“Aimer le journalisme, c'est d'abord aimer son quotidien, et pas seulement ses exploits.”

Michel Field

“Les livres relatent toujours l'histoire de l'homme. Ils racontent ses rêves, ses guerres, ses conquêtes, ses exploits. Son salut ou sa perte. L'homme est seul à se sauver parce que lui seul dispose du temps et de l'espace.”

Madeleine Ouellette-Michalska 

Décidément, cette fin 2022 restera mémorable.

La sélection nationale de football aura conquis les esprits des Marocaines, des Marocains, des Africains, des Arabes, des Amazighs… et de tous ceux qui ne se retrouvent pas dans l’ordre footballistique mondial et dans l’ordre mondial tout court.

Réveiller le panarabisme, rappeler que les Arabes ont une cause, que les pays du sud sont victimes du fameux ordre mondial et qu’ils ont tous le droit légitime de se défendre… C’est un vrai exploit.

Un exploit est une action d’éclat, une action mémorable qui dépasse les limites ordinaires, un haut fait…

Les penseurs, les écrivains comme les journalistes n’ayant plus l’impact nécessaire, faute d’audience, c’est une compétition de foot qui secoue le cocotier…

Grace à la télévision le foot est devenu non seulement une industrie où l’on brasse des sommes colossales mais aussi un vecteur de valeurs. La société du spectacle dans toute sa splendeur c’est à dire dans son emprise sur le monde.

Cette illusion de pseudo-vie, au sens de Guy Debord, qu’impose la société capitaliste se réinvente quant à ses outils de plus en plus efficaces.

Maintenant que la fièvre est tombée, vive la récupération idéologique. Des plus conservateurs aux plus modernistes, chacun piochera dans l’exploit une justification de ces croyances anciennes. 

On a commencé par les femmes dans les cafés de nos grandes villes et on est passé par les supporters de Gaza et de Jérusalem qui acclament le onze national et ce matin [jeudi 15/12] par le président Américain qui regarde le match en compagnie du chef du gouvernement qui lui offre un maillot de l’équipe nationale. 

Par devoir d’informer, je devrais quand même rappeler que notre chef de gouvernement assistait au sommet USA-Afrique qui passe comme un non évènement alors que des messages importants y sont passés. Au-delà des photos et du protocole, quelle en serait la substance ?

Les votes des pays africains à l’ONU sur des résolutions contre la Russie et son opération spéciale en Ukraine ont montré beaucoup d’hésitations et parfois de rébellions. Ils ont révélé un froid, un désamour, sinon un malaise dans les relations entre les Africains et les USA.

C’est le deuxième sommet du genre après celui organisé sous la présidence Obama en Aout 2014. Le président Biden y a annoncé devant une cinquantaine de délégations africaines une enveloppe de 55 milliards de dollars sur 3 ans destinés à la santé et aux effets des changements climatiques. 

Est-ce suffisant pour contrer l’influence grandissante des Chinois, des Russes et des autres ?

En plus, Joe Biden, plaiderait pour l’intégration permanente de l’Union africaine au G20 et même un jour du conseil de sécurité des nations unies.

On attendra quelques temps pour déchiffrer et voir si la nouvelle politique Africaine des États unis passera de la réaction à l’action. Beaucoup d’Africains souhaiteraient un engagement plus actif sur le continent. 

Sinon, l’appel direct et peu diplomatique du Président Biden à limiter la coopération avec la Russie et la Chine paraîtrait plus comme une menace que comme un geste de partenaire.

Un petit clin d’œil

Pendant ce temps-là, le président turc Recep Tayyip Erdogan s’organise pour la construction d'un nouveau gazoduc entre l'Europe et le Turkménistan, en passant par la Turquie. Ce projet pourrait aider l'Union Européenne à réduire sa dépendance au gaz russe. La seule ombre à l’horizon pour l’UE c’est la sympathie et les intérêts grandissants entre Ankara et Moscou. 

Il faut dire que bien souvent, la sympathie grandit bien avec les intérêts…