La culture est ce par quoi les sociétés se définissent – Par Neïla Tazi

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« Nous revenons donc devant vous aujourd’hui avec une assurance et une conviction encore plus grandes, portés par la vision de notre Souverain, qui donne une impulsion forte à un secteur privé volontariste » (Neïla Tazi

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Le secteur des industries culturelles et créatives (ICC) a un effet multiplicateur, entraînant dans son sillage de nombreux autres métiers, a affirmé, mercredi à Rabat, la présidente de la Fédération des industries culturelles et créatives (FICC), Neïla Tazi. C’était à l’ouverture de la deuxième édition des Assises des industries culturelles et créatives. L’élan des premières assises qui ont acté en 2019 la fondation de la FICC, a été stoppé par la pandémie sans réussir à le briser. De retour avec cette deuxième édition, Neïla Tazi a fait dans son discours inaugurale le point de la situation et expliqué combien ce secteur, vital pour toute société, qui met « en synergie les artistes, les acteurs de l’économie numérique, les techniciens, les professionnels du tourisme et de l’artisanat, les médias, les commerçants et les métiers de services », a été résilient. Se fixant pour horizon la coupe de Monde, elle a esquissé les quatre Momentums que cette opportunité offre au Maroc et aux ICC. Discours :

C’est un immense honneur de prendre la parole devant vous aujourd’hui à l’occasion de ces secondes assises des industries culturelles et créatives, placées sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu l’Assiste.

heureuse de ces retrouvailles car, souvenez-vous, en octobre 2019 nous avions initié la première édition de ces assises avec une immense motivation, et avions conclu cette rencontre sur de solides recommandations, prometteuses pour le secteur tout entier.

Mais …seulement 4 mois plus tard, l’épidémie du covid s’est abattue sur le monde, et la dynamique que nous avions lancé s’est alors brutalement arrêtée, les acteurs du secteur se sont trouvés plongés dans une longue période d’inactivité, d’incertitude et de fragilité. 

Contre vents et épidémie

Cette crise, qui nous a tous contraints à l’isolement, mais nous a cependant rappelé que dans la solitude, nos plus fidèles compagnons restent les livres, la musique, la poésie, la télévision et le cinéma. Nous avons (re)pris conscience que la culture est un besoin essentiel pour le bien être émotionnel et mental en plus d’être un secteur économique d’avenir et un moteur d’innovation et de renouveau.

Oui de renouveau, car fort heureusement le secteur, avec le soutien de l’État, a surmonté la crise, il en est même sorti renforcé. La preuve par les chiffres : entre 2019 et 2023 au Maroc le nombre d’entreprises du secteur a augmenté de 33 % et le nombre de salariés déclarés de 20%. Ce sont là les chiffres de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS).

Une parité genre exemplaire

Cette évolution suit la dynamique mondiale, et comme l’a souligné le Président de la CGEM Chakib Alj,  le secteur des Industries Culturelles et Créatives (ICC) est le plus grand employeur de personnes âgées de 16 à 30 ans, avec 50 millions d'emplois. 

Je préciserai que 50% de ces emplois sont occupés par des femmes, ce qui en fait l'un des secteurs les plus inclusifs en matière de parité. 

Mieux encore, dans l’économie mondiale le secteur des Industries Créatives et Culturelles est le 5e secteur qui connait la plus forte croissance. Les ICC connaissent une croissance mondiale estimée à 8 % par an, ce qui est supérieur à celle de nombreux secteurs traditionnels. 

Ces indicateurs méritent une attention toute particulière, surtout à l’heure où dans notre pays, la place des jeunes et des femmes sur le marché du travail est une question prioritaire. 

Investir dans la culture profite à tous 

OUI, ces chiffres nous montrent que les ICC sont une réalité mais surtout une chance que nous devons saisir ! Car au-delà de la valorisation de la création, les ICC ont un effet multiplicateur, elles entraînent dans leur sillage de nombreux autres métiers, mettant en synergie les artistes, les acteurs de l’économie numérique, les techniciens, les professionnels du tourisme, de l’artisanat, les médias, les commerçants, les métiers de services et j’en passe…..

En 2019, Ahmed Chami est venu nous rappeler ici que le Conseil Economique Social et Environnemental, qui a beaucoup étudié le sujet, a recommandé entre autres la création d'une Cité des industries culturelles et créatives à travers le Partenariat Public Privé (PPP).

Car elles sont le moteur de nombreux processus de développement, elles renforcent le sentiment d’appartenance, elles créent du lien social et elles contribuent à créer des ponts entre les nations.

Enfin rappelons qu’au contact d’œuvres créatives inspirantes, beaucoup d’adolescents d’aujourd’hui façonneront les outils de leur autonomie de demain.

Donc qu’on se le dise : Investir dans la culture profite à tous !

Le nécessaire pacte public-privé

L’engagement dans le domaine de la création  est une vocation, un destin. L’artiste est souvent seul, il suit la pureté de son cœur, loin des convenances, il veut se tenir à distance des préoccupations administratives pour se consacrer pleinement à son œuvre. 

C’est un combat spirituel, discret mais intense, qui demeure souvent invisible aux yeux du monde.

Le promoteur culturel qui l’accompagne, lui aussi ressent souvent cette solitude car en quête permanente de financements, de fonds d’amorçage, d’attention, d’accès à l’information, d’autorisations administratives, de ressources humaines qualifiées, de promotion de nos productions à l’export.

D’où l’importance du pacte public-privé, basé sur de nouvelles approches pour consolider un écosystème solide, composé d’une chaîne de métiers et d’expertises. Il nous permet d’installer de la confiance, et de faire le chemin vers l’autre. 

Ces assises placées sous le Haut Patronage de SM le Roi, témoignent de la détermination de notre pays d’inscrire ces ICC, et au-delà le capital humain, dans une nouvelle  trajectoire, celle d’un modèle de développement économique inclusif et durable. 

Nous revenons donc devant vous aujourd’hui avec une assurance et une conviction encore plus grandes, portés par la vision de notre Souverain, qui donne une impulsion forte à un secteur privé volontariste, à un gouvernement engagé, à un parlement attentif, et à un Ministre de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication résolument investi. (…)

Une bonne et une mauvaise nouvelle

Les 1eres assises en 2019 nous ont permis de sortir avec des recommandations fortes, qui ont guidé notre action pendant ces cinq années. 

Pendant ces 5 années nous avons eu, rappelons-le, 4 ministres de la culture, mais nous avons maintenu notre cap et ouvert de nombreux chantiers, des chantiers qui s’accélèrent aujourd’hui. 

Au cours de ces 7 dernières années seulement 8 textes de loi ont été votés concernant le secteur….mais la bonne nouvelle est que 6 de ces textes ont été votés depuis 2021… comme je vous le disais les choses s’accélèrent.

Ainsi, fin 2024 la FICC présentera sa proposition sur le statut de l’entreprise culturelle  qui permettrait de cibler plus efficacement les actions et mesures prises pour accompagner ce secteur. 

Nous travaillons également sur une proposition de loi sur le mécénat car il s’agit là d’une tradition depuis longtemps ancrée dans notre pays, une tradition qui se perd au profit du sponsoring et que nous devons préserver pour encourager nos créateurs dans la phase de gestation de leur projet. 

Ces deux axes de travail qui illustrent la subtilité d’un secteur, et  combien il nécessite une approche spécifique et une concertation approfondie pour atteindre l’excellence.

La coupe du Monde, un véritable appel d’air 

Dans 6 ans, avec l’Espagne et le Portugal, notre pays accueillera des matchs de la Coupe du Monde de Football. Des millions de visiteurs  viendront à la rencontre du Maroc et des Marocains. Nos villes, nos territoires, nos populations, notre image et nos talents seront à l’affiche ; ils devront briller et l’enjeu est plus que jamais celui de l’audace, de la créativité car cette perspective suscite des ambitions, c’est un véritable appel d’air !

Saisissons ce Momentum pour bâtir  de nouvelles approches innovantes, qui mobilisent efficacement le potentiel des partenariats public-privé.

Saisissons ce Momentum pour favoriser les synergies, la collaboration et les échanges constructifs et inventer notre façon de faire à nous.

Saisissons ce Momentum pour faire preuve d’audace et d’une volonté commune sans relâche, car notre pays possède tous les atouts pour devenir une force motrice dans les ICC mondiales, avec une population jeune importante et en croissance rapide, avec des talents admirables dans toutes les filières, et de nombreux succès nationaux et internationaux dans le cinéma, la musique, la littérature, la photographie, la peinture et j’en passe, des succès qui nous rendent fiers et qu’il serait difficile d’énumérer ici. 

Enfin ce Momentum c’est aussi  l'intérêt grandissant pour les cultures arabes et africaines à l'échelle mondiale ; c’est aussi une diaspora attachée à son pays et à sa culture, et donc de grandes opportunités qui s’offrent à nous et à nos talents pour atteindre un public et un marché plus larges, et soutenir une production culturelle plus intense dans un Maroc qui a fait de sa diversité culturelle un principe constitutionnel, un fondement de cohésion sociale et un moteur d’ouverture sur le monde.

« La culture est une lumière qui éclaire le chemin de l’humanité »

En 2017 nous avons donné naissance à la Fédération des Industries culturelles et créatives au sein de la CGEM avec la volonté et le soutien de sa Présidente de l’époque Mme Miriem Bensalah Chaqroun, et nous avons renforcé notre plaidoyer sous les deux mandats de Monsieur Chakib Alj. 

Mon mandat à la présidence de cette fédération prendra fin dans quelques mois et c’est  un devoir et une joie pour moi de les remercier tous deux chaleureusement, et de remercier tous les membres du bureau de la fédération qui ont travaillé avec passion et sans relâche durant ces 7 années. 

Merci à tous nos membres et partenaires qui nous ont soutenu et qui continuerons de nourrir ce beau projet avec la prochaine équipe.

Merci à vous d’avoir répondu à notre invitation aujourd’hui et merci enfin aux intervenants du Maroc et de l’étranger venus partager avec nous leurs expériences respectives. 

Je sais que fort de tous les échanges que nous aurons durant ces deux jours, nous franchirons ensemble un pas de plus dans notre volonté de donner un nouvel élan au secteur de la culture. 

La culture est ce par quoi les sociétés se définissent et se souviennent d’elles -mêmes.  

Comme disait l’immense poète palestinien Mahmoud Darwich : 

« la culture est une lumière qui éclaire le chemin de l’humanité »

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