société
Une idée solaire – Par Naïm Kamal
Ne pas bronzer idiot ! C’est l’idée solaire que vient de redécouvrir l'Office National de l'Electricité et de l'Eau Potable (ONEE – prononcez ONI).
La culture à la plage. L’on pourrait imaginer qu’il s’agirait de jeunes footballeurs saisonniers, déchaussés, mais socquettes blanches à mi-jambe, exhibant fièrement d’appétissants pectoraux encore fermes, s’adonnant au sport du ballon sans se soucier des autres gens qui sont là pour autre chose que de les regarder brasser du sable et leur pomper le soleil.
Non, il n’est pas question de culture physique, mais de culture culture. Au vrai et plein sens du terme, celle qui muscle les neurones et développe la connexion entre les synapses, fait travailler simultanément les deux hémisphères du cerveau.
Pavillon bleu et bronzage pâle
Ne pas bronzer idiot ! C’est l’idée solaire que vient de redécouvrir l'Office National de l'Electricité et de l'Eau Potable (ONEE – prononcez ONI). En plantant à la plage de Bouznika pour lui faire mériter entièrement son Pavillon bleu, une bibliothèque, une vraie, avec de livres et, on présume, un dispositif de consommation sur place ou à emporter, au choix, peut-être ont-ils aussi imaginé un système de livraison à serviette, bien au milieu de la plage, sous l’ombre apaisante d’un parasol assorti au maillot. Ou pas.
L’ONEE explique que cette bibliothèque offre une centaine de livres dans divers domaines scientifiques et cognitifs. La plupart d'entre eux traitent d'aspects liés à l'environnement, compte tenu de son importance dans la préservation du domaine marin.
Parmi les ouvrages proposés, le premier volume de l'Encyclopédie, qui en compte quatre, de "L'eau dans la pensée islamique et la littérature arabe", rédigée par le professeur Mohammad ben Abdelaziz ben Abdellah et publiée en 1996 aux éditions du ministère des Habous et des Affaires Islamiques. On y trouve également «Vers une intégration systématique de l'éducation environnementale dans l'éducation formelle arabe" d’Ahmed El Hattab.
L’agréable à l’agréable
Impressionnant, non ! De quoi culpabiliser, n’est-ce pas ? Car si avec une telle offre vous n’intégrez pas à la sortie des vacances le cycle des thésards de Dar al-hadith al-hassania ou l'Institut Supérieur d'Etudes Maritimes, c’est que vous n’avez pas su profiter du village pédagogique mis en place par l’Office, ni fructifier l’offre de ses ateliers sports nautiques, dessins et recyclage, métiers de l'eau et sensibilisation. Parce que vous appartenez aussi, forcément, à la catégorie des hédonistes et sous-doués qui ne trouvent d’utilité à l’agréable que joint à l’agréable.
Mais ne culpabilisez point trop n’en faut. Après une année académique qui s’est étirée pour certains jusqu’au 20 juillet par temps caniculaire, si vous n’avez pas, non plus, mis à profit vos vacances pour être fin prêt intellectuellement pour la prochaine rentrée, ce n’est pas, non plus encore, de votre seule faute. C’est seulement que personne ne vous a appris que la culture c’est ce qui reste quand on a tout oublié, les biceps et les triceps, le grand air et l’art de ne rien faire, et surtout que vous n’aviez pas lu Le Droit à la paresse de Paul Lafargue. Là enfin, la responsabilité incombe exclusivement à la bibliothèque de l’ONEE à la plage de Bouznika qui n’a pas pensé à le faire figurer dans son catalogue estivalier.