L’école Sidi Ziane à Oujda : un siècle d’éducation, de culture et de mémoire collective

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Premier établissement mixte construit dans la médina, près de la porte Sidi Aïssa, l’école franco-arabe deviendra rapidement école Sidi Ziane. Classes urbaines et sections d’apprentissage (agriculture, menuiserie, ajustage) vont cohabiter au sein de cette grande belle école

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Quid avec MAP

Témoin des grandes mutations du XXe siècle, l’école Sidi Ziane trône encore aujourd’hui dans l’ancienne médina d’Oujda comme un repère éducatif, patrimonial et identitaire. Un lieu chargé d’histoire où se croisent les héritages marocain et universel.

Un patrimoine vivant au cœur de la médina

Nichée près de Bab El Gharbi, porte emblématique de l’ancienne médina d’Oujda, l’école Sidi Ziane se distingue comme l’un des plus anciens établissements éducatifs du Maroc. Fondée en 1907 sous le nom d’"école franco-arabe", elle fut le premier établissement à caractère officiel de la ville. Dès sa création, elle visait à concilier tradition architecturale marocaine et desseins éducatifs coloniaux.

Les deux coupoles installées dans sa cour évoquent l’architecture des mausolées, offrant aux élèves un cadre familier et respectueux du paysage urbain traditionnel. Plus qu’un bâtiment, l’école fut pensée comme un outil d’intégration culturelle et un pont entre les civilisations.

Une fondation stratégique dans un contexte colonial

L’historien Badr Maqri rappelle que l’édification de l’école est survenue dans un contexte politique particulier : l’arrivée du général Lyautey à Oujda. Financé par des capitaux privés français, le projet a été lancé malgré les lenteurs administratives, illustrant son importance stratégique. L’école devait servir de levier culturel pour diffuser la langue française tout en maintenant un lien avec l’identité arabo-musulmane locale.

Située dans le quartier Oulad El Gadi, elle tire son nom actuel du mausolée de Sidi Ziane à proximité. En 1948, après la construction de l’"école jdida", elle adopte le nom d’"école lbalia", puis devient un symbole d’histoire et de continuité.

Une vocation internationale et plurielle

Dès ses débuts, l’école n’a pas seulement accueilli des élèves marocains. Des élèves venus de divers pays arabes et européens ont fréquenté ses bancs, donnant à l’établissement une ouverture internationale rare pour l’époque. Entre 1907 et 1925, elle dispensait des formations professionnelles en agriculture, menuiserie et électricité, avant d’évoluer vers un enseignement généraliste accessible à tous les niveaux.

Un moment emblématique de son histoire fut la visite du roi des Belges, Albert Ier, et de son épouse en 1921, perçue comme une reconnaissance de son importance. À la même époque, Mohamed Ben Hassan El Hajoui Taalbi présidait l’Association des parents d’élèves, entre 1910 et 1938.

Un foyer culturel et artistique majeur

Loin de se limiter à la pédagogie, l’école Sidi Ziane a marqué l’histoire culturelle du Maroc. En 1921, elle voit naître Al Andaloussia d’Oujda, première association musicale marocaine, qui représentera le Royaume au Salon international de Paris en 1931. L’établissement s’impose ainsi comme un centre multidimensionnel, mêlant éducation, culture et rayonnement artistique.

De nombreuses figures intellectuelles, politiques et culturelles du Maroc, du Maghreb et d’ailleurs ont été formées dans ses salles, faisant de Sidi Ziane une véritable pépinière d’élites.

Une école ancrée dans la modernité, fidèle à son héritage

Aujourd’hui encore, l’école Sidi Ziane reste active. Malgré les transformations urbaines d’Oujda, elle poursuit sa mission éducative et conserve son aura. Elle incarne une mémoire vivante, illustrant la capacité du système éducatif marocain à évoluer tout en restant enraciné dans l’histoire et les valeurs.

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