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Présidentielle en Argentine : la campagne électorale s'enflamme – Par Rachid MAMOUNI
Photo archives 2019 - La présence côte-à-côte de la vice-présidente et du président sortant Alberto Fernandez, qui ne se parlent pas depuis plusieurs mois, a donné l’image d’une majorité regroupée
Par Rachid MAMOUNI (MAP – Pole Amérique du Sud)
Buenos Aires - La campagne électorale pour les primaires « ouvertes, simultanées et obligatoire » du 13 août prochain en Argentine s’est enflammée ce week-end avec l’entrée dans l’arène de la vice-présidente Cristina Kirchner, personnage central de la politique locale et principal atout du gouvernement pour rempiler.
L’inauguration d'un nouveau tronçon d’un gazoduc stratégique pour le pays a été le prétexte idéal pour présenter officiellement le candidat de la majorité aux présidentielles, par ailleurs ministre de l’économie Sergio Massa, et surtout pour montrer une image d’unité de la majorité autour de lui.
La présence côte-à-côte de la vice-présidente et du président sortant Alberto Fernandez, qui ne se parlent pas depuis plusieurs mois, en compagnie de Sergio Massa a donné l’image d’une majorité regroupée autour de son candidat qui est investi de la mission de barrer la route à un retour aux affaires de l’opposition du centre-droit.
Dès les premiers mots prononcés devant les leaders du mouvement peroniste réunis au complet, Cristina Kirchner entrait de plain-pied dans la campagne présidentielle. Elle a commencé par faire l’éloge de Sergio Massa qui a eu, selon elle, la charge du ministère de l'économie "à un moment très difficile, très complexe".
Elle a notamment fait référence à "la force que vous avez déployée depuis que vous êtes ministre (...).Vous n'avez pas abandonné et vous êtes allé de l'avant, ce qui est toujours une bonne chose", a ajouté la vice-présidente à l’adresse du candidat de la coalition « Union pour la Patrie » (centre-gauche).
Malgré un contexte économique peu favorable, le gouvernement sortant tente de construire un argumentaire convainquant autour des réalisations accomplies au cours des quatre dernières années.
Lors de la même cérémonie, le ministre de l’économie a accompagné cette narration par la mise à l’index de « tous ceux qui disent que l'Argentine est un pays de frustration, d'échec, sans destin et sans avenir (…). Ils mettent des obstacles sur notre chemin et veulent nous condamner à être un pays dépendant, nous avons les moyens de construire la souveraineté, la patrie et l'avenir de notre nation", a affirmé le candidat à la présidence au nom de « l’Union pour la Patrie ».
Le président sortant a lui aussi défendu le bilan de son gouvernement, malgré un triple contexte difficile de la pandémie, de la guerre en Ukraine et de la sécheresse qui a frappé le pays, appelant à voter pour son ministre de l’économie, qui est accompagné sur le même ticket présidentiel par le chef du cabinet des ministres, Agustin Rossi, afin de continuer à « construire une Argentine plus égalitaire, avec justice sociale et intégrée dans le monde sans qu’elle soit soumise à une quelconque puissance".
C’est justement ce même bilan mitigé du gouvernement qui constitue la cible de prédilection des attaques sans répit des leaders de l’opposition, réunie au sein de la coalition « Ensemble pour le changement » (centre-droit).
Ainsi, peu de temps après le discours de Cristina Kirchner, l’ancien président Mauricio Macri (2015-2019) et chef de file de l’opposition, a critiqué « l’obstination du Kirchnerisme » (en référence au mouvement qui se réclame de l’ancien président Nestor Kirchner, défunt époux de Cristina Kirchner) à nier toute œuvre menée par l’opposition, à l’image de ce gazoduc déjà planifié et préparé sur le plan financer par son gouvernement en 2019.
Les autres leaders de la majorité, à leur tête les principaux candidats aux présidentielles, Patricia Bullrich (présidente du parti Proposition Républicaine-PRO) et Horacio Larreta (Maire de Buenos Aires), ne ratent aucune occasion pour épingler le bond de l’inflation à 114% en mai dernier, la flambée du taux de change Dollar/Peso, l’aggravation du taux de pauvreté qui frôle 40% et le bouillonnement sur le front social avec une grève des transports vendredi dernier qui a paralysé la capitale et six autres provinces du centre et du nord du pays.
L’opposition reproche également au gouvernement sa politique sécuritaire qui se traduit par une violence urbaine imparable et l’extension des tentacules du trafic de drogue à travers le pays.
La frénésie de la campagne électorale a atteint un autre candidat aux présidentielles, mais cette fois-ci sur le plan judiciaire.
Le dirigeant du parti « Libertad Avanza » (droite libérale) a été accusé d’avoir monnayé les candidatures au nom de son parti, déclenchant une enquête de la justice électorale à son encontre.
Cette enquête vise à confirmer la véracité des accusations selon lesquelles ce parti aurait demandé des milliers de dollars en échange de l’octroi de candidatures à des postes de conseillers, de députés et de maires dans différentes provinces du pays.
Milei, qui se veut l’outsider de ce scrutin et le candidat préféré des jeunes, a toutefois rétorqué qu’il est pris pour cible par les médias et la classe politique traditionnelle afin de l'écarter de la course présidentielle.
Cette agitation qui s’est emparée de la classe politique en ce début de campagne électorale va aller crescendo au cours des prochaines semaines avec les tentatives de positionnement des uns et des autres pour attirer les électeurs hésitants.
Il est évident que les débats vont être centrés sur le terrain économique, avec des incursions doctrinaires et historiques.
Le fameux chroniqueur Jorge Lanata a écrit ce week-end dans le quotidien Clarin que l’inflation en glissement annuel serait de 145%, une contre-performance qui va impacter l’humeur des Argentins face urnes, une fois dans l'isoloir le 13 août prochain.