Fatima, la plus jeune fille du prophète, expliquée à Marek Halter

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couv-marek-halter La vie de Fatima, ??m?re de son p?re??, n?a commenc? r?ellement que quand elle ne le fut plus. Marek Halter continue avec une conviction et une pers?v?rance admirables son projet de romans sur les femmes de l?Islam, et l?environnement f?minin du proph?te. Apr?s Khadija, la premi?re ?pouse, il nous offre une vie ??imagin?e?? de Fatima, sa plus jeune fille. Le roman, le romanesque et l?imagination cr?atrice ont certes leur droit, le commerce aussi. Non que je mette en doute la sinc?rit? de l?auteur ? vouloir rapprocher les religions monoth?istes et ? apaiser les conflits meurtriers. Son coup de gueule ??R?conciliez-vous?? r?sonne comme un coup de tonnerre dans un oc?an de haine. Cependant, cette entreprise du ??F?minin religieux?? dans les trois monoth?ismes s?apparente plus ? une exploitation commerciale d?une th?matique s?duisante qu?? de l?invention esth?tique et romanesque. Parce que malheureusement de l?esth?tique romanesque, il n?y en a point. J?ai longtemps h?sit? ? ?crire ? propos de ce nouveau roman. Les cinq chroniques consacr?es au premier roman ??Khadija?? suffiraient ? d?construire le second?: nous y avons affaire aux m?mes ingr?dients, aux m?mes leviers de fabrication aux m?mes d?fauts et erreurs de perception des situations et des personnages. Marek Halter fait de Fatima une guerri?re, ce qu?elle ne fut jamais et ne pouvait ?tre ni devenir (la page de garde pr?sente d?ailleurs une cavali?re amazone intr?pide, arm?e, s??lan?ant vers une caravane qu?elle d?fend ou attaque, on ne sait). Si Fatima accompagnait son p?re et le prot?geait au point qu?on l?appelait ??la m?re de son p?re??, malgr? son jeune ?ge, ce n?est point pour le prot?ger???militairement?? mais ??affectueusement??. A la question?:???Comment arrivez-vous ? jongler entre la v?rit? de l?histoire et l??criture romanesque????, l?auteur r?pond?: ??il faut bien conna?tre l?histoire des personnages et savoir reconstituer l?environnement??. L?histoire de Fatima, Marek Halter ne la connait pas. c. C?est comme si un halo de trag?die entourait son existence. En faire une guerri?re est un non-sens historique. L?auteur a affirm? qu?il avait essay? d??tre honn?te avec l?histoire. S?il le fut, il le fut dans la m?connaissance de l?histoire, dans l?ignorance de la vraie nature de ce personnage attachant, ? l?origine de toute la descendance du proph?te, et dont le combat ne fut pas guerrier mais sentimental, moral, ??politique??. ??Mal nommer les choses, c?est ajouter au malheur du monde?? avait dit Albert Camus. Et Marek Halter a mal nomm? Fatima, mal per?u le personnage, mal imagin? sa triste vie, mal reconstitu? son environnement, mal r?concili? les monoth?ismes, mal apais? les urgences. Il a ajout? aux malheurs des incompr?hensions, des d?rives, des incertitudes. Aucun des faits majeurs du???noyau de v?rit頻 de la vie de Fatima ne figure dans ce roman. L?imagination de l?auteur et celle de ses collaborateurs furent impuissantes ? en inventer pour le lecteur avide de sensations. En dehors du complot avort? de l?assassinat de son p?re, du p?nible voyage de Ta?f (y a-t-elle particip??? La chronique n?en dit rien), des d?chets qu?elle ramassait devant leur maisonn?e quand les m?cr?ants et les m?cr?antes les y jetaient, son mariage avec Ali, rien mais rien de ce que fut son combat n?est ?voqu?. L?auteur disposait l? d?une mati?re romanesque d?une richesse intense et immense qui lui aurait permis d??crire un des romans les plus puissants de ce ??F?minin religieux?? qui le passionne. La vie de Fatima, ??m?re de son p?re??, n?a commenc? r?ellement que quand elle ne le fut plus et que le proph?te l?a mari?e ? Ali. Ali ?tait pauvre, tr?s pauvre. La fille du proph?te a v?cu indigente, contrairement ? ses s?urs mari?es successivement au riche Othmane Ibn Affan. Ali allait aussi lui infliger l?affront de vouloir prendre, comme la tradition de l??poque le lui permettait, une seconde ?pouse qui, de plus, ?tait la fille d?un des plus tenaces ennemis de l?Islam, Abu Jahl. Sans l?intervention ?nergique du proph?te qui l?en dissuada et l?en emp?cha, il l?aurait peut ?tre fait. L??lection d?Abu Bakr ? la succession du proph?te ne fut pas une bonne nouvelle pour Fatima. On conna?t les p?rip?ties de l?all?geance d?Ali ? Abu Bakr. Marek Halter semble ignorer que Fatima s??tait ?lev?e contre ce successeur en r?clamant l?h?ritage de son p?re. Abu Bakr et Omar lui oppos?rent une fin de non recevoir en se fondant sur un dit du proph?te ??Nous ne laissons pas d?h?ritage, tout ce que nous laissons est aum?ne??. ?Les chroniqueurs racontent une s?rie d??v?nements ?tonnants, suite ? cette d?cision d?Abu Bakr?: le refus de Fatima de recevoir et de revoir Abu Bakr et Omar, la suppos?e tentative de br?ler sa maison, Omar d?chirant la reconnaissance obtenue d?Abu Bakr, son enterrement la nuit pour que Abu Bakr et Omar n?y assistent pas, son interdiction, avant sa mort, de montrer l?emplacement de sa tombe ? quiconque. Ce fut ce que l?on aurait pu appeler ??La Passion de Fatima??. De cette ??passion??, sujet romanesque par excellence, rien mais vraiment rien dans le roman de Marek Halter. Ce roman finit malheureusement l? o? il aurait d? commencer. Je ne pensais pas en ?crivant cinq chroniques sur le roman consacr? ? ??Khadija??, dans une tentative d?sesp?r?e de d?construction, que l?auteur allait en prendre connaissance et rectifier le tir imaginatif. La machine ?ditoriale ? vis?e commerciale est trop puissante pour que je me berce d?illusions et crois qu?une aussi modeste contribution pouvait sugg?rer une quelconque rectification. Une seule chronique sur ce deuxi?me roman ??Fatima?? le peut encore moins. Le prochain roman annonce?A?cha, l??pouse pr?f?r?e. Ecrit dans cette veine. Il ne fera qu?accentuer le foss? que creuse ce genre malheureux d?initiative litt?raire. A cause de cela et pour cela je renonce d?j? ? entrevoir une vaine et inutile chronique sur ce troisi?me projet. Je renonce surtout ? conseiller ? Marek Halter d?attirer l?attention de ses correcteurs sur un genre d?erreurs inadmissibles?: comme ??Ils s?interrompaient dix fois entre l?aube et le cr?puscule pour la pri?re?? (page 152), quand on sait que chez les musulmans il n?y a que cinq pri?res entre ces deux moments de la journ?e et que le diable ne se nomme pas IFLIS mais IBLIS. Ce petit effort, l?auteur, les correcteurs et l??diteur peuvent au moins l?entreprendre pour amorcer une si noble cause qu?un dialogue serein d?entre les religions.

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