Culture
27ème SIEL : POUR UN RETOUR DU PATRIMOINE INTELLECTUEL AFRICAIN
L’initiative du Cercle d’Oujda (Photo) emboite le pas à celle de l’Académie de Royaume du Maroc de créer le 26 mars dernier la Chaire des Littérature et des Arts africains
Le 27ème Salon International de l’édition et du livre de Rabat a vu la réunion des membres du Cercle d’Oujda des éditeurs autour des projets du Cercle et des enjeux de la coédition, indique un communiqué. La réunion a été l’occasion de réunir les signatures de l’ensemble des membres du Cercle en faveur de la tribune initiée par leur confrère malien Ibrahima Aya Pour un retour du patrimoine intellectuel africain, ajoute la même source qui précise que cet appel s’inscrit dans les valeurs de respect, d’équité, d’accessibilité et de circulation des œuvres à l’intérieur de l’espace francophone.
Cette initiative emboite le pas à celle de l’Académie de Royaume du Maroc de créer le 26 mars dernier la Chaire des Littérature et des Arts africains qui traduit, la volonté de réhabiliter la production romanesque, poétique, musicale te picturale africaine qui a été "victime de préjugés ayant consacré son isolement sur le plan culturel".
Elle se veut aussi un espace de coopération universitaire et de partenariats académiques ouverts sur les cultures du monde.
La cérémonie de lancement s'était déroulée le 26 mars 2026 en présence d'intellectuels marocains et étrangers intéressés par la culture et la littérature africaines, tels que Tahar Benjelloun, Calixthe Beyalane, Eugè Ebodé et Jean Pierre Orban.
S'exprimant à cette occasion, le secrétaire perpétuel de l’Académie du Royaume, Abdeljalil Lahjomri, avait affirmé que la Chaire des Littératures et des Arts africains est un projet littéraire ambitieux qui donnerait à la littérature et au patrimoine africains la place qu'ils méritent, eu égard au rôle qu’elle va jouer en tant que moyen de transfert du savoir.
Le séminaire qui a suivi ce lancement s’est déroulé le 17 mai 2022 à l’Académie du Royaume sous le thème de ‘’Du devoir de violence aux devoirs des lettres". Lauréat du prix Renaudot pour l’année 1968 pour "Le devoir de la violence" avant d’être ‘’disgracié’’ par la critique occidentale, Yambo Ouologuem était la source d’inspiration du romancier sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, lauréat du prix Goncourt 2021 pour son roman "La plus secrète mémoire des hommes",
L’appel d’Ibrahima Aya : POUR UN RETOUR DU PATRIMOINE INTELLECTUEL AFRICAIN
Le débat sur la restitution des œuvres d’art à l’Afrique s’est ravivé ces dernières années, tant en France que sur le continent africain. A qui faut-il les rendre ? Quel est leur statut ? Ont-elles leur place dans des musées, et si oui lesquels ? En écho, la question de la restitution du patrimoine intellectuel de l’Afrique francophone, soulevée à travers plusieurs prises de position, doit être portée encore plus largement et soutenue plus fermement.
Depuis des décennies, la majorité écrasante des grands écrivains de l’Afrique francophone, qu’ils vivent en Europe ou sur le continent, sont publiés par des maisons d’édition européennes qui en détiennent la propriété intellectuelle pour le monde entier et, dans certains cas, jusqu’à 75 ans après la mort de l’auteur. On ne peut pourtant nier qu’à défaut d’écrire pour le public africain, les auteurs africains de la diaspora écrivent aussi pour ce public-là. Pas besoin d'une étude pour constater que le taux d’accès de ce public à ces œuvres est presque nul. Les éditions originales arrivent au compte- goutte sur le continent et se vendent à des prix prohibitifs (la moitié d’un salaire moyen). Quant à la deuxième génération de textes : les éditions de poche des livres à succès, elle arrive en Afrique deux ou trois ans après, toujours dans des conditions et à des prix qui tiennent éloigné le grand public. Nombre de ces ouvrages sont d’ailleurs immobilisés par des accords de citation existant entre les éditeurs originaux et les éditeurs scolaires, majoritairement français.
Le recours à l’acquisition des droits d’œuvres majeures en vue de rééditions par des maisons africaines résout pour partie la question. C’est déjà ça, mais c’est loin d’être suffisant. Un modèle économique à généraliser, déjà très modestement pratiqué par certains éditeurs, consiste à prévoir dans le contrat passé avec l’éditeur européen que l’auteur reste propriétaire de ses droits, à minima pour son pays d’origine, au mieux pour l’ensemble des pays francophones du continent. Pourquoi auteurs et éditeurs s’y engagent si peu ? Parce que les habitudes perdurent, que les auteurs ne pensent pas ou n’osent pas négocier. Les classiques africains de demain diront-ils qu’ils ne savaient pas ou n’avaient pas le choix ?
En tout cas, les auteurs y gagneraient un public, et le marché du livre africain, enrichi de ces œuvres, pourraient créer une dynamique favorable à l’émergence de nouveaux auteurs. Même si l’Europe s’est érigée en banque centrale qui habille, consacre les auteurs et même les éditeurs, bien des éditeurs africains ont fait la preuve qu’elle n’est pas la seule découvreuse de talents.
C’est pourquoi nous, auteurs et acteurs du livre en Afrique, demandons que l’édition française ne séquestre pas à son seul profit le patrimoine littéraire et intellectuel africain, il suffit pour cela de retirer quelques lignes sur les contrats d’édition.
Le cercle d’Oujda des éditeurs
Créé en 2019, le cercle d’Oujda des éditeurs réunit 15 maisons d’édition francophones issues de 8 pays. L’objectif de cette instance est de mener à terme des projets de coédition entre ses membres, tout en profitant des expertises des uns et des autres et de recréer des liens forts et concrets entre les pays, du Sud et du Nord, via le secteur de l’édition, rappelle un communiqué du Cercle. Il s’agit d’un laboratoire de mise en œuvre des enjeux exprimés lors des Etats généraux du livre en langue française qui se sont tenus en septembre 2021 à Tunis.
Contact presse : Adeline Barré adeline.barre@occitanielivre.fr
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