Le Soir : l’Algérie n’a plus les moyens d’acheter la paix sociale

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« Par essence opaque, le système (algérien) n’a plus les moyens d’acheter la paix sociale », écrit, ce vendredi 06 janvier, le quotidien belge « Le Soir », en commentant les émeutes qui ont secoué la ville algérienne de Béjaïa.

Le quotidien se demande « pourquoi l’Algérie est en proie à de violentes émeutes » et indique que « par essence opaque, le système n’a plus les moyens d’acheter la paix sociale. D’où ces lézardes qui apparaissent çà et là ».

« Le Soir » ajoute que « face aux troubles qui auraient aussi éclaté dans des quartiers de la capitale, Alger (...) les algériens ne savent guère à quel saint se vouer ».

La publication explique que « l’opacité du système qui les régit depuis l’indépendance en 1962 s’est encore épaissie avec la maladie de leur président, Abdelaziz Bouteflika, dont beaucoup se demandent s’il conserve toute sa tête. Ce qui relance les spéculations sur les vrais détenteurs du pouvoir, un pouvoir procédant de l’institution militaire et qui, beaucoup le pensent, se dissimule sous une sombre bureaucratie corrompue ».

Revenant sur l’origine des troubles de Béjaïa, le quotidien relate que l’épicentre des événements se trouve dans la zone de cette ville, la plus grande de Kabylie (berbère) située sur la côte, à quelque 250 km à l’est d’Alger. « A l’origine, un appel à la grève des commerçants locaux pour protester contre des hausses de taxes prévues par la loi de finance 2017, entrée en vigueur le 1er janvier. Puis le dérapage, le 2 janvier : des jeunes casseurs qui passent à l’action, des bâtiments publics attaqués, des magasins pillés, la répression par les forces de l’ordre, des arrestations, nombreuses. Une ville paralysée pendant deux jours et un climat de peur », décrit le journal.

Sous le titre « la rente en danger », « Le Soir » observe que « les troubles sociaux qui émaillent çà et là la vie quotidienne en Algérie depuis quelques années coïncident avec la chute des prix du pétrole ».

« Un baril de brut qui passe de 112 dollars en 2014 à 45 en fin d’année dernière et c’est tout un système rentier qui tremble sur ses bases », écrit-il, précisant que « les recettes venant de l’exportation des hydrocarbures-95 % des rentrées d’argent-qui passent de 70 milliards de dollars à juste 26 constitue le cauchemar du gouvernement ». Il poursuit que le régime algérien avait coutume, plus encore depuis les printemps arabes de 2011, d’acheter la paix sociale grâce à la manne venue du sous-sol, à coups de subsides publics (hausses des salaires, produits de base subventionnés, constructions de bâtiments publics, de logements sociaux, grands travaux, etc.).

Le journal explique que « les maux de l’économie algérienne, qui ne produit guère et importe beaucoup, apparaissent dès lors au grand jour », d’où « les prix qui flambent ».

A titre d’exemple, le quotidien note que le prix du beurre a quintuplé en deux ans, l’huile de tournesol a augmenté de 40 %, et relève que « la mise en œuvre d’un budget 2017 d’austérité passe mal ».

« Le Soir » dresse, dans ce contexte, la chronologie des troubles que l’Algérie a connus depuis l’indépendance à nos jours. Il rappelle ainsi les émeutes d’une grande violence qui ont secoué le pays, en 1988 et « la répression » qui s’en est suivie et qui a fait « des centaines de morts ».

En 1992, rappelle encore la publication,  l’armée fait un coup d’Etat et annule les élections. Le pays bascule dans une « sale guerre » d’une violence extrême, qui fera jusqu’à 200.000 morts.

« Le Soir » signale aussi qu’en « 1999 Abdelaziz Bouteflika devient président, mais frappé par un AVC, il s’accroche au pouvoir, avec l’aval des décideurs occultes ».

 

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