Algérie-terrorisme : Faible mobilisation du Conseil de Sécurité sur le terrorisme  - Par Taieb DEKKAR

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Alger, en septembre 1997, après un assaut des forces de sécurité contre une mosquée 

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L’Algérie, qui préside ce mois-ci le Conseil de sécurité de l’ONU, en tant que membre non permanent, et ce, pour la deuxième année consécutive, a réuni cette instance qui est chargée de la paix dans le monde, lundi 20 janvier, sur le registre du terrorisme en Afrique, si cher au voisin de l’Est.

Elle a réuni le Conseil au niveau des ministres des affaires étrangères, une occasion pour Ahmed Attaf, d’espérer pouvoir rencontrer le nouveau secrétaire d’état américain, qui venait juste de prendre ses fonctions.  Or, cette ambition de réunir le conseil au plus haut niveau n’a pas eu d’effet mobilisateur parmi les pays occidentaux. Seuls quelques pays africains avaient participé au niveau ministériel.

Le terrorisme, crédo du régime militaire algérien 

Comme toujours, l’Algérie fait de la lutte contre le terrorisme son crédo, au niveau international, bien que les dividendes qui en sont recueillies soient dérisoires, de l’avis même du ministre algérien qui, avant de reprendre le portefeuille de la diplomatie, avait jugé exagéré que l’Algérie fonde sa politique étrangère sur le seul chapitre de la lutte contre le terrorisme. 

Il faut bien reconnaitre que, dans le cas algérien, la notion de terrorisme soulève quelques interrogations. Beaucoup de pays occidentaux, comme la presse étrangère accrédités en Algérie, au début de la décennie quatre-vingt-dix, s’étaient abstenus, au début du déclenchement de la violence, suite à l’interruption du processus électoral en janvier 1992, d’utiliser la notion de terrorisme, pour la qualification des actes de résistance armés contre le pouvoir. La presse étrangère utilisait la formule de « groupes islamiques armés », alors que le pouvoir et la presse locale, qualifiaient les groupes islamiques armés de terroristes. Il a fallu plusieurs mois pour que la presse étrangère décide de reprendre la terminologie du pouvoir. 

La violence armée fut déclenchée au lendemain de l’interruption du processus électoral, qui avait donné la victoire à un parti islamiste légal. Les causes de la violence étaient claires, par opposition aux groupes terroristes de Daesh (l’Etat islamique) et autres groupes jihadistes, dont l’objectif est de restaurer le khalifat. L’on se rappelle la célèbre injonction de François Mitterrand «Il faut que… » contre l’interruption du processus électoral en Algérie et le vœu qui animait le Roi Hassan II de voir le processus conduit à sa fin, pour tester la gouvernance islamiste, convaincu qu’il était que les cadres du FIS  (Front islamique de salut), formés  notamment à Londres, ne pouvaient pas ne pas être inspirés par la modernité des pays occidentaux. Il se serait même dit qu’après tout, le FIS qui avait multiplié des signaux positifs en direction de Rabat, ne serait pas pire que le FLN. 

Le FIS n’était ni Daesh, ni l’état islamique 

Toute la différence est là. Les islamistes algériens dénonçaient la confiscation de leur victoire électorale par l’armée, quand Daesh et autres mouvements jihadistes engagent le Jihad pour le rétablissement du khalifat.

 Les islamistes algériens s’attaquaient exclusivement aux symboles du pouvoir, aux forces de sécurité et aux partisans de l’intervention de l’armée, qu’ils soient journalistes ou écrivains. Le pouvoir, alors dépourvu de moyens de lutte, avait multiplié les appels à l’aide en moyens logistiques de lutte en direction des pays européens, mais ses appels étaient restés sans suite, pendant longtemps. Bien plus, les compagnies européennes avaient suspendu leurs liaisons en direction d’Alger, ce qui avait aggravé l’isolement de l’Algérie, qui luttait, seule, contre ce qu’elle désignait sous le vocable de terrorisme. Et il aura fallu concocter et superviser un attentat contre un hôtel à Marrakech, ville touristique, dans un pays voisin, le Maroc en l’occurrence, allié de l’Occident, et contre des touristes européens, pour que se déclenche l’alerte dans les pays occidentaux et les rendre, les Etats européens notamment, sensible à la guerre du pouvoir algérien.

Les forces de sécurité algériennes ont tué quelques 300.000 Algériens, seulement en partie des islamistes qui avaient pris les armes pour combattre le régime en place. Une guerre impitoyable, menée pendant plus de dix ans, qui occasionna outre des dégâts qui se chiffrent à des milliards, le déplacement de la population qui, craignant la violence des uns et des autres, s’installa dans les périphéries des centres urbains (environ deux millions de personnes). 

Une tentative de déculpabilisation 

Bien que les causes n’en soient pas avérées, l’Algérie a fait campagne au niveau international contre le terrorisme, pour se disculper et se culpabiliser aux yeux de l’opinion publique nationale et internationale des crimes et du génocide perpétrés contre le peuple algérien, qui a eu le malheur de choisir  des islamistes, pour le gouverner , avec lesquels le président Chadli Benjedid et une partie du pouvoir algérien ainsi que le grand démocrate algérien, Houcine Ait Ahmed, nullement paniqué, qui étaient disposés à gouverner en formant une alliance FIS - FLN, pour chasser démocratiquement l’armée du pouvoir et instaurer pour la première fois, depuis l’indépendance, l’alternance. 

 Et la seule conclusion à retenir du crédo chère au pouvoir de lutte contre le terrorisme, c’est qu’en vérité l’armée algérienne ne combattait ni Daesh, ni l’, qui auraient surgi du néant et proclamé le jihad pour l’instauration du Khalifat, mais des Algériens qui,  d’obédience islamiste certes, avaient remporté des élections libres et honnêtes, dont les résultats avaient été publiés au journal officiel et dont l’unique « crime » est d’avoir pris les armes pour combattre ceux qui les avaient déposséder de leur victoire

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