La Baraka de Ssi Nizar

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Nizar Baraka, secrétaire général de l’Istiqlal

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Nizar Baraka, secrétaire général du Parti de l’Istiqlal (opposition), semble ces jours-ci obnubilé par la question de « que faire ? » une fois chef du gouvernement. Depuis qu’il a été chargé en tant qu’émissaire du Roi de remettre en 2019 un message écrit au président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, il n’a de cesse de s’exprimer à tout venant sur «son programme d’action» si jamais les législatives prévues pour cette année le propulsent la tête du gouvernement !

L’année écoulée, il a sévèrement critiqué le gouvernement El Otmani, l’accusant d’avoir échoué à gérer la pandémie du Coronavirus et à résoudre le problème du chômage. Il lui a aussi durement reproché d’avoir accentué la pauvreté, exacerbé la tension sociale et entamé la confiance des citoyens dans les institutions de l’Etat.

Au cours de l’examen du projet de budget, il a ainsi vilipendé le gouvernement pour s’être aplati devant les lobbies et les intérêts corporatistes. Et lors de la réunion d’un Conseil national de l’Istiqlal, il s’est fait le héraut de l’appel pressant du peuple à tourner la page du PJD.

Si sa critique du gouvernement s’est maintenue à la même cadence durant les trois premiers mois de l’année en cours, la dynamique politique de Nizar Baraka a évolué par la suite de la critique à l’exposition d’un «programme gouvernemental» que son parti mettrait en œuvre s’il venait à présider le gouvernement.

De son cheminement se dégagent quatre axes majeurs :

Le premier n’est rien moins que son appel, lors d’une réunion du comité exécutif du PI, à l’ouverture du chantier des réformes politiques pour mettre un terme à la situation de confusion et d’ambiguïté du paysage politique.

Le deuxième se rapporte à l’organisation d’une rencontre istiqlalienne sur les événements du Rif que Nizar Baraka a qualifiée d’étape sur la voie de la réconciliation, de la réparation et du renforcement de la cohésion nationale.

Le troisième consiste en la mise à l’index de l’impuissance du gouvernement à faire face aux conflits d’intérêt, avec ce que cette déficience implique en termes de perte de confiance dans la chose politique et dans la gestion des affaires publiques. Il en conclut que cette situation requiert une action de réhabilitation de la politique à travers la mise en place d’une nouvelle génération de réformes structurelles.

Le quatrième axe enfin est la déclaration de sa volonté d’abroger le statut contractuel des enseignants.

Ces axes sous-tendent donc quatre dossiers majeurs : les reformes politiques, la réconciliation générale, la lutte contre la prévarication et la question sociale. Il s’agit, tout compte fait, des mêmes doléances qui sont la marque de toute nouvelle législature et des mêmes revendications qui meublent toute échéance électorale.

Cependant, il y a presque un consensus sur des échéances électorales cette année incolores et sans saveur, à moins d’engager au préalable des mesures de confiance à même d’insuffler un nouvel élan au processus politique et de réconcilier suffisamment les citoyens avec la chose politique pour booster le taux de participation aux élections.

Le champ exclusif du pouvoir

M. Nizar Baraka sait pertinemment que le dossier de la réconciliation tout comme celui des réformes politiques n’est pas entre les mains des partis politiques et particulièrement du PI qui se trouve actuellement à la marge des rapports de force politiques, sachant que ces deux chantiers ne peuvent être initiés que dans deux cas de figure : 

Le premier suppose une crise de l’Etat d’une nature qui prédisposerait les élites politiques à négocier sur la base de la «réforme comme billet d’accès à la stabilité». En l’état actuel des choses, le PI, qui n’a pas en mains les aouts nécessaires, n’est pas éligible à la résolution de pareille crise. 

Le second dépend de la prédisposition de l’Etat à considérer qu’il est de son intérêt d’opérer des réformes et des mesures de confiance en termes de participation politique. Auquel cas, l’association du PI à ce processus ne reviendrait pas à ses mérites propres et ne serait dans le meilleur des cas qu’une largesse du pouvoir. 

Hormis ces deux dossiers inaccessibles, la lutte contre la corruption et la question sociale se réduisent à des slogans électoraux que le PI est tenté de ré-expérimenter, tout comme le fit le PJD en brandissant aux élections du 25 novembre 2011 le slogan de la lutte contre la corruption et le despotisme.

M. Nizar Baraka, qui a été ministre des Finances (janvier 2012- octobre 2013) dans le gouvernement Benkirane (janvier 2012-avril 2017), est bien placé pour appréhender la situation dans ses dimensions réelles. Lui, comme son chef de gouvernement, n’ont rien pu face aux lobbies hostiles à la réforme et à la rationalisation de la compensation pour la destiner exclusivement aux ménages pauvres. Incapable alors d’agir, et encore moins de tenir des propos aussi durs qu’aujourd’hui, il a pu prendre la mesure du poids de ces lobbies, de leur puissance et de l’ampleur de leurs imbrications avec le pouvoir…

En évoquant aujourd’hui la lutte contre la rente, les conflits d’intérêts et la prééminence des lobbies, M. Baraka ne fait que reproduire la rhétorique du PJD dont l’expérience n’a pas été des plus convaincantes.

On ne sait trop ce qui amène M. Nizar Baraka à avancer des slogans bien trop grands pour son parti. Peut-être croit-il ou cherche-t-il à faire croire à l’opinion publique que la Baraka dont il s’arme pour mener la campagne électorale suffirait à Nizar pour réaliser des réformes qui relèvent dans le contexte marocain du champ exclusif du pouvoir.