Le sentiment d?appartenance permet aux Marocains de r?soudre par le d?bat, toutes les questions, m?me celles qui, en apparence, divisent. En un peu moins d?un mois, le Maroc a perdu deux personnalit?s politiques de premier plan. Ahmed Zaidi et Abdellah Baha ont ?t? victimes d?accidents tragiques sur le m?me lieu, un hasard ? peine croyable. Les fun?railles des deux hommes ont ?t? imposantes, en pr?sence de dizaines de milliers de personnes, de tous bords politiques. Il est rarissime, dans d?autres d?mocraties, de voir une telle communion. Ce n?est pas uniquement une attitude protocolaire de biens?ance. Les dirigeants et les simples militants privil?gient l?aspect humaniste, qui veut que devant la mort, les divergences politiques s?estompent, pour ne laisser place qu?? la douleur partag?e. La stature des deux d?funts, leurs qualit?s humaines ont ?t? mises en avant par la foule. Il faut prendre la mesure de ce ph?nom?ne. Il refl?te une r?alit? sociale historique que nous avons tout int?r?t ? pr?server. Les Marocains ont un v?ritable d?sir de vivre ensemble, fondement m?me de l??tat-Nation. Il y a chez nous, un rejet absolu de la violence tr?s largement partag?. Lors du pr?tendu printemps arabe, les manifestants avaient le souci d??viter tout d?rapage, y compris verbal. Rappelons-nous le contr?le exerc? sur leurs propres slogans. Le mouvement n?a pas r?ussi ? mobiliser fortement, non pas parce que ses revendications n?int?ressaient pas les citoyens, mais parce que ceux-ci ?taient attach?s ? la qui?tude qu?offre la stabilit?. Le sentiment d?appartenance, tr?s fort, nous permet de r?soudre par le d?bat, toutes les questions, m?me celles qui en apparence divisent. Ainsi la question de l?Amazighit? est per?ue diff?remment qu?ailleurs. C?est un affluent de l?identit? plurielle marocaine et non pas une identit? ? part. M?me les plus virulents des militants se situent ? l?int?rieur de l?identit? marocaine, alors que dans d?autres pays, il y a des gouvernements amazighs en exil. Cette r?alit? est le produit de notre culture, mais aussi de notre histoire. Nous sommes un ?tat-Nation depuis des si?cles, c?est ce qui fonde notre attachement individuel et collectif au vivre ensemble, sur ce sol b?ni. Suite aux intemp?ries, des dizaines d?actions spontan?es ont eu lieu pour venir en aide aux victimes. Relire ce qui a ?t? ?crit sur les r?seaux sociaux est tr?s instructif. ? l?aspect humanitaire s?ajoute une dimension patriotique, un v?ritable d?sir de solidarit? nationale, un appel au d?veloppement r?gional. La gauche et les islamistes ont perdu deux dirigeants de grande valeur. Zaidi et Baha, durant toute leur carri?re, ils n??taient pas des personnages controvers?s, bien au contraire. Ils laissent, non seulement ? leurs camarades, mais ? l?ensemble de la classe politique un grand h?ritage. Les foules qui ont particip? ? leurs fun?railles sont porteuses de ce message : Non, il n?y a pas de rejet de la politique, mais seulement de certaines pratiques politiques. La comp?tence, la droiture, le patriotisme sont des valeurs salu?es par ces dizaines de milliers d?anonymes qui se sont d?plac?s pour pr?senter leurs condol?ances. Ils veulent ce que nous voulons tous, une classe politique au niveau de ses responsabilit?s historiques.