Coopération militaire Mauritanie-Sénégal : vers une alliance structurée – Par Hassan Zakariaa

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Les 7 et 8 février 2025 Les forces navales du Sénégal et de la Mauritanie avaient mené leur deuxième patrouille maritime conjointe, baptisée « MUSTARAKA »

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Dans un contexte régional marqué par l’instabilité croissante au Sahel et la pression sécuritaire sur les zones frontalières, Nouakchott et Dakar renforcent leur partenariat stratégique. Une rencontre entre les ministres de la Défense des deux pays relance les mécanismes de coordination militaire. Hassan Zakariaa fait le point. 

Par Hassan Zakariaa

La Mauritanie et le Sénégal ont réaffirmé leur volonté de renforcer leur coopération militaire et sécuritaire, à l’occasion d’une visite officielle du ministre sénégalais des Forces armées, Birame Diop, à Nouakchott. Reçu par son homologue mauritanien, Hanana Ould Sidi, le responsable sénégalais a entamé une série d’entretiens axés sur la sécurisation des frontières communes, la lutte contre les trafics transfrontaliers et le partage d’expertises militaires.

Dans un communiqué conjoint relayé par l’Agence mauritanienne d’information (AMI), les deux ministres ont souligné la nécessité de « renforcer l’échange d’informations et d’expertises » et d’intensifier les « patrouilles conjointes » dans les zones frontalières. L’objectif affiché : prévenir les infiltrations de groupes armés, les trafics illégaux et toute forme de déstabilisation dans cette région stratégique du Sahel occidental.

Un front commun face aux défis sécuritaires sahéliens

Cette visite intervient dans un contexte régional particulièrement tendu. Si la Mauritanie et le Sénégal sont jusqu’ici restés à l’écart des coups d’État militaires qui ont secoué leurs voisins sahéliens (Mali, Burkina Faso, Niger), ils n’en demeurent pas moins exposés aux risques de débordement sécuritaire, notamment en lien avec les groupes djihadistes opérant dans la région du Liptako-Gourma.

La bande frontalière entre la Mauritanie et le Sénégal, longue de plus de 800 kilomètres, représente un enjeu sensible, notamment dans la vallée du fleuve Sénégal, une zone de passage importante pour les migrations, les trafics et parfois les mouvements radicaux. Ces dernières années, des incidents liés à la pêche illégale, à la contrebande ou à l’immigration clandestine ont également été signalés dans cette zone.

Coopération militaire : un partenariat qui s’intensifie

La coopération sécuritaire entre Nouakchott et Dakar ne date pas d’hier. Elle a connu une accélération au cours de la dernière décennie, avec notamment des accords de formation, des échanges d'officiers et la tenue d'exercices conjoints dans le domaine de la surveillance maritime et terrestre. Mais plus qu’auparavant, les deux pays, appelés à coopérer étroitement et à trouver des terrains d’entente dans l’exploitation commune des ressources pétrolières qui a été récemment lancée, doivent faire face aux risques de déstabilisation auxquels ils sont plus exposés que par le passé.

La Mauritanie, dotée d’une armée qui a gagné en discipline et en expérience dans la lutte contre le terrorisme, coopère régulièrement avec ses partenaires africains, y compris le Sénégal. Ce dernier, en retour, investit de plus en plus dans la modernisation de ses capacités militaires, notamment via l’acquisition de nouveaux équipements et exprime sa volonté de se doter industrie de défense efficiente.

Un signal politique dans un environnement régional mouvant

La visite du ministre sénégalais revêt également une dimension politique. Elle intervient alors que le président sénégalais nouvellement élu, Bassirou Diomaye Faye, prône un repositionnement stratégique du Sénégal dans la région, avec un accent mis sur la souveraineté sécuritaire, la coopération Sud-Sud et la diplomatie militaire.

Du côté mauritanien, cette visite s’inscrit dans une stratégie plus large de renforcement des partenariats régionaux, dans un contexte où Nouakchott cherche à consolider sa position de pilier de stabilité dans un Sahel fragmenté.

Vers une alliance structurée ?

Plusieurs observateurs évoquent la possibilité de donner un cadre institutionnel plus structuré à cette coopération, à travers la mise en place d’un mécanisme bilatéral de coordination sécuritaire, voire l’institutionnalisation d’exercices conjoints réguliers. Une telle perspective pourrait s’inscrire dans les efforts plus larges visant à créer des architectures régionales de sécurité adaptées aux réalités africaines, en complément ou en alternative aux dispositifs internationaux déclinants comme le G5 Sahel.

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