Cinéma, mon amour de Driss Chouika : BÉLA TARR, L'ORIGINALITÉ ATYPIQUE D’UN CINÉASTE VISIONNAIRE

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Damnation est un film sur un homme perpétuellement en train de mourir et de souffrir, sur une chanteuse belle de nuit baignant dans une lumière crépusculaire…

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Cinéma, mon amour !'' de Driss Chouika : LE CINEMA NOVO UN MOMENT PHARE  DANS L'HISTOIRE DU CINEMA MONDIAL

« Les œuvres de Béla ont une démarche organique et contemplative plutôt que tronquée et contemporaine. Elles s'avèrent contempler la vie d'une manière qui est presque impossible à retrouver dans un film moderne ordinaire. Elles sont tellement plus proches des vrais rythmes de la vie qu'il nous semble assister à la naissance d'un nouveau cinéma. Béla Tarr est l'un des rares cinéastes réellement visionnaire ». Gus Van Sant.

UN CINÉASTE ORIGINAL, ATYPIQUE ET VISIONNAIRE

Né le 25 juillet 1955 à Pécs en Hongrie, il s’intéresse très jeune à l’Art du fait que ses parents travaillaient dans un théâtre avant de suivre des études à l’Ecole Supérieure de théâtre et de Cinéma de Budapest, Prix Caligari au Festival de Berlin et Prix de l’Age d’or pour “Tango de Satan“ en 1994 (le film le plus long dans l’histoire du cinéma : 450 minutes !), puis Grand Prix du Jury (Ours d’Argent) au Festival de Berlin pour son dernier film “Le cheval de Turin“, entre autres, Béla Tarr est l’un des cinéastes uniques et inimitables. Il incarne bien cette originalité atypique avec une filmographie riche en visions distinctes et en approches cinématographiques innovantes. À travers des œuvres telles que "Le Tango de Satan" et "Werckmeister Harmonies", Tarr a forgé sa propre voie artistique, défiant les conventions et définissant un style reconnaissable qui a laissé une empreinte indélébile dans le cinéma mondial.

Béla Tarr a commencé sa carrière au début des années 1980 avec des films inscrits dans la lignée du “réalisme socialiste“, mais c'est avec "Damnation" (1987) et "Le Tango de Satan" (1994) qu'il a attiré l'attention internationale. Sa filmographie, bien que relativement limitée en termes de nombre de films, est profonde en termes de complexité et de sophistication artistiques. Tarr n'a pas simplement réalisé des films ; il a créé des expériences cinématographiques immersives qui bousculent les attentes du public.

Les films de Tarr explorent souvent des thèmes universels tels que la nature humaine, la corruption, la quête spirituelle et la désillusion. "Le Tango de Satan", par exemple, attaché à la vie des habitants d'un village rural post-communiste, offre une méditation profonde sur la nature de la vie, de la communauté et du pouvoir. Tarr navigue souvent dans les eaux sombres de l'existence humaine, confrontant le public à des réalités parfois difficiles, mais toujours provocantes.

Tarr est également connu pour son approche minimaliste. Chaque geste, chaque mot a un poids significatif dans ses films. Rien n'est superflu. Cette économie de moyen ajoute à la force de ses récits, car chaque détail, chaque silence, est porteur de sens. C'est une danse délicate entre le minimalisme et la richesse thématique.

UNE ESTHÉTIQUE D’UN RÉALISME MAGIQUE

L'une des caractéristiques distinctives de l'esthétique de Tarr est sa propension à utiliser des plans-séquences exceptionnellement longs. Ses films sont souvent composés de prises de vues ininterrompues, créant une expérience immersive unique. Cela donne au spectateur le sentiment de vivre l'action en temps réel, tout en permettant à Tarr de raconter des histoires avec un rythme et une intensité peu conventionnelles. Son utilisation magistrale du noir et blanc est également un élément central de son esthétique. Les images monochromes de Tarr accentuent le réalisme sombre de ses histoires, créant une atmosphère poignante et intense. Chaque cadre devient une peinture cinématographique, capturant la complexité des émotions et des paysages humains.

Après ses premiers films, l'influence du réalisme magique, en tant qu’esthétique qui mêle le surnaturel au quotidien, est perceptible dans l'œuvre de Tarr. Ses films sont souvent empreints d'une atmosphère mystique, où des éléments surréels s'entremêlent avec la réalité brute. Cette fusion crée une expérience cinématographique envoûtante, élargissant les frontières du réalisme pour plonger dans l'imaginaire et l'inexpliqué.

La collaboration de Tarr avec son directeur de la photographie attitré, Fred Kelemen, a été essentielle pour la réalisation de son esthétique distinctive. Ensemble, ils ont développé une langue visuelle unique, explorant des contrastes dramatiques et des jeux de lumière subtils qui amplifient l'intensité émotionnelle de chaque scène. La musique de Mihály Vig, compositeur également attitré de Tarr, a également contribué à l'atmosphère singulière de ses films.

L'originalité de Béla Tarr a eu un impact significatif sur le cinéma mondial, influençant de nombreux cinéastes contemporains. Sa manière d'aborder le temps, l'espace et la narration a ouvert de nouvelles perspectives pour l'art cinématographique. Bien que ses films puissent être présentés comme exigeants, ils ont trouvé un public passionné et ont été célébrés dans de prestigieux festivals internationaux. La singularité de Béla Tarr le place aux côtés d'autres cinéastes atypiques tels que Andrei Tarkovski et Theo Angelopoulos. Comme ces maîtres du cinéma, Tarr a forgé son propre langage cinématographique, transcendant les conventions pour créer des œuvres qui résistent à la classification facile. Chacune d'elles a contribué à élargir les horizons du cinéma d'auteur, offrant des visions uniques et inoubliables.

En 2011, après avoir gagné l’Ours d’Argent pour son film “Le cheval de Turin“, Béla Tarr a annoncé sa retraite du cinéma, ajoutant une dimension particulière à sa légende. Cependant, sa contribution à l'art cinématographique reste vibrante et continue d'inspirer de nouveaux talents. L'héritage de Béla Tarr réside dans sa capacité à transcender les frontières cinématographiques. Son originalité atypique continue d'inspirer une génération de cinéastes qui cherchent à défier les conventions et à explorer de nouvelles voies narratives. Alors que Tarr s'est volontairement retiré du devant de la scène, son héritage se perpétue dans les salles obscures du monde entier, lui qui a été reconnu par Martin Scorsese comme « l'un des artistes les plus audacieux du cinéma » (Martin Scorsese).

FILMOGRAPHIE DE BELA TARR (LM)

« Le nid familial » (1979) ; « L’Outsider » (1981) ; « Macbeth » (1982) ; « Rapports préfabriqués » (1982) ; « Almanach d’automne » (1985) ; « Damnation » (1988) ; « Le Tango de Satan » (1994) ; « Les Harmonies Werckmeister » (2000) ; « L’Homme de Londres » (2007) ; « Le cheval de Turin » (2011).