Santé
La Chine face à sa plus grave poussée de Covid-19 depuis le début de la pandémie – Par Abdelghani Aouifia
Les personnes quittant ou entrant Shanghai doivent être munies d’un test PCR négatif. Selon le bureau d’information de la ville, à l’origine de cette nouvelle vague se trouve un centre de quarantaine de personnes arrivant de l’étranger.
Par Abdelghani AOUIFIA (Correspondant permanent de MAP à Pékin)
Beijing - Au sein du luxueux complexe résidentiel de Chao Qu, au quartier financier de Guomao à Beijing, la matinée n’était pas comme les autres en cette journée dominicale brumeuse et froide. Les résidents sont appelés d’urgence pour effectuer des tests PCR imprévus.
Les files d’attente étaient longues devant des chapiteaux mis en place à la hâte dans ce vaste compound élu domicile par une grande communauté étrangère.
Pour George, un résident américain du complexe depuis quatre ans, les scènes rappellent à l’esprit de mauvais souvenirs. Ceux de l’angoisse qui s’était emparée des gens suite à l’éruption de la pandémie dans la ville de Wuhan il y a un peu plus de deux ans.
A Beijing, la situation semble plus sereine par rapport à d’autres régions où les cas d’infection se sont multipliés depuis le début du mois en cours.
L’envolée des contaminations semble être la plus grave poussée de Covid-19 dans le pays depuis le premier cas détecté. Une flambée qui a poussé les autorités à fermer un certain nombre de villes, dont Shenzhen, le hub technologique du pays, et des parties de Shanghai, la capitale financière.
Les nouvelles restrictions, outre l’ampleur de la nouvelle envolée, illustrent l’atmosphère de peur qui s’est installée parmi les autorités provinciales et municipales d’un pays qui s’enorgueillit tant de l’efficacité de son approche « tolérance zéro » qui lui a permis de ralentir le virus au summum de son avancée au début de 2020.
Des dizaines de compagnies dont des géants internationaux basés à Shenzhen ont cessé leur production suite aux restrictions imposées par les autorités.
A Shanghai, ce vaste hub financier mondial réputé pour sa politique rigoureuse qui a permis de contenir la pandémie tout en garantissant la fluidité de l’activité économique, les autorités ont recensé près de 1.000 infections depuis le début du mois. Dimanche, environ 170 cas ont été détectés dans la métropole.
Suite à la hausse des contaminations, la ville a suspendu une grande partie de son service de transport public et conseillé aux résidents d’éviter les déplacements non essentiels. Les personnes quittant ou entrant Shanghai doivent être munies d’un test PCR négatif.
Selon le bureau d’information de la ville, à l’origine de cette nouvelle vague se trouve un centre de quarantaine de personnes arrivant de l’étranger.
Pour ne rien laisser au hasard, les autorités ont lancé de vastes opérations de dépistage, une situation qui a accentué les pressions sur les centres hospitaliers de cette ville de 24 millions d’habitants.
Sur le plan national, la Chine a enregistré lundi 3.505 nouvelles infections au Covid-19, un chiffre qui porte à 120,407 le nombre total des cas confirmés dans le pays.
Les cas comptabilisés jusqu’à présent demeurent certes inférieurs aux autres pays du monde surtout ceux de la région de l’Asie Orientale où les infections battent les records. Mais les autorités ne montrent aucun signe de fléchissement pour contenir la situation et éviter son aggravation.
Les nouvelles contaminations ont poussé la Chine à se poser des questions au sujet de l’efficacité de son approche dite « tolérance zéro ». L’implication des gouvernements locaux et des municipalités dans la lutte contre la pandémie est également remise en question.
A Jilin, au nord-est du pays où 3.076 cas d’infection ont été recensés lundi, les autorités s’empressent pour construire de nouveaux hôpitaux et des installations de quarantaine.
Autant de scènes qui ravivent les inquiétudes d’un retour du virus malin dans ce vaste pays de plus de 1,4 milliards d’habitants.
Les restrictions imposées dans les zones industrielles d’un pays qui occupe une place centrale dans la chaine d’approvisionnement internationale aura certainement un impact visible sur l’activité économique mondiale, estiment les analystes, citant notamment les secteurs de la technologie de pointe et les technologies de l’information.
La nouvelle envolée des contaminations représente un sérieux test à la politique dite de « zéro tolérance » grâce à laquelle la Chine a réussi à endiguer la pandémie dès le printemps 2020.
A la faveur de cette politique qui implique des mesures de confinement très strictes frappant des villes entières, le pays est parvenu à contenir la contagion, avec un bilan officiel d’un peu plus de 100.000 cas, dont 4.636 mortels, en l’espace de deux ans.
Les observateurs estiment que l’aggravation de la situation pandémique en Chine risque de compliquer la tâche du gouvernement à réaliser le taux de croissance économique de 5,5 pc fixé dans un rapport de l’exécutif soumis à l’organe législatif suprême du pays, réuni récemment à Beijing.
Conscients de cette situation, les hauts responsables chinois ont multiplié les sorties ces derniers jours pour envoyer des messages d’apaisement, soulignant que tout sera mis en œuvre pour renforcer la stabilité du cadre économique dans le but de réaliser une croissance soutenue.
« L’économie fait face à de nouvelles pressions et davantage de difficultés et de défis », a indiqué le Premier ministre Li Keqiang, appelant à suivre de près la situation pandémique en vue d’apporter les réponses idoines et garantir la stabilité de la croissance, de l’emploi et des prix.
Au moment où le monde se heurtait à une situation extrêmement difficile en raison de la pandémie, la Chine a réalisé un taux de croissance de 8,1 pc en 2021. Une réussite que le gouvernement a attribué en grande partie à l’efficacité de sa stratégie de lutte anti-Covid19.
La nouvelle vague qui torpille plusieurs régions du pays est venue mettre Beijing devant un nouveau test sérieux de sa résilience et surtout de sa capacité à naviguer dans l’adversité.