Politique
Que personne ne commente Benkirane.
Que personne ne commente Benkirane !
Que personne ne commente Benkirane ! Cette apostrophe, touchante, de Saad Dine El Otmani, chef du gouvernement, après le gel volontaire de l’appartenance de Abdalilah Benkirane au PJD a tout d’un signe de panique « organisationnelle » — pour parler comme Bilal Talidi — tellement Benkirane par ses coups de menton affole les compteurs, à l’intérieur et à l’extérieur, du PJD.
On ne va pas se gêner, nous, on va commenter Benkirane ! Première remarque, sur la forme, la lettre manuscrite du Zaim ressemble plutôt à un matériel de mauvais sort, un gri-gri, produit par un marabout africain inspiré. Une sorte de Hijab pour jeter un sort sur un gouvernement qui n’est pas très sensible aux alertes sanguines de notre «Moktada Sadr» national. Vous avez choisi la légalisation du Haschisch contre mon avis que Dieu assèche vos pensées, stérilise vos actions casse les chaises usurpées sur lesquelles vous êtes assis et allège à jamais les portefeuilles que vous portez indument.
Deuxième remarque. Retraité, semi-actif, ou actif, , limousine de non-fonction, indemnité confortable, sécurité mobile et statique, Abdalilah Benkirane est une carte incontournable dans la pjdie et ses satellites. Celui qui dit le contraire se trompe. Le problème est comment le gérer avec des procédures internes, concrètes et légitimes, et non avec des sautes d’humeur, des consignes de silence ou des rodomontades. Il n’y a pas d’espace moyen entre le paradis et l’enfer, surtout pour un islamiste. Soit Abdalilah Benkirane est in ou out !
Troisième remarque ; Seules les couleuvres avalées par Abdalilah Benkirane lors de ses 2 mandats sont légitimes, acceptables et dénotent d’un haut sens de l’Etat. Celles, les couleuvres, de Saad Eddine El Othmani sont entachées de compromissions, de trahison à la vulgate, de déviances de la ligne des frères et de péché impardonnable. En plus semble dire Abdalilah Benkirane que son successeur n’a pas l’estomac pour ça, ni le même système métabolique. Sur le plan organisationnel, s’entend !
Quatrième remarque. L’original, Abdalilah Benkirane, va vous embêter pendant longtemps, chers frères et sœurs, alors ne vous contentez pas d’une pâle copie qu’est Saad Dine El Otmani ! Pas de français à l’école, pas de hachich dans les industries médicales etc. Il faut que ça passe par moi, le validateur suprême ! Avec un discours au coin du feu, chez moi, j’ai tordu le cou aux adversaires de la normalisation avec Israël au nom des intérêts supérieurs du pays. Avec quelques mots bien choisis, deux froncements de sourcils, quelques tremolos dans la voix et le tour est joué. De là à légaliser la fumette sans moi, il y a un pas, toujours organisationnel, à ne pas franchir. Soit les compromis passent par moi, et je récupère les miles qui vont avec sur ma carte Platinum ou je sabote tout. C’est clair comme dirait l’autre !
Le problème fondamental du PJD est simple. Ce parti n’a pas trouvé un leadership de substitution crédible à son leader charismatique. La deuxième question insoluble réside en la faiblesse structurelle des élites du PJD. On peut difficilement transformer des foules enthousiastes en cadres efficaces, élus responsables, en technocrates compétents, en ministres convainquant etc. La machine à écrémer les élites est en panne dans tout le pays y compris au PJD. Les structures partisanes n’attirent désormais, dans la plupart des cas, que des opportunistes aux dents longues.
Le deuxième problème fondamental de ce parti est la nature de son programme. En catimini, il dit que la solution c’est l’Islam, et en public, il montre un attachement douteux à une transition démocratique qu’il veut absolument instrumentaliser pour probablement s’en défaire. C’est le paradoxe de l’islamisme gouvernemental qui a mis un certain nombre de pays dans la région à terre et qui ne prospère pas au Maroc grâce justement aux effets stabilisateurs de la monarchie et des institutions qui l’incarnent au jour le jour.
Le troisième problème du PJD est à l’évidence organisationnel. Une fausse horizontalité cachant une verticalité intraitable. Le Congrès, le Conseil national, le secrétariat général, le MUR etc. Ce sont là des matriochkas qui s’emboitent pour la consommation externe. La réalité est plus complexe est moins glorieuse sur le plan démocratique. Le fonctionnement en mode zaouïa prédomine. Le mouride suit le maître en silence, et dans la prière, jusqu’au jour où les portes du paradis s’entrebâillent. Mais avant, que de services, que de douleurs, que d’humiliations et que de soumission. Le chemin est dur et pavé de mauvaises intentions malgré la ferveur. Nous sommes loin d’un parti politique où la carrière est linéaire, le programme clair, la démocratie interne limpide et la chance d’accéder à une responsabilité est garantie à tous.
Cette béance organisationnelle permet à un retraité semi-actif comme Abdalilah Benkirane de faire la pluie et le beau temps sur le parti sans qu’il y ait des outils, à la légitimité indiscutable, pour le contrer. La rationalité n’ayant pas sa place dans les esprits, c’est la pensée magique qui prend le devant. Elle supplante tout.
Maintenant le pays doit-il souffrir des difficultés que rencontre le PJD, avec la faiblesse de ses élites, à assimiler la syntaxe gouvernementale et à comprendre véritablement ses responsabilités constitutionnelles à l’égard de la monarchie. La réponse est naturellement non. Aucune institution dans le pays ne doit faire perdre du temps au pays en attendant sa mise à niveau ou la fin de son apprentissage. Comme dirait l’autre, au Maroc, aujourd’hui, il y a un vrai désir d’alternance — les gens sont fatigués de 2 mandats d’approximations hasardeuses des islamistes au pouvoir — mais les conditions politiques ou électorales ne semblent pas encore toutes réunies. Pour le moment.