Tous les ingrédients d'une explosion sociale en Algérie sont réunis (politologue algérien)

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"Absorber la colère populaire avec un changement de gouvernement est une continuation des politiques de bouc émissaire’’ (Sofiane Sekhri).

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Alger - Tous les ingrédients d’une explosion sociale en Algérie sont réunis, a mis en garde le politologue algérien, Sofiane Sekhri.

"On ne règle pas une crise politique aussi complexe avec des élections législatives qui vont reproduire le même système", a insisté ce professeur en sciences politiques à l’université d’Alger, Sofiane Sekhri, qui est également militant politique, dans entretien au journal "Liberté".

Il a soutenu que le processus actuel sera un effet domino d’échecs avec des processus interconnectés, expliquant que dès lors qu’il y a eu échec de la présidentielle, du dialogue et de la révision de la Constitution, les élections législatives et locales seront forcément un échec.

Il a estimé que le "processus actuel se poursuivra de la même manière et engendrera les mêmes échecs".

"Absorber la colère populaire avec un changement de gouvernement est une continuation des politiques de bouc émissaire car l'échec du gouvernement est un échec du système", a-t-il dénoncé.

Selon lui, la situation actuelle représente une opportunité pour la majorité silencieuse et l'électorat, qui ont boycotté et rejeté la Constitution pour s'organiser sous une direction politique non partisane et s'établir comme un front populaire alternatif.

Revenant sur les consultations en cours pour l'organisation d'élections législatives et locales anticipées, le chercheur a noté qu'après le soulèvement populaire du 22 février 2019, qui a chassé le président Abdelaziz Bouteflika du pouvoir après 20 ans de règne, le peuple algérien ne fait plus confiance aux partis politiques.

Tout en qualifiant ces consultations avec ces partis de "provocation", il a souligné que ces partis politiques, aux yeux de la population, s’affichent dans l’optique de participer aux élections législatives où ils espèrent obtenir des quotas.

Le plus problématique est que cela se passe au moment où il y a une volonté de réinvestir la rue, fait-il observer, notant que pis encore, sur les réseaux sociaux, "il y a beaucoup de haine sociale qui s’exprime et qui nous éloigne des traditionnelles revendications sociales".

M. Sekhri a rappelé que les Algériens ont "assisté à un dialogue à sens unique", estimant que le pouvoir a refusé d’offrir aux Algériens ce contrat social, alors qu’il a compris que "le rejet de la population s’est exprimé soit par l’abstention, soit par le -non-" lors de la dernière consultation référendaire sur la Constitution.

Le politologue a estimé que la nouvelle Constitution n’a pas réglé le problème des équilibres des pouvoirs car "on ne s’est pas éloigné du pouvoir personnel. Bien au contraire".

Il a soutenu qu'on ne peut pas aller vers "une Algérie nouvelle" sans prendre compte de la majorité des Algériens, faisant état d'un "fossé entre le peuple et le pouvoir".

KA

Six collectifs appellent à "un changement démocratique radical" en Algérie

Six collectifs citoyens en Algérie ont plaidé en faveur d'un "processus de changement radical" dans le pays.

Il s’agit du Collectif des amis du manifeste pour l’Algérie nouvelle (Caman), du Collectif initiative citoyenne pour le changement (CICC), du Collectif de Montréal pour un congrès pour la citoyenneté (CMCC), du Noyau universitaire de réflexion (NUR Annaba), des Citoyens liés dans l’action et le changement (Clac) et de la Coordination nationale pour un congrès pour la citoyenneté (CNCC).

Dans une déclaration commune, ces collectifs citoyens exigent également la "levée de toute entrave aux libertés publiques, ainsi que l’abrogation de toutes les lois liberticides" tout en rendant "hommage à l’engagement du peuple algérien à poursuivre et à faire aboutir sa révolution citoyenne par tous les moyens pacifiques, et l’assurer d’être toujours dans ses rangs".

Ils ont réitéré, à la veille du deuxième anniversaire du Hirak déclenché le 22 février 2019, leur solidarité avec les détenus politiques et d’opinion en exigeant leur libération immédiate, leur réhabilitation morale et matérielle, ainsi que l’abandon des poursuites judiciaires à leur encontre.

Ils appellent, parallèlement, à la tenue d’une conférence nationale indépendante du système "en vue d’une transition démocratique vouée à un processus constituant souverain", seul moyen, soutiennent-ils, de "consacrer effectivement l’Etat de droit, civil, démocratique et social, la souveraineté populaire et une justice indépendante".

Revenant sur les consultations en cours entre le pouvoir et les partis politiques, les signataires de cette déclaration dénoncent "l’obstination des décideurs à aller à des élections, afin de renouveler, sans la participation de la population, les Assemblées nationale et locales".

Et de déplorer une "opération de charme" qui "s’attelle à corrompre une nouvelle fournée politique par les largesses financières, les quotas, la clientélisation et le corporatisme des générations et des genres, pour escamoter la problématique de l’indispensable changement radical du système politique".

Ils accusent, dans la foulée, les "partis politiques de succomber déjà à la tentation en se ruant à la curée dans le vain espoir d’enterrer le mouvement citoyen".

"Des figures dites emblématiques du Hirak, lesquelles s’opposent à toute forme d’auto-organisation nationale des citoyens, multiplient, en catimini, les rencontres en haut lieu et les offres de service, tout en continuant à chevaucher les mots d’ordre révolutionnaires", regrettent-ils.

Il s'agit d'autant d’événements assimilés à "de graves dérapages trahissant la vraie nature de ce front interne sur lequel s’accordent système autoritaire et islamistes à juguler, non pas des menaces externes, réelles ou supposées, mais le Hirak et sa demande d’un changement démocratique radical".

 

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