Washington promet de défendre les droits humains ''partout'', en rupture avec Trump. Même en Israël ?

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Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken lors de la présentation du rapport annuel sur les droits humains, le 30 mars 2021 à Washington

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Le gouvernement de Joe Biden a promis mardi de défendre les droits humains "partout" dans le monde, y compris chez les partenaires des Etats-Unis, en marquant la rupture avec la diplomatie sélective et "silencieuse" de Donald Trump. De cette façon, les campagnes sur ce terrain contre le grand rival chinois et la Russie ennemie de toujours ne paraitra comme une exception à la règle.  Mais cette orientation risque de rencontrer ses limites quand il s’agira de juger la politique palestinienne d’Israël. Barak Obama, dont Biden était vice-président, eu à éprouver les limites israéliennes d’une politique des droits de l’Homme. Même le républicain Georges Bush et son secrétaire d’Etat, James Baker qui a initié en 1991, sans suites notables, la conférence de paix de Madrid, s’y sont heurtés.  

D’ici là, le secrétaire d'Etat Antony Blinken peut déplorer, en présentant le rapport annuel de la diplomatie américaine sur le sujet, que  "la tendance pour les droits humains continue d'aller dans la mauvaise direction" dans "toutes les régions du monde".

Blinken a particulièrement insisté sur "le génocide commis contre les Ouïghours majoritairement musulmans" dans la région chinoise du Xinjiang et sur la répression des forces armées birmanes contre les manifestants opposés au coup d'Etat de février. Mais il a aussi évoqué les "arrestations d'opposants" en Russie, la "violence contre les manifestants au Bélarus", les "abus infligés aux habitants du Yémen", les "atrocités" dans la région éthiopienne du Tigré, ou encore les "exécutions, disparitions forcées et actes de torture commis par le régime syrien".

Il n'a en revanche annoncé aucune nouvelle mesure punitive, alors que les sanctions imposées pour l'instant à la Chine ou à la Birmanie, par exemple, n'ont pas permis d'obtenir le moindre résultat -- au-delà de contre-sanctions de Pékin.

"Nous utiliserons tous les outils de notre diplomatie pour défendre les droits humains et tenir pour responsables ceux qui perpètrent des abus", a toutefois prévenu Antony Blinken, précisant que Washington tenterait toujours de mener des actions "à l'unisson" avec ses alliés, comme récemment contre la Russie, la Birmanie ou la Chine.

Surtout, il a assuré que l'administration Biden s'opposerait aux "violations des droits humains partout où elles se produisent et sans se soucier de savoir si les responsables sont des adversaires ou des partenaires".

"Certains affirment que les Etats-Unis ne doivent pas prendre la peine de défendre avec force les droits humains, ou que nous ne devrions souligner les abus que dans certains pays", a-t-il expliqué.

"Pas de hiérarchie" 

"Trop souvent ces dernières années", les "défenseurs des droits humains n'ont entendu que le silence de notre part", a-t-il poursuivi, dans une attaque contre la politique étrangère de son prédécesseur Mike Pompeo, avant de marteler: "Nous ne resterons pas silencieux".

Depuis son arrivée au pouvoir en janvier, le gouvernement démocrate a de fait tenté de montrer qu'il plaçait vraiment les droits humains au coeur de sa diplomatie, n'hésitant pas à dénoncer plusieurs décisions d'un pays allié comme la Turquie. Comme chaque année, le rapport annuel sur les droits humains énumère aussi des dérives chez d'autres partenaires-clés de Washington comme l'Egypte, l'Inde ou l'Arabie saoudite.

Mais lors d'un de ses premiers tests en la matière, le président Biden a aussi montré qu'il pouvait être rattrapé par d'autres exigences: s'il a publié comme promis le rapport du renseignement américain qui accuse ouvertement le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane d'avoir "validé" l'assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, il n'est pas allé jusqu'à sanctionner directement ce puissant dirigeant du royaume pétrolier. Une concession à la "realpolitik" qui a déçu de nombreuses personnalités démocrates, et pas seulement au sein de l'aile gauche.

Le nouveau président s'est néanmoins nettement démarqué de son prédécesseur républicain, qui avait refusé de  mettre en cause publiquement le prince "MBS" et qui, plus largement, n'a jamais fait des droits humains une priorité.

Antony Blinken a d'ailleurs critiqué l'ancien gouvernement de Donald Trump, et plus particulièrement Mike Pompeo, un fervent chrétien évangélique qui avait mis l'accent sur certains droits "inaliénables", notamment la liberté de religion, au détriment des droits des minorités sexuelles et du droit à l'avortement. 

Cet ultraconservateur avait créé une "commission des droits inaliénables" au sein du département d'Etat, que son successeur a démantelée.

"Il n'y a pas de hiérarchie qui rende certains droits plus importants que d'autres", a affirmé le secrétaire d'Etat, qui a fait de la défense des minorités sexuelles un axe fort de sa diplomatie, en assurant avoir "tourné la page de ces opinions partiales".

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