International
Les pays arabes tentent la mobilisation contre la déportation des Palestiniens
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Le président américain Donald Trump (D) rencontre le roi Abdallah II de Jordanie, visiblement mal à l’aise, dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC, le 11 février 2025. (Photo by SAUL LOEB / AFP)
Consciente de ne pouvoir seule faire le poids face au projet du président américain Donald Trump de déplacer les Palestiniens de Gaza vers l'Egypte et la Jordanie, le Caire a choisi de mobiliser le monde arabe qui pour une fois affiche son unité.
Avec le soutien de la Jordanie, de l'Arabie saoudite, des Emirats arabes unis et du Qatar, des alliés traditionnels des Etats-Unis, Le Caire a mené tambour battant des efforts diplomatiques pour empêcher un tel dessein qualifié de "ligne rouge" et de violation des droits des Palestiniens.
"L'Egypte ne peut pas le faire seule et a vraiment besoin du soutien des Arabes, en particulier des pays du Golfe, pour adopter une position arabe unifiée sur cette question des déplacements", déclar Michael Hanna, directeur du programme américain de l'International Crisis Group.
"L'Egypte manque de levier économique, mais le soutien du Golfe renforce son pouvoir de décision sur la scène internationale et face à Trump", ajoute-t-il.
Le Caire ulcéré
L'Egypte, historiquement médiatrice dans le conflit israélo-palestinien, a adopté la position la plus déterminée contre la proposition de Trump, ulcérée par la menace du président américain de lui couper l'aide des Etats-Unis si elle refusait, tout comme la Jordanie, d'accueillir sur son territoire les Palestiniens qui seraient chassés de Gaza.
Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a qualifié ce déplacement d'"injustice" à laquelle l'Egypte "ne peut pas participer", tandis que son ministre des Affaires étrangères Badr Abdelatty, a mobilisé le soutien régional.
Une déclaration ferme du ministère égyptien des Affaires étrangères cette semaine a également rejeté tout "compromis" qui pourrait porter atteinte au droit des 2,4 millions de Palestiniens de Gaza de rester sur ce territoire.
Dans le cadre de son offensive, l'Egypte a annoncé la tenue d'un sommet arabe extraordinaire au Caire à la fin du mois et déclaré qu'elle "présenterait une vision globale" pour la reconstruction de Gaza garantissant que les Palestiniens restent sur leur terre.
Le Caire a également obtenu un accord de principe pour la tenue d'une réunion ministérielle d'urgence de l'Organisation de la coopération islamique (OCI) après le sommet.
"Position arabe unifiée"
La Jordanie, qui accueille déjà 2,3 millions de réfugiés palestiniens, a été tout aussi ferme.
Après ses entretiens avec M. Trump à Washington mardi, le roi Abdallah II a réitéré la "position ferme de son pays contre le déplacement des Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie".
"C'est la position arabe unifiée", a-t-il écrit sur les réseaux sociaux après les discussions.
"Reconstruire Gaza sans déplacer les Palestiniens et s'attaquer à la situation humanitaire désastreuse devrait être la priorité pour tous", a-t-il ajouté.
L'Arabie saoudite, qui a participé à des pourparlers sous l'égide des États-Unis en vue d'une normalisation des relations avec Israël, a également adopté une ligne dure.
Le ministère des Affaires étrangères du royaume a réitéré l'engagement de Ryad en faveur d'un État palestinien et dénoncé toute tentative de "déraciner les Palestiniens".
Et le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane a clairement indiqué que tout accord de normalisation avec Israël dépendait de la création d'un État palestinien.
Les Émirats arabes unis, qui ont signé un accord de normalisation avec Israël en 2020, ont rejoint le camp des opposants au projet en rejetant tout "compromis" sur les "droits aliénables du peuple palestinien" et toute tentative de le déplacer.
Bahreïn, un autre pays du Golfe ayant normalisé ses relations avec Israël, a appelé à "l'établissement d'un État palestinien doté d'une pleine souveraineté d'une manière qui permette une coexistence pacifique avec Israël".
Un moment rare d'unité
Ce moment d'unité est inhabituel dans une région souvent divisée par des intérêts géopolitiques concurrents.
Le chef de l'Etat libanais Joseph Aoun, porté à la magistrature suprême avec l'aide des Etats-Unis, a également rejeté mercredi "les propositions qui conduiraient à tout type de déplacement des Palestiniens (...) ou à une atteinte à leurs droits légitimes".
Le président par intérim de la Syrie, Ahmad al-Chareh, qui a besoin de l'appui américain pour lever les sanctions frappant son pays depuis des années, a aussi qualifié le projet de Donald Trump de "crime très grave qui ne peut pas se produire".
Pour le politologue égyptien Ahmed Maher, le message du monde arabe était clair: tout déplacement forcé est exclu et la solution au conflit israélo-palestinien "est le modèle à deux Etats. Toute discussion hors de ces deux points est hors de propos" déclare-t-il. (AFP)