Presse : le rêve d’une génération – Par Ahmed Charaï

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Une génération qui, additionnant une somme d’intelligences, de compétences, a réussi à installer une presse qui a attiré des chroniqueurs de talent, imposé un impact certain.

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La force de la démocratie – Par Ahmed Charaï

Le Directeur de la MAP, Khalil Hachimi Idrissi nous a quittés. KHI, comme il aimait signer, n’était pas juste un commis de l’État. Il a publié plusieurs recueils de poèmes, mais était surtout un journaliste, puis un patron de presse.

Il fait partie d’une génération qui, malgré les différences, parfois les divergences, partageait le même rêve, celui d’une presse indépendante. Ils/elles ont choisi l’indépendance dans la responsabilité. Patriotes jusqu’au bout des ongles, ils n’avaient pas besoin de se concerter quand il s’agissait des intérêts suprêmes de la Nation ou de la stabilité des institutions. Ils le faisaient par conviction et non pas pour plaire.

Ils s’étaient engagés dans un combat exaltant mais difficile. Institutionnaliser une presse moderne, libre, de qualité.

Ils avaient d’abord pour eux la maîtrise de la langue. Quiconque a connu cette période est nostalgique de l’emphase de Abdallah Stouky, des sarcasmes lettrés de Feu Khalil, des envolées d’El Gahs, des triturations malicieuses voire délicieuses de la langue de Molière d’un Naïm Kamal, du mélange du direct et du suggestif d’un Jamal Berraoui, du franc écrit d’un Khalid Jamaï et de sa célèbre lettre à Driss Basri.

Bien d’autres ont marqué cette période, Si Mohamed Brini qui a réalisé avec Al Ahdath une véritable success stroy, Abdellatif Mansour qui depuis Maroc Hebdo avait le même rêve, mais aussi Malika Malak et Fatima Loukili qui transposaient la même ambition au sein de l’audiovisuel.

Cette somme d’intelligences, de compétences, a réussi à installer une presse qui a attiré des chroniqueurs de talent, imposé un impact certain.

Même quand il y avait de l’inimitié en l’air, la culture des uns et des autres faisait qu’ils étaient d’un commerce agréable, jamais à court d’un bon mot, et respectueux des différences.

Certains nous ont quittés, d’autres sont vivants mais ont souvent pris leurs distances. La presse qui sacrifie la vérité à la recherche du buzz est pour eux un cauchemar.

Ils ont pratiqué la critique, même extrême, dans la nuance parce que le monde est complexe, avec l’exposé du savant, parce que leur culture embrasse tous les domaines.

Cette génération était mue par un rêve, elle l’a réalisé en partie et cette partie constitue l’âge d’or de la presse marocaine.

Que Khalil et ceux qui l’ont précédé dans la mort reposent en paix. Longue vie aux survivants et toute notre gratitude pour la grandeur de votre combat.