A l'image des concerts de casseroles qui conspuent bruyamment le président français Emmanuel Macron depuis la promulgation de la réforme des retraites, ces "casserolades" rythment depuis près de 200 ans les manifestations à travers le monde.

Sous la monarchie de Juillet 

C'est en France, sous la monarchie de Juillet, au XIXe siècle, que les casseroles quittent pour la première fois les fourneaux pour battre le pavé politique.

A partir de 1832, des foules accueillent "à coups de casseroles, crécelles, sifflets, sonnettes et cornets à bouquin" des notables qu'ils considèrent comme des "traîtres à la cause du peuple", expliquait l'historien Emmanuel Fureix en 2017 sur la radio France Culture.

Ce phénomène s'inspire des "vieux charivaris traditionnels" du Moyen-Âge, qui sanctionnaient "au village les veufs remariés et autres maris cocus", d'après l'historien.

Les "casserolades" deviennent "cacerolazos" -

Plus d'un siècle plus tard, pendant la guerre d'Algérie (1954-1962), ce sont les partisans de l'Organisation armée secrète (OAS) qui font tinter leurs casseroles pour défendre l'Algérie française.

Les "casserolades" laissent place aux "cacerolazos" lorsqu'elles s'exportent en Amérique latine.

En 1971, des Chiliens de la bourgeoisie s'emparent de leurs casseroles pour protester contre les pénuries de nourriture sous le régime socialiste de Salvador Allende, avant le coup d'Etat de 1973. Des Chiliens des classes populaires protestent ensuite contre la dictature d'Augusto Pinochet, en plein couvre-feu, en faisant résonner les casseroles depuis chez eux.

Leurs voisins argentins font à leur tour tinter les casseroles, en 2001, pendant la grave crise économique qui frappe le pays et gèle l'épargne des classes moyennes.

Depuis, la casserole est devenu partout dans le monde un outil revendicatif, de la Birmanie au Canada.

Les "casseroles" de retour en France -

Les concerts de casseroles font un bruyant retour en France au cours des dernières décennies, pour vilipender réformes ou hommes politiques.

En 2017, pendant la campagne présidentielle, les meetings de l'homme politique de droite François Fillon sont perturbés par des "casserolades" d'opposants, faisant écho aux "casseroles" qu'il traîne et qui vont nuire à sa candidature.

L'ancien Premier ministre, qui termine troisième au premier tour de l'élection, fait face à une succession de révélations: emplois présumés fictifs de son épouse Penelope et de leurs aînés, prêt de 50.000 euros non déclaré d'un ami, costumes de luxe offerts par un autre ami. Le "Penelopegate" lui vaudra une condamnation à une peine de prison. Il s'est pourvu en Cassation.

Casseroles 2.0 

Les casseroles refont leur apparition en France en 2023 lors de la mobilisation contre l'impopulaire réforme des retraites d'Emmanuel Macron, qui fait passer de 62 à 64 ans l'âge légal de départ à la retraite.

Des concerts de casseroles sont organisés dans de nombreuses villes pendant l'allocution télévisée du président le lundi 17 avril après la promulgation de la loi.

Ce jeudi, les autorités ont interdit les "dispositifs sonores portatifs" en marge d'un déplacement d'Emmanuel Macron. Si la préfecture a assuré que cela ne concernait pas les casseroles, certaines ont tout de même été confisquées par les gendarmes.

Pas sûr que cela suffise à empêcher de futures "casserolades", qui ont désormais leurs applications pour smartphones, comme "iCacerolazo" et "Cassolada 2.0".