Mawazine 2024 : Au Chellah, sur l’ile Morphée avec Dafné Kritharas

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La chanteuse greco-française, fille de la mer, pieds nus pour ne perdre le contact avec la terre, a ravi son public pour un voyage au milieu d’une palette d’influences (Photo Quid)

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Par Jihane MOURCHID (MAP avec Quid)

J’ai perdu ma patrie et les êtres que j’aime, chante en grec Dafné Kritharas avec pour fond la vallée de Bouregreg qui se laisse entrevoir à travers l’arborescence et derrière les vestiges mérinides. Au détour de son récital, elle invite le publique à embarquer avec dans ce Chellah qu’elle transforme en navire voguant par un jour de houle clame sous le doux soleil méditerranéen avant de se poser sur le sable chaud, assez pour réchauffer le cœur sans brûler les pieds. Le public bon auditoire se prend au jeu pour se laisser emporter jusqu’à se retrouver sur une ile, Morphée, pour se livrer à une apaisante somnolence. Pour qui connait l’histoire, difficile de ne pas se retrouver en songe devant son père qu’elle perd en mer à l’âge de deux ans, alors qu’elle vivait avec sa famille dans un village crétois.

Plus tard, elle dira habiter en Colombier, là où habite les colombes. La rumeur portée par le vent des arbres l’accuse d’adultère à la veille de ses noces et, implacable, la pousse à se réfugier au haut d’une montage qu’elle prie de transformer son cœur en rocher dans lequel elle taillera un couteau pour égorger tout homme qui s’y aventurerait. Puis les oiseaux lui ont soufflé que l’histoire impossible était devenue possible et que le bonheur est au bout de cette chanson qui clôt son concert. Applaudissements. 

Pendant plus d’une heure la chanteuse greco-française, fille de la mer, pieds nus pour ne perdre le contact avec la terre, a ravi son public pour un voyage au milieu d’une palette d’influences. Rebetiko grec, musiques balkaniques et turques, flirtant avec les sonorités orientales,  chez elle la mythologie hellénistique n’est jamais loin. Dafné Kritharas, venue d’une ile grecque en transitant, contrainte par le décès de son père, par la banlieue parisienne, est une voix triste qui se refuse au chagrin en montant toujours plus haut dans la gamme des aigus, ou en sifflotant d’un air baladeur sur un ton amusé.

A un moment, par la mélancolie de sa voix et la nostalgie de ses chants, elle ne faisait plus qu’un avec ce lieu de mythes et de légendes. En interprétant avec passion une sélection distinctive de ses œuvres musicales, choisies avec soin parmi un répertoire riche et varié, incluant des titres tels que "Irme Kero Madre", très populaire sur YouTube, ainsi que d’autres morceaux comme "Le Colombier", une composition personnelle de Dafné Kritharas, elle a réussi son pari de charmer son public et de le faire rêver par ses interprétations, notamment "To Yasemi", en collaboration avec le talentueux guitariste Paul Barreyre, qui a non seulement brillé à la guitare, mais a également enrichi le concert en interprétant plusieurs chansons en français.

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