Tribune : Aide sociale directe, des ajustements sont nécessaires - Tarik El Medlaoui

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Par Tarik El Medlaoui

Depuis quelques mois, le gouvernement a lancé, sous les Hautes Instructions Royales de Sa Majesté, une aide directe aux personnes dans le besoin. Cette nouvelle approche a permis à un grand nombre de foyers de bénéficier de cette aide. Qui aurait cru, il y a quelques années, que notre pays serait capable de mener à bien un tel changement de paradigme ?

Passer de la subvention des hydrocarbures et autres matières premières, comme la farine, le sucre et les produits de base, à une aide directe ciblée envers les nécessiteux a exigé plusieurs études préalables, des enquêtes ainsi que des recensements précis des personnes éligibles. Ce vaste chantier représente une avancée considérable.

Ce changement a requis une ingénierie étatique complexe, s’appuyant notamment sur l’expérience acquise lors de la période Covid. Durant les premiers mois de déploiement, de nombreuses discussions ont eu lieu sur les critères d’éligibilité ainsi que sur les indices utilisés pour déterminer ces critères. L’opposition a d’ailleurs dénoncé certaines aberrations dans le choix de ces critères d’attribution.

Aujourd’hui, cette phase semble derrière nous, et de nombreux bénéficiaires reçoivent leur aide sans encombre.

Cependant, quelques mois après l’application, plusieurs constats commencent à émerger, notamment dans les zones rurales et, dans une moindre mesure, dans les zones urbaines. Post-déploiement, de nombreux opérateurs se plaignent de la raréfaction de la main-d’œuvre, car certains individus refusent de travailler pour continuer à bénéficier de l’aide, ou préfèrent travailler sans être déclarés à la CNSS pour percevoir simultanément cette aide.

Récemment, un opérateur agricole du Sud-Est du Maroc, opérant principalement à l’export, m’a confié la difficulté de recruter de la main-d’œuvre. Il a observé que les travailleurs insistent pour ne pas être enregistrés à la CNSS afin de continuer à profiter du système d’aide. Pire encore, un écosystème parallèle s’est développé avec des “rabatteurs” (Semsarra) de main-d’œuvre non déclarée, rémunérés en fonction du nombre de personnes qu’ils mobilisent pour les employeurs. Cet opérateur structuré se retrouve désarmé face à cette réalité : comment investir des millions de dirhams dans des projets agricoles tout en étant confronté à ces problèmes ?

Ces pratiques nuisent non seulement à l’opération d’aide et aux véritables nécessiteux, mais elles risquent aussi de compromettre la pérennité de cette aide. Elles doivent être éradiquées sans tolérance. Non seulement elles perturbent le marché de l’emploi, mais elles affectent également l’attractivité économique de notre pays.

Les exemples les plus frappants proviennent de certains pays européens, qui souffrent encore des conséquences de leurs propres systèmes d’aide sociale. Ces pays ont fini par mettre en place des garde-fous pour protéger non seulement leur bouclier social, mais aussi leur marché de l’emploi et les fondements de leur société.

Il est impératif de garantir un bouclier social pérenne et sécurisé, assurant une parfaite équité sociale, tant attendue.

Tarik EL MEDLAOUI

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