Baraka au forum de la MAP : Une amélioration de la pluviométrie, mais pas assez, et nécessaire réforme du marché de gros

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Le ministre de l'Equipement et de l'Eau, Nizar Baraka mercredi 15 février 2023 au Forum de la MAP

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La hausse des produits de consommation ne pouvait que s’inviter ce mercredi 15 février 2023 au Forum de la MAP où le ministre de l'Equipement et de l'Eau, Nizar Baraka a été convié à parler du "Stress hydrique, [des] mesures prises et [des] perspectives d’avenir". D’abord parce que sécheresse (ou abondance de l’eau) conditionnent les cours des marchés, nourrissent ou ralentissent les circuits de spéculation. Ensuite parce que tout simplement la conjoncture de la tension sociale l’impose.

Pandémie du Coronavirus, guerre d’Ukraine et sécheresse s’intègrent naturellement dans l’explication de la hausse. Mais Nizar Baraka ne s’en contente pas et invoque une observation qu’on n’entend pas souvent, si ce n’est rarement : Seuls 60% des produits agricoles passent par les marchés de gros. 40%, ce qui n’est pas rien, empruntent les voies ‘’insondables’’ des circuits parallèles. Cette amputation du circuit commercial officiel produit ou aggrave, selon les situations, une certaine rareté artificielle qui alimente la hausse. Le circuit noir lui est livré sans contrôle à la rétention des produits, à la spéculation et parfois à la destruction de certaines productions. Il en a été ainsi par exemple cette année pour les oignons.

Un comportement incivique ? C’est peu dire. Pour Nizar Baraka ces attitudes qui portent atteinte au pouvoir d’achat des citoyens et à l’économie de marché sont non seulement inacceptables, éthiquement condamnables, mais sont antipatriotiques. Bien sûr il y a dans les déclarations du ministre les passages obligés : l’appel à ‘’faire preuve d’esprit de citoyenneté et à la mobilisation de tous les intervenants pour assurer un approvisionnement normal des marchés nationaux en produits alimentaires’’. Et il y aussi la responsabilité du gouvernement qui ‘’ a décidé d’agir avec fermeté pour faire face au monopole et à la spéculation dans les marchés nationaux’’. 

Mais au-delà, il y a une évidence qui tarde à voir le jour, et rappelée par le ministre : ‘’La régulation des prix des produits de consommation est tributaire de la réforme du marché de gros et de la réduction de l’intervention des intermédiaires dans le circuit de la distribution’’. Un vieux débat déjà.

Pour l’instant, le gouvernement fait avec ce qu’il a pour parer à l’urgence : des mesures pour ‘’garantir l'approvisionnement des marchés, dont l’annulation de la TVA, la suspension des droits d’importation des bovins destinés à l’abattage et la poursuite de la subvention des prix du transport en vue de contribuer à la stabilité des prix des produits alimentaires impactés par l’inflation notamment à l’approche du mois de Ramadan’’.

Une pluviométrie en amélioration de près de 96% 

Cette digression induite par une question d’un journaliste, avait été précédée par le développement du cœur du sujet, le Stress hydrique, mesures prises et perspectives d’avenir. Le ministre de l’Equipement et, précisément, de l’eau ne pouvait que se féliciter du Le volume de pluviométrie qui s'est amélioré de près de 96% entre le 1er septembre 2022 et le 13 février 2023 par rapport à la même période de l’année précédente.

Entre le 1er septembre dernier et le 13 février, le Royaume a connu d'importantes précipitations avec une moyenne nationale de 75,9 mm au lieu de 38,8 mm durant la même période une année auparavant, soit une amélioration de 95,6%, a-t-il expliqué.

Durant la même période, la superficie couverte par la neige a atteint 5.720 km2 contre 4.480 km2 durant l’année précédente, soit une hausse de 30%.

Les ressources hydriques, elles se chiffrent aujourd’hui à 2,15 milliards m3, soit une hausse de 192% par rapport aux retenues des barrages durant la même période de l’année dernière.

Cette amélioration importante des ressources en eau s’est répercutée sur les retenues des barrages avec 5,14 milliards m3.

Des besoins en eau potable satisfaits

Nizar Baraka, pour donner la mesure de ce qui se passe, a rappelé que les précipitations ont enregistré une forte baisse entre 2013 et 2018, soulignant que 2022 a été l’année la plus chaude depuis 1981 de même que la vague de sécheresse a été la plus importante durant cette même année depuis 1945.

Et si les ressources hydriques naturelles du Royaume avoisinent 22 milliards m3, dont 18 milliards m3 d’eau de surface et 4 milliards m3 des eaux souterraines, il ne pouvait que relever que ces ressources en eau ont drastiquement chuté durant les dernières années.

La rareté des précipitations durant la précédente campagne agricole a eu des effets négatifs, notamment avec la surexploitation des eaux souterraines destinées à l’irrigation et à l’eau potable avec une baisse record entre -3 et -6,85 m3, a expliqué le ministre.

En dépit de la baisse des retenues des barrages, les besoins en eau potable ont été satisfaits à travers le renforcement du recours aux eaux souterraines, la réduction importante des dotations destinées à l’irrigation, outre le dessalement de l'eau de mer notamment à Agadir (15 millions de m3 depuis février 2022), a-t-il fait observer.

Un programme national pour l'approvisionnement en eau potable et l'irrigation 2020-2027 de 150 MMDH

L’enveloppe dédiée au programme national pour l'approvisionnement en eau potable et l'irrigation 2020-2027 s'élève à 150 milliards DH (MMDH) après sa révision, a encore affirmé, le ministre de l'Equipement et de l'Eau, Nizar Baraka.

Cette enveloppe a été au début de 115,4 MMDH avant qu’elle ne soit portée à 150 MMDH après sa révision. Cette hausse s’explique par les vagues successives de sécheresse durant la dernière décennie, ce qui a démontré la fragilité du système d'approvisionnement en eau en ces périodes de longue sécheresse.

Ce programme a permis d’accélérer le rythme d’investissement dans le domaine de l’eau, à travers l’accompagnement de la demande croissante sur les ressources hydriques et la garantie de la sécurité hydrique du pays, tout en limitant les effets du changement climatique, a-t-il relevé, rappelant qu’une commission nationale chargée du suivi de l’approvisionnement en eau a été mise en place en vue de prendre les dispositions et les mesures nécessaires conformément aux axes dudit programme.

Les modifications apportées au programme ont concerné l’inclusion de deux grands barrages à Bouregreg et Tensift, la révision de la programmation de trois barrages, l’inclusion de cinq barrages moyens à Benslimane, Tata, Tiznit, El Haouz et Taroudant, tout en fixant 200 projets supplémentaires qui seront étudiés et programmés durant la période 2025-2027.

Pour la réutilisation des eaux usées, M. Baraka a fait état d’une actualisation du programme en intégrant d’autres stations de traitement des eaux usées pour mobiliser 100 millions de m3 à l’horizon 2026.

L’exploitation rationnelle des ressources

Les mesures proactives prises par le gouvernement pour faire face aux effets de la sécheresse et garantir l’approvisionnement en eau, ont porté, selon le ministre, sur la signature de conventions avec plusieurs intervenants pour la répartition du déficit et qui ont porté sur trois bassins hydrauliques et une région avec une enveloppe de 2,3 MMDH, outre la signature d’une convention pour la réalisation de petits barrages et barrages collinaires avec une enveloppe de 4,27 MMDH. Il a, dans ce sens, affirmé que 129 petits barrages ont été déjà programmés entre 2022 et 2024.

Il a également évoqué la signature d’une convention pour le soutien de l’approvisionnement du milieu rural en eau potable avec un coût de 4,31 MMDH (approvisionnement de 119 centres ruraux et près de 2400 douars), en plus de l’élaboration d’un programme d’urgence et complémentaire via deux conventions pour l’acquisition de stations mobiles de dessalement de l’eau de mer (26 stations) et de stations de déminéralisation des eaux saumâtres (15 stations) avec une enveloppe de 600 millions de dirhams et l’acquisition ou la location de camions citernes (971 MDH).

Toutes ces mesures actuelles et futures permettront de soutenir les ressources en eau souterraine et d’assurer l'approvisionnement en eau durant cette période délicate, en particulier dans le milieu rural, les villes et les grands centres qui ont connu ou connaîtront des pénuries d’eau, a-t-il ajouté, concluant qu’elles permettront aussi une exploitation rationnelle des ressources hydriques et une gestion exemplaire renforcée dans le domaine de l’efficacité énergétique.

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