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Tribune : La géopolitique en souffrance – Par Abdelahed Idrissi Kaitouni
Qu’importe que ces propos dérangent ou paraissent excessifs ! (L’Occidental n’y verra que les soubresauts ou les râles de quelqu’un mortellement blessé). Ça reste des mots et ils dérangeront toujours infiniment moins que le seul mot sionisme ! (Photo AFP)
Ainsi formulé, on a l’impression que la géopolitique pouvait avoir quelque chose de rassurant. Bien au contraire, tous les traités de géopolitique ont un côté alarmant et comportent souvent une bonne dose d’inquiétude.
Mais par les temps qui courent, les spécialistes s’accordent à dire que les données connues font peser de lourdes incertitudes sur le proche et moyen terme. Le monde d’aujourd’hui serait-il donc plus dangereux qu’auparavant ?
Personnellement, je n’y crois pas ! Beaucoup de chroniqueurs par le passé, quand ils décrivaient les situations qui précédaient les grandes conflagrations, semblaient tétanisés par les incertitudes qui pesaient sur les lendemains. Alors pourquoi les spécialistes d’aujourd’hui s’inquiètent-ils outre mesure du glissement du monde vers des lendemains incertains ?
Apparemment, ils ne sont plus maîtres de leur discipline, car tous les horizons semblent brutalement s’assombrir. On est enclin à le croire puisque, dans un processus inexorable, on constate que les médias ont fini par déposséder les spécialistes de géopolitique du moindre détail constitutif de la trame de leurs réflexions. Il est indéniable que les médias, ces redoutables machines à fabriquer des mensonges, faussent l’ensemble des paramètres, rendant vaines et parfois obsolètes les tentatives d’établir des doctrines géopolitiques cohérentes à certains endroits.
Le monde a toujours été dangereux, il l’est devenu plus à cause des médias qui ont monopolisé l’information, rendant aveugles géopolitiques et gouvernants. Ces derniers, pataugeant dans le faux et en l’absence de la moindre certitude, sont condamnés à un suivisme éhonté des puissants de ce monde. On comprend la désaffection des élites face à la politique : nul n’accepte de gouverner un pays quand la réalité du pouvoir échappe aux institutions et devient l’apanage des médias. Pour prendre l’exemple de la France, les multiples génies qui y pullulent se sont résignés à laisser le pays entre les mains de personnages comme Sarkozy ou Macron. On ne doit guère s’étonner d’assister au déclassement irrépressible de ce pays tant adulé.
Je regrette mon ton vindicatif à l’égard des médias, et je m’en excuse auprès de mes lecteurs qui continuent, naïvement, à leur vouer estime et admiration. Je me sens infiniment mieux en évacuant l’imposture médiatique. J’espère ainsi libérer ma conscience en tentant de secouer l’infamant carcan construit par ces mêmes médias pour m’y enfermer avec les autres porteurs d’opinions libres qui subsistent ici et là. Me taire aurait constitué une immense souffrance pour moi. Je redoute par-dessus tout que mon silence ne vienne à s’additionner à celui de la multitude pour donner l’impression d’un faux acquiescement à leurs sombres desseins. N’est-ce pas en réduisant les uns et les autres au silence que les médias ont fini par asservir le monde ?
Le modus operandi des médias est déconcertant d’efficacité : à chaque mot-clé du lexique de la géopolitique, il lui oppose son antonyme. Parlez d’ordre et ils vous embarquent dans une avalanche de concepts où le désordre est roi. Parlez de vos émotions et ils ne rendront compte que des passions qui déchirent. Faites appel à la rationalité, ils n’y verront qu’une forme déguisée d’irresponsabilité.
Les médias ont toujours fait de la peur un commerce lucratif. Au-delà de ce côté vénal, la promotion de la peur s’inscrit dans une opposition violente à l’idée même d’espoir !
C’est à chaque fois le versus négatif que l’opinion doit gober. À croire qu’au gouvernail, ceux qui mènent la Doxa n’ont qu’un seul cri de ralliement : négative toute ! Assez flagrant pour mettre cette attitude castratrice sur le seul compte de l’inconscience ou de l’absence de pensée.
À l’évidence les médias, même à court de toute pensée, n’échappent pas à leur tour à la peur panique de voir poindre ici ou là un début d’éveil des consciences. Oui, ils craignent par-dessus tout cet éveil qui va sonner le glas à leur outrageuse domination. Alors, ils redoublent de vigilance pour s’assurer de la vacuité de la conscience humaine, dès lors que la communauté est dépouillée de conscience, elle devient proie facile pour l’embarquer dans les aventures les plus insolites. Ses gouvernants sont dans le brouillard, et n’ont de maîtrise sur rien, et surtout pas sur la marche du monde.
Est-ce la fin de l’histoire comme beaucoup d’auteurs se complaisent à développer dans des études rébarbatives pour justifier l’impuissance des élites à sortir des impasses, voulues et décrétées comme inéluctables ? Non, il n’y a pas de fatalité à la fin de l’histoire !
Pourtant l’Occident, sous le diktat du sionisme, est en train de prendre le chemin de sortie de l’histoire !
Énormément de pensées alternatives existent. Elles sont là, bonnes à prendre dès lors qu’on essaie de remettre l’humain au centre de ces pensées.
Mais la doxa internationale préfère regarder ailleurs, alors il ne lui reste que le recours à l’usage excessif de sa puissance pour pérenniser sa domination. Certes, l’usage de la force, le recours à la violence sont des constantes des rapports humains. Mais aujourd’hui, le facteur aggravant c’est que l’Occident ne connaît plus que la force extrême, et infiniment disproportionnée, non pour « forcer » une situation militaire donnée, mais pour combler une vacuité de conscience. Ceci le place désormais au banc de l’humanité.
Le génocide et les crimes de guerre en cours à Gaza confortent ces propos, et les rendent moins excessifs, et nettement en dessous de la triste réalité. Jamais des humains, à leur corps défendant, ne se sont impliqués dans un crime aussi immonde. En comparaison, la Shoah n’apparaît plus que comme l’épiphénomène. Ce qui rajoute l’horreur à toutes les horreurs, c’est que les Israéliens, avec la complicité béate des USA, tuent aujourd’hui juste pour tuer. Gratuitement, car ils sont dans l’incapacité de formuler les objectifs pour après le carnage. Ils n’ont d’autres horizons que la guerre, et ne sont intéressés que par les guerres qui sèment un maximum de morts et le plus de dévastations. Arrivent-ils à imaginer le jour d’après ? Que nenni ! Comment le pourraient-ils quand qu’ils sont dévorés par une haine inextinguible et quand, de leur cœur, ils ont banni à tout jamais le plus infime sentiment d’humanité ?
Ils n’ont plus qu’une seule conscience, celle de leur puissance et de tout le mal qu’ils peuvent infliger en faisant un usage excessif. Assiste-t-on à la mort annoncée de la géopolitique ? Apparemment oui, puisqu’elle ne pourra plus aider à comprendre les mécanismes de domination des uns par les autres. Elle ne sera désormais plus que la combinaison entre puissance excessive et vacuité de conscience. Allez construire avec ça une théorie géopolitique !
Pour Israël et ses affidés occidentaux, dominer, même en recourant à la puissance excessive, n’est pas en soi un objectif géopolitique, car le but ultime est de tuer, tuer encore et encore. On redoutait une escalade vers l’inconnu. Cet inconnu a aujourd’hui un nom : l’incroyable forfaiture d’Israël et de l’Occident à Gaza. À croire que la Shoah a enfanté la plus monstrueuse des forfaitures de tous les temps.
Qu’importe que ces propos dérangent ou paraissent excessifs ! (L’Occidental n’y verra que les soubresauts ou les râles de quelqu’un mortellement blessé). Ça reste des mots et ils dérangeront toujours infiniment moins que le seul mot sionisme !