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Les dits et les non-dits de Mohammed VI l’Africain - Par Talaa Saoud ATLASSI
Le Roi Mohammed VI au sommet de l’UA à Addis-Abeba en janvier 2017
Fidèle à son projet de développement et de réforme à l’œuvre dans le Royaume, le Roi Mohammed VI a, dans son discours à la Nation à l’occasion du 48ème anniversaire de la Marche verte, intégré ce projet dans sa dimension africaine, en l’arrimant, dans une dynamique de réciprocité, le développement des provinces du Sud à 23 Etats africains atlantiques.
La Marche verte a parachevé la récupération des provinces du Sud de l’occupation espagnole. Elle s’est poursuivie par la création des conditions d’une vie digne dans ces régions par la réalisation de divers projets de développement. Un élan qui a connu au cours du dernier quart de siècle une accélération notable et que le discours royal entend porter à une vitesse supérieure en le désenclavant de sa ‘’nationalité’’ pour déteindre à partir de la façade atlantique sur l’ensemble du continent.
Dans le prolongement de sa vision de développement stratégique, le Souverain a rappelé l’importance des efforts déployés sur la façade méditerranéenne du Maroc et les promesses qu’ils comportent en termes de coopération avec la rive Nord de la Mare Nostrum. Celle-ci ne saurait suffire ou ne serait sanctuarisée, dans la vision du Roi que si elle est reliée à la bande atlantique dont le niveau de développement se serait mis, par l’approche Sud-Sud, à la hauteur des aspirations africaines sur la base gagnant-gagnant. Seulement alors le Royaume aura concrétisé pleinement sa fonction de jonction stratégique entre les continents, les économies et les cultures.
Le discours royal est porteur d’une série d’orientations en lien avec la dimension africaine dans le processus de développement en cours dans le Royaume, en s’appuyant sur les projets à l’œuvre dans les provinces du Sud. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre l’importance accordée à la dimension maritime de la façade atlantique des provinces du Sud dans son interaction positive avec le voisinage atlantique du Royaume. Le Souverain entend par-là que le Maroc ne se fortifie et réussit réellement que lorsqu’il associe à son œuvre de développement son environnement naturel africain.
Sur le modèle de Dakhla, pour ne citer que le volet touristique sur cette partie de la façade atlantique, des projets similaires et tout aussi réussis pourront pourraient éclore et se développer davantage s’ils s’étendent sur tout un littoral atlantique africain parmi les plus longs, les plus diversifiés et les plus riches. C’est là un secteur où le Maroc dans le cadre d’un échange mutuellement bénéfique, peut apporter une expertise africaine incontestable et bénéficier d’un espace de co-développement où aucun partenaire ne serait un acteur passif.
Le Maroc dispose de réalisations concrètes dans le tourisme, Dakhla étant devenu un porte-étendard, amis également dans la pêche maritime, comme en témoignent les ports des provinces du Sud. Le Souverain appelle donc à conférer à ces success-stories une perspective africaine, où le gigantesque port de Dakhla sur la côte atlantique servirait de hub et de générateur de projets dans le processus de développement national et continental partagé.
La vision royale, loin de se contenter d’énumérer les potentialités dont regorge la façade atlantique des provinces du Sud, englobe la région sahélo-saharienne. Ici, le Souverain propose un projet de développement qui, en ouvrant à cette région des débouchés sur l’Atlantique, pourrait contribuer à résoudre ses multiples problèmes que les mesures sécuritaires ne sauraient à elles seules entamer. Il s’agit là d’une vision qui requiert une contribution internationale et où les intervenants devraient s’investir, au-delà de leurs liens militaires avec la région, dans le développement des infrastructures, les routes notamment, pour y favoriser l’émergence d’une dynamique de développement que viendrait fortifier l’ouverture sur l’Atlantique.
L’intérêt du Souverain pour l’Afrique et pour son développement qui s’est exprimé tout au long de ces dernières vingt années à travers une présence économique effective dans plus plusieurs pays de l’Afrique de l’Ouest a atteint, dans la projection qu’il a de l’avenir du Royaume avec son continent, un degré de maturité qui lui permet de voir plus loin, de viser plus haut et d’agir plus fort. Sans doute, il y a dans l’approche africaine du Roi une part émotionnelle et affective. Mais Il y a aussi et surtout une évaluation objective et rationnelle de l’état des lieux, de ses faiblesses et de ses atouts, que la fibre africaine porte à transcender les difficultés et les obstacles, pour rêver concrètement des possibilités d’un avenir où l’Afrique aura toute sa place, son droit à la parole et son droit de cité.
Ce n’est donc pas un hasard si pour la première fois un dirigeant d’un pays africain s’aventure à soumettre une proposition de développement aussi audacieuse, et aussi risquée parce qu’elle ne sera pas du goût de tout le monde, en vue de sortir la zone sahélo-saharienne du bourbier dans lequel elle se débat depuis les indépendances. Nullement ‘’ethocentré’’, le Roi du Maroc, qui a une conscience aigüe de l’interdépendance afro-africaine pour son essor, car le salut de l’Afrique ne peut venir que du continent, ne pouvait se limiter aux affaires de son Royaume. Motivé par sa vocation africaine, il propose et engage des initiatives pour extraire cette région des approches sécuritaires où elle est enferrée.
Dans son discours, le Roi ne s’est pas montré triomphaliste, en évoquant les succès de sa diplomatie qui ont permis, d’engranger tant d’acquis pour l’intégrité territoriale du Royaume. Le Souverain l’a relié au «le sérieux» de la politique marocaine, cette rare vertu qui fonde un système de valeurs ancestrales basé sur la tolérance et l’ouverture, celui-là même qui a permis l’émergence de l’initiative marocaine d’autonomie, en tant que proposition destinée à résoudre un différend artificiel autour de la marocanité du Sahara. Il s’agit d’une culture politique marocaine habituée à intervenir pour régler les conflits et non pour les amplifier et de les compliquer davantage. C’est ce même sérieux qu’il met dans la dimension africaine de sa vision du monde.
Mais si la préoccupation du Roi pour l’Afrique relève de l’explicite, son discours a aussi comporté des non-dits significatifs. Le silence du Roi sur certaines questions a assurément son pesant d’or. Le Souverain précise que le Maroc n’a d’autre souci que le développement de ses provinces du Sud et leur contribution au processus de développement national global, en tenant compte de l’arrimage nécessaire du Royaume à sa profondeur africaine.
Au Maroc, le tableau de bord est clair : aucunement, il n’est disposé à se laisser impressionner par les gesticulations et les errements de la direction algérienne, via les milices du Polisario, dans la ville d’Es-Smara. Les choses sont ramenées à leur juste valeur : des prétentions terroristes auxquelles le Royaume fait face avec les procédures légales d’usage. La direction politique du Maroc, tout le Maroc, sont préoccupés par le balisage des voies de la paix et de la sécurité au service du citoyen marocain et du développement du Continent africain.