société
L’épopée de l’équipe marocaine de football : un évènement géopolitique majeur en faveur du Maroc et du Sud* - Par Fathallah Oualalou
La joie d’une équipe qui joue, gagne et répand le joie et le bonheur autour elle. Mais pas seulement.
Fathallah Oualalou est économiste, Senior Fellow au Policy Center for the New South. Il a été professeur à l'Université Mohammed V de Rabat et dans d'autres établissements au Maroc et à l’étranger. Il est l'auteur de nombreux ouvrages et d’articles dans les domaines de l’économie. Leader parlementaire à la Chambre des députés (1984 à 1998). Ministre de l'économie et des finances (1998 – 2007) et maire de Rabat (2009 à 2015.)
L’épopée de l’équipe marocaine lors de la Coupe du monde de football, à Doha en 2022, est un évènement immense, évidemment sportif, mais qui dépasse la sphère du sport. C’est un évènement qui concerne évidemment aussi le Maroc mais le dépasse. Son écho a été mondial. Il a été ressenti comme une source de joie, de ferveur et de fierté par les peuples maghrébins, arabes et africains, et plus généralement, par le Sud, qui se sont appropriés cette belle équipe et se sont identifiés à elle. Une équipe, certes nationale et marocaine, devenue aussi maghrébine, arabe et africaine, une représentation du nouveau Sud (New South), un Sud global, dans la mondialisation du 21ème siècle. À travers l’exploit de l’équipe nationale, des leçons sont à tirer et des recommandations à méditer pour l’avenir.
INTRODUCTION
Il s’agit d’un évènement sportif qui appelle une lecture sportive. La première leçon que l’on tire de ce succès footballistique c’est qu’il ne procède ni du miracle ni de la chance. L’épopée de notre équipe du début à la fin a été crédible parce que due à un effort et un travail réalisés par des Marocains et dans un cadre national. Ce succès a démontré que seul le travail garantit les avancées et le progrès. Il est le résultat avant tout du succès d’une institution nationale, l’Académie Mohammed VI de football, devenue une pépinière d’excellence de formation de footballeurs de haut niveau. Il est clair, par ailleurs, que l’encadrement de l’équipe menée par un entraîneur marocain Hoalid Regragui a été pour beaucoup dans la réalisation de cette performance. Cet encadrement a permis de construire une équipe forte, cohérente, solidaire et combattante. Une équipe merveilleuse qui rayonne et fait plaisir. Cet encadrement a créé les conditions physiques et mentales propices chez tous les joueurs et les a conduits à affronter sans complexe les grandes équipes européennes. Il est important d’insister sur le caractère national de l’encadrement de cette équipe. Bien sûr, les joueurs devenus héros pour notre pays appartiennent à des équipes de haut niveau, notamment en Europe, ce qui a permis de favoriser leur formation et d’améliorer leurs performances.
Grâce à l’effort accumulé et à l’encadrement réussi, l’équipe nationale marocaine se hisse au top des équipes européennes et latino-américaines. Elle a permis au Sud, c’est-à-dire à ce qu’on appelait le tiers monde, d’être présent parmi les grands, sans complexes.
Jamais dans l’histoire du football marocain notre pays n’a eu une équipe aussi solide, cohérente et astucieuse, que celle qui a joué dans la Coupe du monde de Doha. Certes, dans cette histoire on a connu de grands joueurs célèbres, souvent élégants, tous produits naturels des médinas, des rues et des quartiers populaires. Lors du protectorat, on citera Larbi Benbarek mais aussi Hassan Akasbi, Hassan Belmekki, le goal de l’Olympic, la belle triplette du WAC (Abdeslam, Chtouki et Driss) à côté du goal si Mohammed et Battach, Chhoud et Benaissa, du Stade marocain, sans oublier Mahjoub.
Lors du protectorat, le WAC, grâce à ses vedettes, devenu champion d’Afrique du Nord, dans les années 50, a été considéré comme le porte-drapeau du nationalisme marocain, face aux équipes françaises, notamment l’USM, le RAC et les Roches Noires de Casablanca, l’Olympic et le Stade de Rabat, et l’USDM et Tanger-FES de Meknès.
Après l’indépendance, la liste est plus longue : Chicha, Faras, Dolmi, Amari, Gzenaya, Zaki, Hajji, Bamouss, Naibat, Hadraoui, Hommane, Timoumi, Bassir, Boudarbala, Labyad...... (j’en oublie sûrement).
L’équipe de 2022 est le produit de l’Académie Mohammed VI de football et du professionnalisme. Une équipe complète, cohérente, où chaque joueur avait son apport. Tous étaient de vrais lions... de l’Atlas. Tous doivent être cités pour leur rendre un hommage appuyé :
Yassine Bounou, Munir El Kajoui, Reda Tagnaouti, Achraf Hakimi, Noussair Mazraoui, Nayef Aguerd, Ghanem Saïss, Achraf Dari, Jawad El Yamiq, Yahya Attiat Allah, Badr Benoun, Sofyan Amrabat, Abdelhamid Sabiri, Selim Amallah, Azzedine Ounahi, Bilal El Khannouss, Yahya Jabrane, Hakim Ziyech, Sofiane Boufal, Anass Zaroury, Abdessamad Ezzalzouli, Zakaria Aboukhlal, Ilias Chair, Yousseff En-Nesyri, Walid Cheddira et Abderrazak Hamdallah. L’équipe marocaine de football a battu de grandes équipes européennes. Elle a joué sans complexes avec les deux équipes finalistes de 2018. Elle s’est classée parmi les 4 premières équipes du monde. Comme les belles symphonies, celle jouée par l’équipe marocaine ne s’est pas achevée face à l’équipe de France, mais l’essentiel c’est qu’elle était au niveau des grands.
La diaspora marocaine,un atout et une fierté pour le pays
La deuxième leçon à retenir de cette épopée se réfère à l’importance de l’apport qualitatif de la diaspora marocaine à l’étranger, c’est-à-dire des 5 millions de Marocains qui constituent ce qu’on appelle les Marocains du monde. Cette diaspora à laquelle appartiennent les joueurs de l’équipe marocaine doit être l’objet de fierté pour tous les Marocains, parce qu’elle est restée attachée à son pays d’origine, à ses fondements, à son identité et à ses valeurs, tout en contribuant à l’enrichissement des pays d’accueil. La diaspora est un relai essentiel dans les rapports du Maroc avec la mondialisation du 21ème siècle. Elle fait partie de son rayonnement et de son soft power. Elle enrichit l’économie, la science, la culture et le sport dans les pays européens.
Économiquement, elle rapportera à la balance des paiements plus de 100 milliards de Dirhams en 2022. Sur le plan qualitatif, elle est formée de travailleurs, mais de plus en plus de cadres, de médecins, d’ingénieurs, de scientifiques et d’écrivains (3 prix Goncourt) ............et de sportifs. Dans ce dernier domaine, elle a produit de grands footballeurs qui se sont imposés depuis des décennies, comme de grandes vedettes dans les équipes les plus célèbres en France, en Espagne et aux Pays-Bas. Des joueurs qui ont brillé dans des équipes européennes mondialisées. Le premier, comme Larbi Benbarek, qui a joué de 1938 à 1954 à Marseille et à l’Atlético de Madrid, et fut le premier non français à jouer dans l’équipe de France. On citera aussi le talentueux Hassan Akasbi, joueur du FUS de Rabat, avant d’être intégré à Nîmes et à Reims, à côté de Kopa et Fontaine (né au Maroc), où il a été le premier buteur du championnat de France en 1958.
Aujourd’hui, les joueurs marocains rayonnent dans des équipes européennes globales, en France, en Espagne, aux Pays-Bas, en Italie et en Grande-Bretagne. Certains sont nés au Maroc, d’autres dans les périphéries des villes européennes, tous appartiennent à des familles de couches populaires.
L’atout du Maroc dans ses rapports avec ces joueurs provient de leur attachement au pays, son identité et ses spécificités, comme d’ailleurs toutes les composantes de la diaspora marocaine à l’étranger. Leur amour pour leur pays a été un atout pour expliquer comment à partir de leur professionnalisme ils ont été combatifs et solidaires sur le terrain.
Face aux équipes européennes et latino-américaines, les joueurs de l’équipe nationale ont représenté le Maroc, le Maghreb, le monde arabe et l’Afrique, c’est-à-dire le nouveau Sud. D’ailleurs, la diaspora marocaine en Europe constitue le point de départ de ce nouveau Sud, qui se prolonge au-delà de la Méditerranée, dans le continent africain et le monde arabe.
Le sport, une composante de la mondialisation et le reflet des identités nationales
La mondialisation est un fait grossier qui s’impose au 21ème siècle. Elle est économique et technologique surtout. Le sport de haut niveau en fait aussi partie. Les grands évènements sportifs, de la Coupe du monde de football, aux Jeux olympiques, au tour de France de cyclisme, suivis par des centaines de millions de téléspectateurs, illustrent cette mondialisation du sport. Même si elles restent domiciliées dans un cadre local des grandes villes européennes, les grandes équipes les plus célèbres comme le Real Madrid, la Barça, le PSG, Munich, et Manchester sont aujourd’hui globales, dont des joueurs appartiennent à des origines européennes, latino-américaines et de plus en plus africaines et asiatiques. Leur fonctionnement est déterminé par la logique de la globalisation. La manifestation de la Coupe du monde de football reflète en grande partie une compétition euro-européenne, entre les équipes nationales européennes caractérisées par la diversité de leur composition, et les autres équipes latino-américaines, africaines et asiatiques constituées pour l’essentiel de joueurs appartenant aux diasporas qui vivent en Europe. De même, les équipes nationales européennes sont marquées dans leur composition par la diversité, leurs joueurs sont de moins en moins autochtones et proviennent de plus en plus d’origines étrangères. C’est le cas notamment de l’équipe de France.
L’équipe nationale est certes d’essence marocaine, mais elle tend aussi à être globale parce que ses joueurs sont nés pour la plupart en Europe, et appartiennent donc à la diaspora installée en Europe et qui est une composante de la globalisation.
Mais dans le sport, les identités nationales et les valeurs qu’elles portent contestent la prédominance de la globalisation. Dans ce monde mondialisé, le sport incarne de plus en plus le patrimoine des peuples et la spécificité des nations. Chaque équipe nationale est épaulée par ses supporteurs nationaux, elle incarne le drapeau et l’hymne nationaux. Face à l’effacement du fait national par l’effet de la globalisation économique et technologique, le football incarne la résilience du national. Dans la mondialisation qui avance, l’espace du sport devient un lieu de conservation du patriotisme, de la spécificité et de l’identité. C’est certainement dans l’espace du sport que la globalisation est perturbée par l’attachement des peuples à ce qu’ils sont, c’est-à-dire à leurs origines.
L’épopée sportive de l’équipe nationale a permis aux Marocains de se retrouver autour d’elle comme un repère qui leur donne de l’espoir. Elle leur a permis de s’unir, de se rassembler, de vivre leur « Tamaghrabyt », de retrouver de la joie et de la fierté et de se référer aux composantes de la culture marocaine profonde : croire à cette fameuse «Nya» (intentionnalité), mettre en évidence la valeur de « Ridat al walidines » ( bénédiction des parents), représentée par les mères à coté de leurs fils dans les terrains de Doha, jusqu’à être reçues avec eux par Sa Majesté le Roi Mohammed VI dans la Salle du Trône. Cette communion représentée par « Tamaghrabyt » a été sentie avec force par la sortie de notre Souverain dans la rue avec tous les Marocains pour fêter la performance de l’équipe nationale. C’est avec force aussi qu’on a ressenti la valeur de l’accueil Royal à nos héros dans la Salle du Trône, le lieu le plus emblématique du Palais Royal, après l’accueil populaire et chaleureux que les Marocains leur ont accordés tout le long du parcours qu’ils ont traversé. Cette manifestation de joie et d’espoir rappelle aux Marocains des moments glorieux de leur histoire : le retour de Feu Mohammed V de l’exil en novembre 1955, suivi de l’indépendance du pays et la récupération du Sahara suite à la Marche verte en 1975.
Au lendemain du match Maroc-France le 14 décembre 2022, j’ai eu l’occasion d’intervenir dans un panel dédié aux rapports entre la France et le Maroc lors de la conférence Atlantic dialogues organisée à Marrakech par le Policy Center for New South. J’ai relevé que notre pays, grâce à l’apport de son histoire, la diversité de ses composantes, son système monarchique dont la légitimité a été renforcée lors de la lutte contre la colonisation, a géré son indépendance sans aucun complexe, aussi bien avec la France qu’avec l’Espagne, qui avait occupé le nord du Maroc comme son sud au Sahara. Le Maroc n’a aucun complexe parce qu’il se définit par rapport à sa culture, son histoire et non par rapport aux autres. Au lendemain de l’indépendance, il a tendu la main à la France et à l’Espagne sans complexe.
Le Maroc est capable d’oublier les années de rupture qui font partie de son histoire qu’il assume sans complexe. Et dans le monde mondialisé d’aujourd’hui nous avons autant que la France, l’Espagne et toute l’Europe le droit de s’ouvrir sans complexe sur la mondialisation et les autres grandes puissances, notamment les États-Unis et la Chine. Mais, nous sommes conscients de notre position géographique et de notre histoire et de la nécessité de continuer à renforcer nos liens spécifiques avec la France et l’Espagne. Nous avons l’ambition du fait de cette position géographique et de l’atout de l’héritage historique d’être le relai entre l’Europe et l’Afrique dans tous les domaines, celui de l’économie bien sûr mais aussi dans l’espace de la culture et de la sécurité.
L’épopée de l’équipe marocaine a montré que l’on peut imposer le respect et rattraper les autres sans complexe. J’ai conclu que dans le contexte actuel nous avons droit face à la question existentielle de notre intégrité territoriale d’interpeller la France et l’Espagne pour comprendre et respecter notre position relative à notre intégrité territoriale. Ces deux pays connaissent l’histoire et la géographie de cette région et ils ont une responsabilité sur tout ce qui concerne l’unité de notre territoire. Plus que d’autres pays, ils doivent respecter notre intégrité territoriale.
Un évènement géopolitique pour le Sud
L’équipe marocaine n’était pas soutenue par le seul Maroc. Et le Maroc n’était pas seul dans cette belle aventure. Derrière notre pays et son équipe, il y avait tout le Sud. La diaspora installée en Europe, les peuples du Maghreb, de l’Afrique et du monde arabe. Tous se sont appropriés cette équipe qui a battu des équipes européennes célèbres de Belgique, d’Espagne, du Portugal et qui a joué sans complexe contre l’équipe de France championne du monde. Dans l’imaginaire des opinions arabes et africaines, ces équipes européennes représentent d’anciennes métropoles qui n’ont pas pu se libérer du handicap de la période coloniale. Aujourd’hui, ces pays représentent le Nord qui perpétue des rapports d’échanges inégaux avec le Sud. L’épopée de l’équipe marocaine a contribué à décomplexer le Sud et a montré qu’il peut rattraper les autres et imposer le respect. Son succès dépasse le sport face au Nord, il cristallise la détermination du Sud de le rattraper, voire même de le dépasser. La capacité de rattrapage n’ouvre pas seulement la voie aux pays du Sud d’avancer, elle s’identifie à leur droit au progrès, au rayonnement et au développement. Le droit de rattrapage représente le désir de sortir de la marginalisation et l’espoir de s’ouvrir au développement. C’est la leçon essentielle à méditer de cette belle expérience vécue par l’équipe marocaine à Doha. Pour une bonne partie des masses des habitants du Sud marginalisés et souvent écrasés, ce succès donne espoir pour effacer les humiliations dont celles vécues depuis plusieurs décennies par le peuple palestinien. C’est ce qui explique la forte présence de la question palestinienne légitime à Doha. Le succès de l’équipe marocaine a permis au drapeau palestinien d’être hissé à côté du drapeau marocain, et aux habitants de Gaza comme ceux des territoires occupés d’accompagner le peuple marocain dans sa joie.
Il est important de relever le comportement des Maghrébins et surtout des Algériens qui ont accompagné avec ferveur et enthousiasme la belle aventure marocaine malgré l’état de rupture totale qui caractérise les rapports des deux États, le Maroc et l’Algérie. En 2019, les Marocains étaient, de leur côté, des soutiens de l’équipe algérienne de football quand elle a remporté la CAN africaine. Cette manifestation de solidarité des Algériens, comme les autres Maghrébins qui se sont appropriés avec force et joie l’équipe marocaine, montre à quel point (dima khawa khawa), ce comportement ne procède pas seulement de l’émotion, mais aussi de la raison qui appelle à la normalisation des rapports entre l’Algérie et le Maroc et à effacer tous les signes de rupture entre les deux pays : rupture des rapports diplomatiques, arrêt du fonctionnement du gazoduc, fermeture de l’espace aérien aux avions marocains, tout cela s’ajoute à la fermeture des frontières terrestres depuis 1994.
Au-delà de l’accompagnement affectif des Maghrébins à l’équipe marocaine, il y a chez eux un désir profond d’aller de l’avant pour construire un Maghreb solidaire qui leur permet un vrai développement économique et d’améliorer leur capacité de négociation avec l’Europe voisine et plus généralement avec la mondialisation avancée du 21ème siècle.
Le Maroc, fier de la réaction des peuples du Maghreb dans leur accompagnement fraternel, continuera de tendre la main à l’Algérie, comme le montrent les initiatives de notre Souverain, et notamment ses discours du Trône de 2021 et de 2022 : « Nous renouvelons notre invitation à Nos frères algériens pour œuvrer de concert sans conditions à l’établissement de relations bilatérales fondées sur la confiance le dialogue et de bon voisinage..........Nous aspirons à œuvrer avec la présidence algérienne pour que le Maroc et l’Algérie puissent travailler la main dans la main pour le rétablissement des relations normales entre les deux peuples »
Merci donc à cette équipe nationale qui, par l’écho de sa performance auprès des peuples maghrébins, arabes et africains, redonne beaucoup d’espoir au Sud global, lui permet de se décomplexer et de croire aux possibilités de rattrapage des autres. Ici, le cœur et la raison sont du même côté. C’est dans ce sens que cette épopée constitue un moment géopolitique majeur.
Capitaliser sur la réputation
Le Maroc a gagné́ beaucoup de l’épopée de son équipe nationale en matière de prestige et de réputation. Dans la mondialisation d’aujourd’hui, la réputation est une catégorie essentielle dans les relations internationales, surtout quand elle est liée à des performances sportives, devenues pour le Maroc une composante de son soft power, à l’image de sa gestion spirituelle de l’Islam dans le sens de la tolérance et de l’ouverture. Ce succès donne à notre pays beaucoup de responsabilités. Dans le domaine du football où il faut continuer à avancer : « Sir Sir Sir », mais aussi dans les sphères du politique, du social et de l’économie, c’est-à-dire les sphères qui débouchent directement sur la question du développement. Dans la gouvernance de toutes ces sphères, les leçons données par l’équipe de football sont à méditer. Elles nous indiquent que sans le travail et sans la formation on ne peut rattraper les autres. Elles illustrent réellement le sens du nouveau modèle de développement que nous voulons construire. Le Maroc est classé aujourd’hui 11ème dans le monde en matière de football. Cela veut dire que dans ce domaine on a émergé et on a atteint le seuil de décollage, ce fameux « Take off », dont parlait dans les années 1960 Rostov, un économiste célèbre qui était par ailleurs un conseiller du président Kennedy. Sur l’ensemble des indicateurs de développement économique, social et culturel, notre pays évolue généralement entre le 70ème et le 100ème rangs. C’est à nous de créer, à partir de l’exemple donné par l’équipe nationale, les conditions de rattrapage dans tous ces domaines où nous devons avancer aussi, et tendre la main au reste du monde avec respect, humilité et sans complexe pour améliorer notre capacité de négociation.
Dans ce sens, il est crucial de se mobiliser au niveau de la proximité pour créer les conditions de réconciliation entre les peuples de la région maghrébine pour que celle-ci rayonne et dialogue dignement avec ses voisins du Nord, les Européens, et du Sud, les Africains.
Bien sûr, il faut capitaliser sur la réputation produite par l’évènement sportif, mais aussi sa signification géopolitique, dans notre proximité et face à la mondialisation pour défendre notre cause principale, l’intégrité territoriale, réformer réellement notre modèle de développement et rehausser la place du Sud global dans le monde pour améliorer ses capacités de négociation dans tous les dossiers et face à tous le défis : endettement, sous- développement, pauvreté, inégalités, santé, éducation, énergie renouvelable et réchauffement climatique.