Cinéma, mon amour ! de Driss Chouika - QUEL STATUT POUR LA CINEMATHEQUE NATIONALE ?

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La cinéaste Narjiss Nejjar nommé pour conduire la transition vers une véritable Cinémathèque nationale. Etant une professionnelle aguerrie et expérimentée, l’essentiel est d’assurer l’autonomie financière et de gestion, tant attendue, de cette institution nationale en berne depuis près de trois décennies, et lui permettre d’assurer la précieuse sauvegarde et une large diffusion de la mémoire cinématographique nationale

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CINEMA, MON AMOUR ! DE DRISS CHOUIKA : CE SOMBRE ET MACABRE CINEMA  MEDITERRANEEN DE L'APRES COVID 19 !

« Depuis la nuit des temps, l'homme jouait avec les ombres, avec des poupées animées, avec lui-même, se servant du pinceau de la couleur. Il attendait, il espérait l'image cinématographique qui allait lui permettre de capter le temps, de l'arrêter, de le fixer, de le prolonger, de le vaincre ».

Henri Langlois

HISTORIQUE

Historiquement, La Cinémathèque Française est pionnière dans l’histoire en tant que lieu de diffusion et de conservation du patrimoine cinématographique d’un pays. En la créant au début des années 30, en tant qu’association autonome et indépendante, disposant ensuite d’un financement à la fois public et privé, Henri Langlois était peut-être loin d’imaginer que son exemple allait être suivi presque partout dans le monde.

Au Maroc, un embryon de cinémathèque a été créé par le CCM, du temps de Souheil Benbarka, en 1995, en tant que simple service interne rattaché à l’administration du centre, sans aucun statut juridique et légal spécifique. Depuis, plusieurs tentatives de doter cette cinémathèque nationale d’un statut clairement défini n’ont jamais abouti, butant toujours sur les handicaps du manque de moyens de financement public et du peu d’intérêt des instances de l’Etat. Aucun des directeurs qui se sont succédé à la tête du CCM n’a rien pu y faire pour donner vie à cet embryon resté en l’état depuis sa naissance. Avec une salle de projection demeurée fantomatique, ouverte à de rares occasions, et un semblant de musée légué finalement à une autre administration publique, ladite cinémathèque n’a été jusqu’à présent qu’une carcasse vide.

Aujourd’hui, une démarche plus sérieuse pour donner finalement une existence réelle à une cinémathèque nationale en bonne et due forme est initiée par Mr Mohamed Mehdi Bensaid, le Ministre de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication.

AUTONOMIE OU DEPENDANCE ?

Quel serait alors le statut de cette cinémathèque ? Sera-t-elle autonome, financièrement et administrativement, ou restera-t-elle sous le giron de l’administration du CCM, avec juste quelques menus réaménagements sans aucun impact réel sur son développement escompté ? Depuis sa création en 1995, le débat a tourné en rond, sans aucune perspective d’une solution tranchée. Un va-et-vient interminable entre la direction du CCM, le Ministère de tutelle, le Ministère des Finances et le Secrétariat Général du Gouvernement a tourné en rond pendant des années, sans jamais aboutir à un statut juridique et légal bien défini pour cette institution nationale d’une importance capitale.

Il y a quelques mois, le site officiel de la fonction publique a publié un appel à candidature pour la nomination d’un conservateur/directeur (le choix n’est pas encore tranché !) de cette fantomatique cinémathèque. Plusieurs personnes ont effectivement déposé leurs candidatures selon les conditions requises. Finalement, ledit appel est resté lettre morte ! Cela a fait couler beaucoup d’encre et certains ont avancé que c’était une erreur de lancer un appel à candidature pour la direction d’une “entité nationale“ qui n’a aucune existence légale ; cela revient à mettre la charrue avant les boeufs !

C’est ainsi que le nouveau gouvernement a finalement opté pour une période transitoire, nommant une professionnelle pour diriger cet embryon de cinémathèque tout en préparant un décret définissant avec précision le statut juridique de cette importante institution nationale.

SAUVEGARDER LA MEMOIRE NATIONALE

La personne nommée, la cinéaste Narjiss Nejjar, étant une professionnelle aguerrie et expérimentée, l’essentiel est d’assurer l’autonomie financière et de gestion, tant attendue, de cette institution nationale en berne depuis près de trois décennies, et lui permettre d’assurer la précieuse sauvegarde et une large diffusion de la mémoire cinématographique nationale. Elle assure que “l’état physique des archives cinématographiques nationales est déplorable et très préoccupante. En plus, la disparition des laboratoires argentiques complique les choses, rendant difficile la récupération des négatifs de plusieurs films marocains éparpillés dans les quatre coins du monde“. Il est donc bien temps de sauvegarder cette mémoire vive de la nation. Et cela doit etre accompagné par un travail à la fois archivatique, muséographique et documentaire. Voilà l’essentiel qui devrait intéresser les “professionnels de la profession“ et les cinéphiles.

Tout débat doit partir de là, avant toute autre considération. La cinémathèque est une affaire nationale sérieuse, car elle concerne La Mémoire imagée de la Nation. Il s’agit bien de la diffusion, la conservation, la documentation, la préservation, la restrauration et la mise en valeur du patrimoine cinématographique de notre pays. Et cela est vraiment inestimable. Une nation sans mémoire est une nation vouée à la disparition. Et comme avait si bien dit Henri Langlois « Depuis la nuit des temps, l'homme jouait avec les ombres, avec des poupées animées, avec lui-même, se servant du pinceau de la couleur. Il attendait, il espérait l'image cinématographique qui allait lui permettre de capter le temps, de l'arrêter, de le fixer, de le prolonger, de le vaincre ».

Oui, pour lui, « C’est le rêve qui s'exprime à travers le cinéma. C'est tous les mythes humains qui s'expriment à travers le cinéma ». Et la cinémathèque est bien le temple gardé du cinéma, de la mémoire cinématographique.

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