil des Marocains ? l?Etranger, Driss Ajbali est un sp?cialiste de l?immigration Jour f?tiche, vendredi 13 est entour? de superstition. Il peut ?tre un jour de chance qui grise les joueurs du Loto comme il peut ?tre celui d?une calamit?. D?sormais, il est consign? dans les ?ph?m?rides fran?aises comme un jour d?effroi et d'indignit?. La lumi?re s?est interrompue, le temps d?un soir, dans la ville des lumi?res. La France de l?insouciance, celle qui aime la vie et la f?te, fut m?ticuleusement et indistinctement vis?e. Dans une ?pop?e sauvage, des trombes de balles de guerre ont d?chiquet? aveugl?ment l?innocence. Huit fianc?s de la mort ont pris pour cible les amoureux de la vie. Ils ont fait 129 morts et 350 bless?s dans un instant de guerre asym?trique. Les visages des victimes qu?on d?couvre, beaux et plein de vie et de vitalit?, font partie de ce que la France a probablement de meilleur dans sa jeunesse, m?lang?es ? ces 19 nationalit?s ?prises du bonheur que Paris cultive et abrite. D?cid?ment le mal s?ing?nie ? explorer tous les ressorts de la terreur. Comme s?il voulait atteindre le plus haut degr? de l??chelle de Richter de l?horreur et surtout de l?ignominie. ?a n?a pas suffit d??liminer les arlequins de la caricatures et le juif. Ni de d?capiter sur le sol fran?ais. Ni de tenter de s?en prendre ? tout un train. Cette fois-ci (et fort heureusement, dans un demi ?chec puisque les 80000 supporters du stade de France ont ?t? ?pargn?s), ils ont tout de m?me r?ussi l?abattage. A faire du chiffre. A faire masse. Et c?est peut ?tre l?acte de trop. Dans un m?lange de chagrin et de col?re, tous ceux qui dans mon entourage ne savaient pas, en janvier, s?ils devaient ?tre ou pas??Charlie?? sont pris par le m?me effroi et surtout par cette incompr?hension qui peut s?av?rer, il faut l?esp?rer, salvatrice. Dans cette loterie mortif?re, arbitraire et cruelle, ils se sont vus attabl?s sur la m?me terrasse, dans le m?me bistrot ou dans cette funeste fosse du Bataclan. C?est au nom de l?Islam et au nom d?Allah que ces crimes inf?mes ont ?t? commis. Ils ont ex?cut?s, froidement et industriellement des innocents parce qu?ils sont Fran?ais, coupables, ? leurs yeux, par procuration de ce qui se passe dans le pays du Cham. ?En criant ??Allah akbar??, ces criminels font de tout musulman, dans un parall?lisme de forme, un coupable par procuration. Familiaris? avec la d?linquance et les braquages, ces sc?l?rats ont commis un hold-up sur toute une religion au service des pires outrances. Nos indignations, ensevelies sous le fracas de leurs armes, en sont devenues pu?riles et inaudibles. Par la loi du 9 octobre 1981, la France a abrog? ?le r?gime d?rogatoire des associations ?trang?res, institu? par le d?cret-loi de 1939, qui subordonnait la constitution des associations ? l'autorisation du ministre de l'Int?rieur. Depuis, cette disposition a bien profit? ? la construction du champ cultuel musulman o? a prosp?r? le radicalisme, cette d?g?n?rescence. Comment, en 2015, laisser dire en France, sans r?actions, que ??ceux qui mangent du porc sont des porcs?? et ? des enfants que ??ceux qui ?coutent la musique vont devenir des singes ou des porcs??. Face ? ce d?lirium tr?mens, Les responsables des mosqu?es ?ne peuvent plus se contenter d?expliquer que l?Islam est une simple religion de paix. Il faut, au contraire, qu?ils s?emploient ? nettoyer leurs ?curies d?Augias. Depuis 1989, avec l?affaire du foulard, une erreur majeure a ?t? commise?: on a essentialis? l?immigration et on l?a claquemur?e dans sa dimension d?vote. De fait, les imams, le plus souvent autoproclam?s, sont devenus les interlocuteurs privil?gi?s, notamment, des ?lus locaux. Autant dire, discuter cuisine avec des cannibales. Ainsi, ces imams sont devenus responsables de tout et comptables de rien. Le plus cocasse, c?est qu?ils sont les premiers ? courir les plateaux de t?l? pour nous expliquer ing?nument leur impuissance. George Clemenceau, en parlant de la guerre, disait que?c?est une ??chose trop grave pour la confier ? des militaires??. Il en est de m?me de la religion, champ de nitroglyc?rine et mati?re trop inflammable pour l?abandonner aux seuls religieux. Le silence n?est plus permis. S?il n?est pas simple et tragique pusillanimit?, il devient, ce silence, une forme de connivence odieuse. Les Fran?ais et les Europ?ens issus de l?immigration musulmane, en particulier les d?mocrates et la?cs, doivent ?tre partie prenante de ce combat id?ologique. Ils doivent m?me en ?tre ? l?avant garde. Ce n?est pas un combat contre l?Islam. C?est, au contraire, de r?habiliter cette religion d?figur?e qu?il s?agit. Ce n?est pas un conflit contre une civilisation. C?est une guerre pour la civilisation.