Cécité à Strasbourg et aveuglement à Paris - Par Seddik MAANINOU

5437685854_d630fceaff_b-

La sagesse des trois singes, ce n’est pas nécessairement le meilleur moyen de résoudre les problèmes

1
Partager :

 

Décisions douloureuses – Par Seddik Maâninou

Brusquement, la machine médiatique française s’est emballée dans une cabale systématique contre le Royaume du Maroc. On a ameuté des «spécialistes» de la question marocaine pour déverser des accusations transpirant les relents d’une pensée coloniale qui enfièvre des décideurs politiques. On fait feu de tout bois, on réactive les cellules dormantes, on sort en meute. L’attaque pouvait commencer !

L’argent rancunier

Le magazine de droite Marianne a publié à sa Une «Comment le Maroc nous tient», un dossier qu’il a serti de sous-titres où s’entrechoquent dans le désordre espionnage et lobbying, cannabis et immigration et bien d’autres joyeusetés de la même facture. Excusez du peu, mais le Maroc se résumerait à ce maelstrom de dérives, selon les autoproclamés experts français. Sauf que ce dossier comporte bien plus qu’un lapsus révélateur : un article fleuve sur le Sahara marocain, tendant le micro à des stipendiés qui ont vendu leur âme à l’étranger pour attenter au Maroc et à son intégrité territoriale. Moyens et fin de cette campagne médiatique. 

Derrière la belle Marianne, se dissimule mal, très mal, un hideux capital français à la fois rancunier et prédateur qui s’accommode très peu de l’indépendance de la décision marocaine, du positionnement africain du Royaume, de la concurrence qu’il livrerait aux intérêts français, voulus exclusifs, et de sa résolution à tisser des relations avec des pays plus puissants et moins déloyaux que la France.  

Libre à ce capital français d’avoir choisi la vieille ficelle usée à force d’abus, de faire pression sur le Maroc via sa machinerie médiatique usuel. Il a seulement oublié au passage un adage bien arabe : «la caravane passe… » 

«Mille et un lobbies» 

Mais comme une seule main ne saurait applaudir, des députés français ont été mêlés, tambours battants, à l’orchestration dans une intense campagne contre le Maroc au sein du Parlement européen, faisant semblant de découvrir ce qu’ils savent et ce à quoi ils participent au quotidien : le nid de corruption sans scrupules qu’est leur parlement. 

Tout au long de son existence, le Parlement européen, mais pas que lui, nous a livré nombre d’entre eux pris la main dans le sac, impliqués dans des affaires allant du détournement de fonds aux emplois fictifs d’épouses et de proches. D’autres voyageant aux frais de la princesse, pour le compte des puissants lobbies qui contrôlent les centres de décision au parlement de Strasbourg où les ‘’enveloppes’’ sont monnaie courante et les relations intimes, confondant dans les alcôves strasbourgeoises genres et espèces sonnantes et trébuchantes, sont érigées en mode de fonctionnement. 

Serait-ce trahir un secret de dire que le Parlement européen flirte et concubine avec plus d’un millier de lobbies, ces groupes de pression qui défendent leurs intérêts ou les intérêts de leurs commanditaires ? Existerait-il un seul député européen qui ignore la forte présence de ces lobbies et leurs pratiques diamétralement aux antipodes de l’éthique, de la déontologie et des principes de la démocratie ? Sans doute pas. Mais au parlement européen règne la sagesse des singes : se couvrir les yeux, fermer sa bouche, se boucher les oreilles. Et se servir avant de servir.

Cataracte

On le voit, La France est aux commandes d’une campagne systématique contre le Maroc. Il n’est un secret pour personne que l’Elysée en est, en partie, l’instigateur et en connaît les développements dont il est certainement content. 

Le président Emmanuel Macron a choisi de s’aligner sur la junte d’Alger, sans grand succès jusqu’à maintenant, faisant fi du sort de centaines de militants qui croupissent dans les geôles algériennes, de la fermeture de plusieurs médias et de la phobie que vit le pays contaminant dans son entourage la Tunisie voisine. Les droits de l’homme à géométrie variable on connait.

Les yeux embués par le ‘’travail sur la mémoire commune’’, ou par des choses plus conséquentes, Macron a révélé une telle incapacité de discernement qu’il devient urgent pour ses amis et ses conseillers de le débarrasser de sa «cataracte politique». Car pour l’instant ce qu’il a réussi se limite, en France, à faire de la moitié des Français des électeurs de l’extrême droite raciste, et dans le reste du monde, particulièrement en Afrique, à rabaisser la France. 

D’où cette question incontournable : le peuple héritier de la philosophie des Lumières et des droits de l’homme se serait-il définitivement converti à l’extrémiste et au racisme, et ses lumières ne lui permettent-elles plus de voir clair dans le monde qui l’entoure ? 

Les médias français peuvent tranquillement poursuivre leur cabale et les racistes au pouvoir peuvent écrire et ameuter à loisir les vénaux à la solde. Il est toutefois regrettable que la France tombe aussi bas. Sur le continent, on appelle qu’à son départ. En Afrique du Nord, elle ne récolte que grogne et rejet, alors que dans le monde arabe elle enchaîne mépris et dédain. En un mot comme en mille, Macron a réussi à faire de la France l’ennemi juré des peuples épris de liberté et avides de lendemains meilleurs. Exploit pathétique !

Une manœuvre ratée

Le 27 février dernier, Macron a tenu une «conférence» à l’Elysée pour présenter la nouvelle vision des relations de la France avec l’Afrique. Au détour, il a évoqué le Maroc et reconnu des «problèmes», tout en s’empressant d’assurer que ses relations avec le Roi du Maroc étaient «amicales et le demeureront».

Mais outre le démenti quasi public, les faits sont têtus. C’est (peut-être) la première fois que la France se retrouve sans ambassadeur marocain et sans ambassadeur algérien. Il est toutefois vrai que sur ce terrain, l’Algérie la dépasse de la tête et des épaules : elle n’a d’ambassadeur ni à Paris, ni à Madrid, ni à Rabat.

Macron a éludé les vrais problèmes. Tout comme sa ministre des AE Catherine Colonna qui, en visite le 15 décembre dernier, n’a pas trouvé mieux que d’ergoter sur les visas, M. Macron feint ignorer la campagne médiatique hostile de son pays contre le Maroc et le lot des tracasseries administratives, diplomatiques et judiciaires. Pourtant, tout le monde le sait, l’essentiel se trouve ailleurs : la question du Sahara marocain. C’est le point nodal et le sujet incontournable. Le reste n’est que détails. Macron doit choisir sans ambiguïté aucune : être ou ne pas être un ami. Sans cette clarté nécessaire, toute la rhétorique mielleuse n’est qu’une vaine manœuvre, comme l’a si bien illustré sa récente tournée africaine qui, faute de regagner la confiance des Africains, s’est terminée en queue de poisson.