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‘’Remonté contre les moutons’’, Aziz Akhannouch parle enseignement
Si les Marocains veulent un enseignement de qualité, ils désirent tout autant que l’école soit un lieu de divertissement instructif autour de bibliothèques, de terrains de sport, de réfectoires et d’espaces pour l’éclosion des talents.
Par Naïm Kamal
Une fois peut devenir coutume. Le ton n’est pas celui d’un haranguer de foule. Il n’est pas non plus dans la gesticulation marque caractéristique, entre autres, d’un Benkirane. Ce n’est pas le genre de la maison. Mais Aziz Akhannouch est visiblement ‘’remonté contre le mouton’’ et exaspéré par des parlementaires de la Chambre des conseillers qui s’amusent à des enchères politiques sur le prix du mouton de l’aïd plus qu’ils ne se préoccupent de la question de l’Education nationale dont la gestion par ceux qui en ont été responsables pèsent sur les charges des familles.
Un grand problème de société et de développement que son gouvernement essaye, dit-il, de traiter actuellement. Puis lance comme excédé, mais on le devine plus au ton qu’au volume de sa voix, il y a dans les souks des moutons pour 5 mille dhs, pour 2 mille, pour mille, chacun selon sa bourse.
Ensuite s’attaque au vif du sujet. Le Chef du gouvernement qui répondait à une question lors de la séance mensuelle consacrée à la politique publique sur "la réalité du secteur de l’éducation et du plan de réforme", en fait le constat de tous : Catastrophique. Ce n’est pas le terme qu’il utilise, mais il résume bien son laïus saccadé sur l’état des lieux et sur l’école, sur la réhabilitation de la profession d’enseignant et le renforcement de son attractivité et sur l’élève qui devrait être au cœur de l’équation de la réforme du circuit pédagogique.
En morse cela donne : Les élèves ne veulent plus vivre la différence de niveau entre les secteurs public et privé de l’enseignement. C’est leur droit imprescriptible et celui de leurs familles. Un intérêt particulier sera donc porté aux dimensions sociales du problème, notamment en milieu rural, l’objectif étant de donner corps à l’école de l’équité et de l’égalité des chances. Car si la réussite est une affaire individuelle, le devoir du gouvernement est de réunir les conditions de réussite à tous, la suite et ses débouchés étant une question des compétences de chacun.
Reste à traduire concrètement ces idéaux. Comment et surtout quoi faire pour sortir de la marge ce grand oublié des programmes de développement de l’enseignement, oublié du public, ignoré par le privé, qu’est le monde rural ? Pour Aziz Akhannouch il n’y a pas mille et une façons. Il s’agit d’étendre le tissu des internats et des cantines scolaires, de dupliquer les écoles communales qui ont démontré leur efficience à travers plusieurs expériences. Il est question aussi de consolider le réseau et les moyens du transport scolaire. Alors et seulement alors on aura rendu à l’école une certaine attractivité condition sine qua non à l’assiduité des élèves et la réduction si ce n’est l’élimination des déperditions scolaires en cours du cursus.
Est-ce pour autant suffisant ? Certainement pas. Si les Marocains veulent un enseignement de qualité, ils désirent tout autant, en ville comme à la campagne, que l’école soit un lieu de divertissement éducatif autour de bibliothèques, de terrains de sport, de réfectoires et d’espaces pour l’éclosion des talents.
Et si les parents ont besoin aussi de savoir et de sentir que leurs enfants à l’école sont dans un lieu sûr et sécurisé, le Chef du gouvernement a lui un souci supplémentaire qui le peine. La différence des attentes et l’inégalité des désirs. Des élèves réclamant une école smart dotée de tableaux électroniques quand les demandes d’autres se limitent à des classes convenables, moins surchargées, des toilettes tout court et du transport scolaire.
Tout un programme qui a pour horizon 2027. Une réaffirmation des engagements qui rappelle que le Chef du gouvernement est autant sinon plus que son ministre à l’Education, comptable de ce qui se fera ou ne sera pas. Et il n’est pas acquis que la reddition des comptes attendra les prochaines législatives, tant l’enseignement est un secteur extrêmement sensible où les impatiences s’expriment en permanence.
Le programme ? Il consiste en le renforcement de l’autonomie des établissements scolaires en les dotant des budgets nécessaires à leur gestion aussi bien qu’à leur mise à niveau. Mais pas seulement. Un mécanisme de labellisation sera mis en place pour veiller à la qualité des établissements et la gratifier. L’école doit également se mettre au diapason d’un environnement qui baigne dans et respire le Wifi. Et ce n’est là qu’une partie des intrants nécessaires à l’école que les Marocains souhaitent de tout leur cœur, ne pouvant que susciter l’adhésion de tous. Si bien que leur mise en œuvre a d’ores et déjà commencé et un budget de 2,6 milliards de dhs a été alloué à la mise à niveau des établissements scolaires.
Mais si ce sont là des conditions nécessaires, elles sont loin d’être suffisantes. La qualification et la mise à niveau des ressources humaines sont les autres exigences sine qua non à une école attractive, efficiente et véritablement formatrice qui repose en grande partie sur la qualité de la relation enseignant-enseigné. Un vaste programme de réhabilitation de la profession d’enseignant et le renforcement de son attractivité - pour lequel Aziz Akhannouch n’a oublié de remercier le ministre de l’Education nationale Chakib Benmoussa et l’ensemble de ses partenaires sociaux dans ce secteur – a été entamé.