''Tu as changé le monde'': poignante cérémonie d'hommage à George Floyd

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"Tu as changé le monde George": le leader américain des droits civiques Al Sharpton a prononcé jeudi lors d'une cérémonie en hommage à George Floyd un émouvant éloge funèbre, aux accents politiques empreints de tristesse mais également d'espoir pour un monde meilleur, avec la promesse de "continuer le combat". 

Photos fournies par les autorités pénitentiaires locales des quatre policiers impliqués dans la mort de George Floyd

Famille, responsables religieux ou politiques et célébrités étaient rassemblés à l'université chrétienne North Central de Minneapolis pour honorer la mémoire de cet Afro-Américain, dont la mort à 46 ans sous le genou d'un policier blanc le 25 mai a déclenché une profonde vague de colère à travers les États-Unis.

La cérémonie, en présence de personnalités noires comme le rappeur T.I. ou le comique Kevin Hart, a commencé par une émouvante interprétation de "Amazing Grace" après que le maire, blanc, de Minneapolis s'est agenouillé en pleurs devant le cercueil.

Elle a notamment été marquée par une période de silence de 8 minutes et 46 secondes, le temps pendant lequel le policier Derek Chauvin est resté agenouillé sur le cou de George Floyd malgré ses supplications.  

Vue aérienne du mémorial dédié à George Floyd à Minneapolis (Minnesota), le 3 juin 2020

Prenant la parole, le frère du défunt, Philonise Floyd, a dénoncé sous les applaudissements "la pandémie de racisme et de discrimination" qui l'a emporté.

Le révérend Al Sharpton, figure du mouvement de défense des droits civiques, a prononcé un éloge funèbre très politique. 

"George Floyd ne devrait pas être parmi les morts. Il n'est pas mort d'un problème de santé commun. Il est mort d'un dysfonctionnement commun du système judiciaire américain", a-t-il déclaré, voyant dans le genou qui a écrasé le cou de George Floyd le symbole de l'oppression des Afro-Américains aux États-Unis. 

"Ce qui est arrivé à Floyd arrive tous les jours dans ce pays, dans les secteurs de l'éducation, des services de santé et dans tous les aspects de la vie américaine. Il est temps pour nous de nous lever en hommage à George et de dire 'Enlevez vos genoux de nos cous'", a-t-il proclamé, appelant la police à rendre des comptes.  

A Donald Trump, qui a fait évacuer manu militari les abords de la Maison Blanche lundi soir pour poser devant une église, bible à la main, le pasteur baptiste de 65 ans a conseillé d'"ouvrir la bible".

"Je prêche depuis mon plus jeune âge, et je n'ai jamais vu quelqu'un tenir une bible comme ça, mais passons", a-t-il dit.

Les messages du révérend a été parfaitement compris par les manifestants qui, au même moment, se trouvaient sur le mausolée improvisé dressé à l'endroit où George Floyd a été tué.  

"Il y a un genou sur le cou de l'Amérique noir", a déclaré à l'AFP Kayla Peterson, une responsable des ressources humaines de la banlieue de Minneapolis. "Nous n'avons jamais été réellement libres."

Pas d'incident majeur 

Filmée par une passante, la lente agonie du père de famille a provoqué un climat de tension que les Etats-Unis n'avaient plus connu depuis les années 1960 et le mouvement pour les droits civiques.

Des manifestations dégénérant parfois en pillages et violences se sont déroulées dans tout le pays pour dénoncer les brutalités policières, le racisme et les inégalités sociales exacerbées par la pandémie de Covid-19.

Alors que l'émotion dépassait les frontières des Etats-Unis, plusieurs grandes villes américaines ont décrété des couvre-feux nocturnes pour tenter de contenir les débordements. Jeudi, ils ont été levés à Los Angeles et Washington où des milliers de manifestants, toutes origines confondues, manifestaient pacifiquement dans le centre-ville.

Ces marches continuent à s'organiser à travers le pays et notamment à New York, où le maire a été hué par des manifestants qui lui reprochent de tolérer des interventions policières de plus en plus musclées.

La police a procédé au total ces derniers jours à près de 10.000 arrestations dans le pays, selon une estimation reprise par les médias américains.

Mais après plus d'une semaine de débordements, la situation semblait se calmer dans l'ensemble, les manifestants ayant obtenu une première "victoire" sur le plan judiciaire.

Comme ils le réclamaient, le procureur enquêtant sur la mort de George Floyd à Minneapolis a requalifié les faits en homicide volontaire, inculpant Derek Chauvin de "meurtre non prémédité" -- un chef passible de 40 années de réclusion -- et de complicité les trois autres agents présents. Ces derniers ont comparu au tribunal jeudi pour que leur caution soit fixée: entre 750.000 et 1 million de dollars chacun.

Accusé par l'opposition démocrate d'avoir jeté de l'huile sur le feu en menaçant d'avoir recours à l'armée pour mater la rue, Donald Trump continue à vouloir se montrer ferme. 

"L'ORDRE PUBLIC!", a-t-il encore tweeté jeudi au petit matin en lettres capitales dans ce qui sera certainement l'un des thèmes de sa campagne de réélection jusqu'à la présidentielle du 3 novembre.

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