Ethiopie: la prise de la capitale, ''une question de mois, si ce n'est de semaines'', selon des rebelles

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Des soldats éthiopiens faits prisonniers par les Tigréens, à Mekele le 2 juillet 2021 (Crédit photo AFP)

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La prise de la capitale éthiopienne Addis Abeba est "une question de mois, si ce n'est de semaines", a estimé mercredi un groupe rebelle de l'ethnie oromo, allié aux Tigréens du TPLF qui combattent des troupes progouvernementales dans le nord du pays.

Les rebelles du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) ont affirmé ce week-end avoir pris les villes de Dessie et Kombolcha, situées à un carrefour routier stratégique à 400 kilomètres au nord d'Addis Abeba.

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Carte d'Ethiopie localisant les régions du Tigré, de l'Afar et de l'Amhara, ainsi que les villages de Dessie et Kombolcha

Dans le même temps, l'Armée de libération oromo (OLA), groupe rebelle de l'ethnie oromo qui s'est allié au TPLF, a annoncé être entré dans plusieurs localités plus au sud, le long de l'autoroute menant à Addis Abeba. 

"Si les choses continuent dans la dynamique actuelle, alors (la prise d'Addis Abeba) est une question de mois, si ce n'est de semaines", a déclaré mercredi à l'AFP le porte-parole de l'OLA, Odaa Tarbii.

Cette déclaration fait écho à celles d'un porte-parole du TPLF, Getachew Reda, qui avait affirmé en juillet à l'AFP: "S'il faut marcher sur Addis pour protéger le Tigré, nous le ferons".

Les combattants de l'OLA et du TPLF se sont "déjà rejoints et sont en contact constant", a affirmé Odaa Tarbii, assurant que la chute du Premier ministre Abiy Ahmed est "courue d'avance".

Etat d'urgence 

Les communications sont coupées dans une grande partie du nord de l'Ethiopie et l'accès des journalistes est restreint, rendant difficile toute vérification indépendante des positions sur le terrain. 

S'il dément toute progression rebelle, le gouvernement a décrété mardi l'état d'urgence sur l'ensemble du territoire, tandis que les autorités d'Addis Abeba ont demandé aux habitants de s'organiser pour défendre la capitale.  

Abiy Ahmed a accusé l'alliance rebelle de transformer l'Éthiopie en Libye ou en Syrie. "Ils veulent détruire un pays, pas en construire un", a-t-il affirmé, appelant la population à l'unité face aux "terroristes".

Dans le cadre de l'état d'urgence, les autorités pourront enrôler "tout citoyen en âge de combattre et possédant une arme", ou suspendre des médias soupçonnés d'"apporter un soutien moral direct ou indirect" au TPLF, selon le média d'Etat Fana Broadcasting Corporate.

A Addis Abeba, des habitants inquiets affirmaient mercredi leur soutien au gouvernement. "Ce sont des ennemis de l'Éthiopie et ils doivent (être) écartés et pour cela, nous devons tous coopérer avec l'état d'urgence", estime ainsi Azmeraw Berhan, un travailleur indépendant.

Le porte-parole du TPLF Getachew Reda a qualifié ces mesures de "carte blanche pour emprisonner ou tuer des Tigréens". "Alors que le régime est au bord de l'effondrement, Abiy et ses lieutenants déchaînent un règne de terreur avec vengeance", a-t-il tweeté.

Débuté en novembre 2020, le conflit au Tigré connaît un spectaculaire revirement ces derniers mois. 

Abiy Ahmed, prix Nobel de la paix 2019, avait proclamé la victoire le 28 novembre, après avoir envoyé l'armée dans la région pour destituer les autorités dissidentes issues du TPLF qu'il accusait d'avoir attaqué des bases militaires fédérales.

Mais en juin, les combattants pro-TPLF ont repris l'essentiel de la région. Le gouvernement a alors retiré ses troupes et déclaré un cessez-le-feu unilatéral le 28 juin, mais les rebelles ont poursuivi leur offensive dans les régions voisines de l'Afar et de l'Amhara.

"Crimes contre l'humanité" 

La période du 3 novembre au 28 juin a été marquée par de nombreuses exactions dont "certaines peuvent constituer des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité", estiment le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme et la Commission éthiopienne des droits de l'homme dans une enquête conjointe rendue publique mercredi.

Ce rapport évoque notamment exécutions extra-judiciaires, torture, enlèvements, violences sexuelles -dont des viols collectifs menés sur des femmes et des hommes- et pillages. 

Abiy Ahmed a souligné que ce rapport n'établissait aucune preuve d'un génocide au Tigré, mais la Haut-commissaire aux droits de l'homme Michelle Bachelet a répondu que ces accusations nécessitaient une enquête plus approfondie. 

Les enquêteurs ont découvert un certain nombre "d'indices inquiétants de violences motivées par l'appartenance à un groupe ethnique", a-t-elle expliqué, mais les enquêteurs n'ont "pas de preuves suffisantes pour caractériser plus généralement l'étendue de la nature de ces crimes basés sur l'ethnicité".

Les douze mois de conflit ont également plongé le nord de l'Ethiopie dans une grave crise humanitaire avec plusieurs centaines de milliers de personnes au bord de la famine.