chroniques
En arabe, en latin, en sinogramme ou en PNUD, la Santé d’abord
Le Roi Mohammed VI lançant à Rabat le 5 mai 2022 la construction du nouvel hôpital Ibn Sina
Par Naïm Kamal
Premier décembre. Ce jour-là, le Maroc passe haut la main le premier tour de la coupe du monde et quelque 11 millions de citoyens du Régime d'assistance médicale (RAMED), basculent vers celui de l'Assurance maladie obligatoire (AMO). Ce n’est donc pas un hasard, si au Conseil de gouvernement du même jour, le Chef du gouvernement dédie quelques lignes à la qualification des Lions de l’Atlas, mais consacre son avant-propos exclusivement à la réforme de la Santé.
Aziz Akhannouch se félicite de la qualification et du pari tenu du basculement vers l’AMO. Puis déroule. Mise à niveau des infrastructures de santé, dont les hôpitaux, les centres médicaux régionaux et les centres de formation. Mise à niveau de 1.400 centres de santé en 2022 et en 2023, pour les doter d'espaces d'accueil comparables à ceux des établissements hospitaliers privés.
Les groupements territoriaux de santé seront chargés de la gestion des hôpitaux, des centres de santé et des ressources humaines au niveau des régions. Chaque région disposera d'un centre hospitalier universitaire, d'une faculté de médecine et d'écoles de formation des infirmiers et techniciens. Ces groupements territoriaux de santé jouiront d'une autonomie pour gérer eux-mêmes leurs ressources humaines, leurs hôpitaux, leur offre de santé et de formation et leur recherche scientifique, en tenant compte des spécificités de chaque région et des pathologies courantes qui y existent. Sans omettre de rappeler que le gouvernement planche sur la préparation et la généralisation d'un système informatique permettant aux citoyens d'accéder aux services de santé adéquats via la plateforme numérique.
Un vaste chantier
Au cours du même conseil, le ministre de tutelle, Khalid Aït Taled, soumet à examen et à approbation cinq projets en relation avec le secteur : création de la Haute autorité de santé en exécution des orientations royales portant sur la révision de fond en comble du système de la santé. Entre autres prérogatives, elle assurera l’encadrement technique de l'assurance maladie obligatoire de base (AMO), la préparation des outils de gestion de son système, l’évaluation de la qualité des prestations fournies par les établissements de santé publics et privés, et les conditions de prise en charge médicale des patients.
Les quatre autres projets portent sur la création des groupements sanitaires territoriaux, les garanties essentielles accordées aux ressources humaines des métiers de la santé, la création de l'Agence marocaine des médicaments et des produits de santé, la création de l'Agence marocaine du sang et de ses dérivés, tendant à surmonter les problèmes et les contraintes auxquels sont confrontés le Centre national de transfusion sanguine et d'hématologie et l'ensemble des Centres régionaux de transfusion sanguine. Un sujet qui défraye régulièrement la chronique.
Un vaste chantier en conséquence, aussi complexe et compliqué que celui de la réforme de l’éducation nationale. Les deux ont d’ailleurs en commun plusieurs intersections dont celui de la formation n’est pas des moindres. L’éducation, qu’elle se rapporte aux savoirs ou aux comportements est le corolaire quand elle n’est pas le fondement d’un bon système de santé où la citoyenneté fondée sur le civisme dans son sens intégral conditionne le reste. L’expression fait cliché mais reste de cours : un esprit sain dans un corps sain, sachant qu’il n’y aurait pas non plus de corps sain sans un esprit sain. C’est une redoutable dialectique qui peut, selon l’usage que l’on fait, être vertueuse ou défectueuse.
Socrate déjà
Dans tous les aphorismes et maximes qui se rapportent à elle, dans toutes les langues, la Santé est au centre de la vie humaine. Elle en définit le bonheur, détermine le bien être, conditionne la longévité et l’état du déroulement de la vie, de la naissance à la tombe. Et peut-être bien au-delà.
Qu’on les lise de droite à gauche ou de gauche à droite, de haut en bas ou inversement, qu’on les écrive avec des alphabets ou avec des sinogrammes, les adages disent tous la même chose : La santé c’est tout.
Socrate déjà, et sans doute bien d’autres femmes et hommes que lui et avant lui ont répété la même sentence : Existe-t-il pour l’homme un bien plus précieux que la santé ? Un film a dévoyé un adage plus juste pour titrer : vaut mieux être riche et en bonne santé que pauvre et malade, ce qui est bien vrai, alors que le proverbe d’origine dit : vaut mieux être pauvre en santé que riche et malade, ce qui est tout aussi exact. Ce n’est donc pas pour rien que la santé arrive en tête dans le calcul de l’indice du développement humain établi par le PNUD.
Pour autant, il ne faut pas rêver. Ce n’est pas demain que tout ira bien dans le meilleur des systèmes de Santé. Il y a des domaines qui, quoi que l’on puisse avoir comme croyances et porter comme détermination, résistent aux miracles et au changement par enchantement.
Mais un cap est pris sur lequel le Roi s’est directement et personnellement engagé. Aziz Akhannouch qui y fait souvent référence, en est parfaitement conscient, comme il sait que le succès de son mandat à la tête du cabinet dépend en grande partie des réalisations en matière de santé comme dans l’enseignement. Des visions, des lois et des projets de lois ont été mis en place, des délais ont été fixés pour que tout soit bien sur les rails : au plus tard en 2026. Comment ne pas leur souhaiter bonne chance.