Si Dieu nous prête vie…d’Intissar Haddiya - Par Samir Belahsen

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Le roman met en lumière le vécu empreint d'amour, de douleurs mais aussi d'espoirs et d'aventures d'un groupe d'individus partageant la même séance de dialyse

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« Moi, j’aimerais ne plus être dialysé, ne plus porter cette tare, me libérer de cette machine. Je veux redevenir libre et autonome…les gens normaux ont tellement de chance. Ils ne le savent pas. Quel gâchis ! »

Intissar Haddiya

« La littérature est une maladie. Ou peut-être un remède à une maladie. »

Morgan Sportès / Solitudes

Dans la littérature, les rêves sont souvent utilisés pour illustrer la souffrance liée à la perte amoureuse.

Les rêves permettent aux auteurs de traduire l'intensité des sentiments amoureux, le contraste entre l'idéal et la réalité, et la douleur profonde causée par la rupture ou la perte de l'être aimé. Ils offrent un moyen d'explorer la psychologie des personnages face aux épreuves du cœur.

Dans le roman "Rêves d'amour perdu" d’Annie Goldmann, les rêves des personnages féminins sont utilisés pour explorer leur vécu émotionnel face à la perte de l'amour.  

Dans le mythe d'Orphée et Eurydice, le rêve d'un amour parfait est brutalement confronté à la perte définitive de l'être aimé.

Dans la poésie lyrique médiévale, les "rêves amoureux" des troubadours expriment à la fois le désir passionné et la souffrance de ne pouvoir atteindre l'amour idéal avec leur dame inaccessible.

Dans son roman "Si Dieu nous prête vie", Intissar Haddiya donne la parole à ces personnages qui expliquent leurs souffrances et expriment timidement leurs rêves. Ils rêvent de se libérer de la machine et de la maladie.

L’histoire

Le roman met en lumière le vécu empreint d'amour, de douleurs mais aussi d'espoirs et d'aventures d'un groupe d'individus partageant la même séance de dialyse.

(La dialyse est le traitement qui nettoie le sang et élimine l'excès de liquide du corps lorsque les reins ne sont plus en assez bonne santé pour effectuer ces tâches importantes.)

 Chérif est un jeune étudiant qui espère ardemment être transplanté et cherche désespérément un donneur de rein.

 Nadia, présente une condition psychologique particulière avec un désir obsessionnel de grossesse.

Ces personnages, bien que fictifs, sont inspirés de patients réels et représentent différents traits de personnalité fréquemment observés chez les patients dialysés, l’auteure étant médecin néphrologue. 

Le roman est un cri sans bruit qui dépeint les aspirations communes des patients dialysés à surmonter leur maladie chronique, à préserver leur qualité de vie et à saisir les joies simples malgré les épreuves. Chérif et Nadia partagent ce combat quotidien et cette volonté de ne pas se laisser abattre par leur condition.

La maladie dans la littérature 

La maladie est un sujet récurrent dans la littérature. Il est traité sous différents angles.

  • La présentation de la maladie et de ses symptômes, qu’on trouve notamment dans les œuvres de médecins-écrivains qui décrivent les affres de la profession et la relation médecin-patient. La littérature sert alors à recréer l'expérience de la maladie plutôt que de la nommer.
  • Certains auteurs comme Antonin Artaud, Fernando Pessoa ou Henri Michaux ont exploré les liens entre maladie mentale, folie et création littéraire. L'écriture leur permet alors d'inventer une nouvelle langue pour dire la douleur.
  • L'écriture est aussi un traitement de soi et un moyen d'exprimer sa souffrance. Les épidémies et pandémies vues par la Bible, Albert Camus, Gabriel García Márquez ou José Saramago, la maladie devient un écran de projection des hantises individuelles et collectives.
  • Les maladies spécifiques ont fait l’objet de plusieurs romans, la tuberculose dans le romantisme, la mélancolie de Rousseau à Kafka, l'épilepsie chez Dostoïevski, la folie ou plus récemment le cancer et le sida. La littérature transpose alors les dimensions historiques, sociales et personnelles de ces pathologies. « Si dieu nous prête vie… » s’attaque à la détresse des malades souffrant d’insuffisance rénale.  

La littérature offre un espace pour raconter la maladie et en faire un outil de création, d'expression de soi et de compréhension d’un monde malade.

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