Politique
Sahara : Ce que Hassan II aurait voulu dire à son petit-fils
Lors d?une interview r?alis?e par Jeune Afrique en 1985, le journaliste demande ? feu le roi Hassan II comment s?y prendrait-il si il devait raconter l?histoire du Sahara ? son petit-fils. Voici la r?ponse de Hassan II.
??Une question difficile, ne serait-ce que parce que je n?ai pas encore de petit-fils. En v?rit?, l?affaire du Sahara ?tait d?une limpidit? telle que, pour l?adversaire, il s?agissait de miner le chemin marocain de contre-v?rit?s et de d?sinformation. Or, de nos jours, l?opinion publique, avec le matraquage constant de l?audiovisuel ou de la presse ?crite, est plus sensible ? ce qui n?est pas clair qu?? ce qui l?est. Alors, je vais essayer d??tre le plus clair et le plus concis possible.
Le Maroc, de tout temps, n?a jamais r?clam? que ce qui lui appartient.?Ainsi Tindouf, par exemple, faisait partie int?grante du territoire marocain jusqu?au d?but des ann?es cinquante, puisque, lors des c?r?monies de l?A?d El-K?bir et de l?A?d Seghir, le pacha de cette ville ? je l?ai vu de mes propres yeux ? venait faire all?geance devant mon p?re.
Mais, lorsque nous sommes partis en exil, le 20 ao?t 1953, Tindouf, entre autres, nous a ?t? enlev?e pour ?tre rattach?e ? l?Alg?rie. C?est que la France pensait que l?Alg?rie ne serait jamais ind?pendante. Apr?s notre retour d?exil, l?ambassadeur de France au Maroc, M. Alexandre Parodi, est venu demander ? mon p?re en substance :?? Le g?n?ral de Gaulle vous propose de constituer une commission pour discuter des fronti?res marocaines. ?
Mon p?re a r?pondu : ? Il n?en est pas question. Je suis s?r, ajouta-t- il, que lorsque l?Alg?rie sera ind?pendante ses dirigeants nous rendront justice et accepteront d?en discuter avec nous. ?
Les choses se sont pass?es autrement : non seulement nos voisins et fr?res alg?riens n?ont rien fait pour discuter des fronti?res orientales, mais, ? la premi?re occasion, ils ont essay? d?emp?cher le Maroc de r?cup?rer son Sahara.
Si je parlais ? mon petit-fils, je lui dirais tout simplement que ce Sahara a toujours ?t? li? au Maroc par les liens de l?all?geance et que, chez nous, souverainet? et all?geance (be?a) sont une seule et m?me chose. Sans remonter au d?luge, Moulay Hassan, mon arri?re-grand- p?re, est all? jusqu?? Oued Noun. Il n?a pas continu? plus au sud, mais il y a envoy? son chambellan porter les traitements mensuels aux hauts fonctionnaires de la r?gion.
Moulay Abdelaziz a charg? le m?me chambellan, qui a chevauch? les deux r?gnes et vivait au palais jusqu?apr?s la mort de mon p?re, de cette mission. En v?rit?, le drame du Maroc, c?est d?avoir eu affaire ? deux colonisateurs : les Espagnols et les Fran?ais. Si nous avions eu la chance de n?en avoir qu?un seul, nous aurions sold? de tout compte notre affaire du nord au sud.
Malheureusement, il nous a fallu n?gocier le remembrement du Maroc morceau par morceau. Apr?s la r?trocession par l?Espagne de Tarfaya [10 avril 1958] puis de Sidi Ifni [30 juin 1969], il ne restait que le gros morceau du Sahara.
Nous avons introduit la question aux Nations unies au lendemain de notre ind?pendance.?A l??poque, il n?y avait ni Alg?rie ni Mauritanie, et c?est plus tard que la notion de ? partie concern?e ? ou ? int?ress?e ? est apparue.
Le r?sultat est que ce qui ?tait clair, limpide, ce qui aurait d? ?tre r?gl? bilat?ralement, comme le reste, entre le Maroc et l?Espagne est devenu comme d?un coup de baguette magique, je dirais mal?fique, un sujet dont on fait un cas d?expansionnisme, de massacre, de g?nocide.??