Conseil national du PJD : Une déclaration finale sans rapport avec la réalité des débats

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La première des surprises est que la déclaration finale ne reflète en rien les débats qui ont ponctué les deux jours de la réunion du Conseil national.

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Nombreux ceux qui guettaient la tenue du Conseil national extraordinaire du PJD, tant il n’est pas courant d’assister à une succession de démissions de poids lourds contestant la gestion politique de la direction du parti, tout comme il n’est pas fréquent de convoquer dans ce sillage un Conseil national pour débattre de ces violentes secousses. 

Il était donc dans l’ordre des choses d’attendre les résultats éventuels de cette réunion, surtout que la culture politique et organisationnelle de ce parti soumet le traitement des convulsions qui s’en emparent aux mécanismes de ses propres institutions internes bien plus qu’il ne les appréhende en fonction des réactions et attentes externes.

La première des surprises est que la déclaration finale ne reflète en rien les débats qui ont ponctué les deux jours de la réunion du Conseil national.

Certes, le Conseil national a refusé, avec force et à une forte majorité, la démission de Driss El Azami de la présidence de cet organe, ce qui signifie nécessairement que cette écrasante majorité de convient de la justesse et de la pertinence des raisons ayant présidé à cette démission. Bien mieux, la tendance générale du débat partagent totalement ces raisons. Peu aussi ont contesté que le gel par Abdellah Benkirane de son adhésion au parti constituait une crise majeure. Loin d’être une posture personnelle ou le produit d’état d’âme, la décision de l’ancien chef de fil du PJD est le reflet d’une désapprobation générale de la gestion politique de la direction, en raison de ses positions antinomiques avec les fondamentaux du parti, et une dénonciation de l’absence de clarté politique.

Le modus cogitandi du PJD

Beaucoup ont mal compris le communiqué final et certains en ont tiré précipitamment des conclusions pour considérer qu’en définitive le PJD ne diffère en rien des autres partis qui ont eu à traverser semblables crise et que finalement le conseil national a abondé dans le sens de la direction. Ce faisant, ils ignorent, ou n’en tiennent pas compte, que la déclaration finale est sans rapports les débats houleux qui l’ont marqué.  Des considérations particulières dont il faudrait tenir compte pour comprendre l’arrière-cour du PJD, expliquent ce décalage.

La première est que le PJD est un parti conservateur au sens sociologique du terme. De ce fait, il est réfractaire à la rupture et au changement radical et développe une forte allergie à toute velléité de division, en même temps qu’il se distingue par un dynamisme critique de haute facture qui le rend difficile aux pronostics sur son avenir et à l’appréhension des scénarii possibles de son évolution future.

La deuxième tient au fait que la raison d’être de cette formation, outre ses enjeux, est liée à la participation aux institutions. La direction transcende la portée politique de la participation. Elle appréhende celle-ci à travers la couverture dont elle fait bénéficier l’ensemble des activités culturelles, cultuelle et socio-éducatives confiée l’aile en charge de la prédication, en l’occurrence le MUR. Le parti considère que toute décision est de nature à se répercuter positivement ou négativement, suivant le caractère, sur l’activité de cette aile. 

La troisième considération est intrinsèque à la culture interne qui rejette les mesures organisationnelles aux relents putschistes, comme le recours à des alternatives susceptibles de délégitimer la direction. Tout en consacrant le droit à ce type d’attitudes dans son règlement intérieur, le parti reste sensiblement allergique à leur mise en œuvre par crainte de leur impact sur sa cohésion interne.

La quatrième se rapporte à la perception qu’a le parti de sa responsabilité dans la stabilité politique et de son rôle de partenaire de l’institution monarchique. Sa culture dans ce sens est traditionnaliste et s’éloigne de toute décision à même d’introduire la suspicion dans les rapports entre les institutions.

La cinquième concerne l’opération électorale. Les mutations sociologiques qu’il a connues conséquemment à son intégration dans les institutions, particulièrement à la faveur des députations, ont transformé le PJD en un parti électoraliste et il lui est devenu ainsi difficile de prendre une décision qui le placerait en dehors du circuit de la compétition politique, quand bien même les lois électorales amoindriraient ses chances ou sont préalablement élaborées pour l’évincer.

La sixième considération porte sur les effets du facteur-temps. Il est revenu à plusieurs reprises dans les interventions des dirigeants qui ont fait valoir qu’il ne restait que de six mois du mandat en cours, laissant entendre ainsi que c’est le congrès ordinaire du parti qui sera l’espace de la reddition des comptes de l’évaluation du parcours et du sort à réserver à la direction actuelle, la changer ou la maintenir.  

Ces six considérations montrent que la lecture selon laquelle la tenue du Conseil national serait décisive pour trancher entre deux options ou deux directions est une perception qui ne comprend pas le PJD, sa nature et son fonctionnement. Et même si les déclarations de certains dirigeants ont contribué à cette perception erronée en présentant les conclusions des conseils nationaux comme le triomphe des institutions sur le leadership de l’individu, le débat interne au sein de l’actuel Conseil national comme lors du précédent, laisse croire que le scénario le plus probable est que le prochain congrès ordinaire marquera un changement radical de la direction du PJD. 

 

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