Arabie : Un quadra remplace un septuagénaire à la tête de la diplomatie. Changement de génération ?

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L'Arabie saoudite a nommé un nouveau ministre des Affaires étrangères loyal au prince héritier et cultivant de bonnes relations avec les capitales occidentales, ce qui fait dire aux analystes occidentaux qu’il incarne un passage de témoin à une génération de jeunes responsables.

A 45 ans, le prince Fayçal ben Farhane, ancien conseiller du prince héritier Mohammed ben Salmane, surnommé MBS, et ancien ambassadeur en Allemagne, a remplacé Ibrahim al-Assaf (70 ans), qui a passé moins d'un an à ce poste. Farhane, ancien conseiller du prince héritier Mohammed ben Salmane, surnommé MBS, et ancien ambassadeur

Nommé en plein tollé international provoqué par le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, M. Assaf a été rétrogradé au poste de ministre d'État.

L'ancien ministre avait été chargé de réparer l'image du royaume lourdement entachée par l'assassinat début octobre 2018 par des agents saoudiens de M. Khashoggi au consulat de son pays à Istanbul.

Le nouveau ministre, nommé mercredi, doit continuer ce travail et gérer aussi les tensions avec le grand rival iranien.

Le prince Fayçal a "des liens très forts avec les alliés traditionnels de l'Arabie saoudite", relève Cinzia Bianco, analyste du Moyen-Orient au Conseil européen sur les relations extérieures, ajoutant qu'"il est dynamique et actif".

Les analystes soulignent aussi sa proximité avec MBS, l'homme fort du royaume, et avec son frère cadet, le prince Khaled, vice-ministre de la Défense et ancien ambassadeur à Washington.

"Cela fait partie d'un changement de génération qui crée une nouvelle classe de dirigeants en Arabie saoudite" et permet au prince héritier de "consolider son pouvoir sans avoir à compter sur la vieille garde", analyse Andreas Kreig du King's College de Londres.

"Les décisions de politique étrangère sont prises au sein du cabinet du prince héritier et les ministres sont des courroies et non de véritables décideurs", estime-t-il.

"Une nouvelle génération politique saoudienne est en train de naître", a tweeté pour sa part Aziz Alghashian, un expert en politique étrangère saoudienne à l'Université d'Essex.

Réparer les dommages 

Le prince Fayçal a aussi "une perspective européenne plus prononcée" que celle habituellement observée chez les dirigeants saoudiens très proches des Etats-Unis, selon Cinzia Bianco.

Un an après, le royaume continue de faire face aux conséquences de l'affaire Khashoggi, sa pire crise diplomatique depuis les attentats du 11 septembre 2001 dont les auteurs sont en majorité des ressortissants saoudiens.

"Le (ministre) sortant n'était pas vraiment un spécialiste de la politique étrangère. Le nouveau venu est très intelligent et très éloquent", relève James Dorsey, un expert du Moyen-Orient à la S. Rajaratnam School of International Studies à Singapour.

"MBS a besoin de quelqu'un d'éloquent. MBS a beaucoup de dommages à réparer et le nouveau ministre des Affaires étrangères a ce dont MBS a besoin", ajoute-t-il.

Le nouveau ministre aura également à gérer les tensions avec l'Iran, exacerbées par les attaques du 14 septembre contre les installations pétrolières saoudiennes qui ont temporairement réduit de moitié la production de pétrole saoudienne et fait grimper les prix.

Les rebelles yéménites Houthis, soutenus par l'Iran, ont revendiqué ces attaques mais les responsables américains ont blâmé Téhéran qui a nié toute implication et menacé d'une "guerre totale" en cas de représailles sur son territoire.

Plus tôt ce mois-ci, Téhéran a déclaré qu'un pétrolier battant pavillon iranien avait été touché par deux explosions au large des côtes saoudiennes.

Le roi Salmane a également remplacé le ministre du Transport Nabil Al-Amoudi par Saleh al-Jasser.

Ce changement fait suite à l'incendie qui a ravagé une gare du train à grande vitesse dans la ville de Jeddah (ouest) en septembre, blessant cinq personnes et d'un autre accident mortel la semaine dernière.

Cet accident, qui a vu un bus de pèlerins entrer en collision avec un engin de chantier a coûté la vie à 35 étrangers près de la ville sainte islamique de Médine.