A la Conférence d’Anfa, Roosevelt façonnait le monde tel qu’il perdure encore, Sidi Mohammed Ben Youssef plaidait l’indépendance de son pays

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De G à D : le Sultan du Maroc Sidi Mohammed Ben Youssef, le président américain Franklin D. Roosevelt et le Premier ministre britannique Winston Churchill à la Conférence d’Anfa (Casablanca au Maroc), du14 au 24 janvier 1943. Derrière le souverain marocain on reconnait le Prince héritier Moulay El Hassan qui succédera à son père en 1961 sous le nom de Hassan II

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Par Hassan Zakariaa (avec MAP)

Du 14 au 24 janvier 1943, Casablanca a abrité la Conférence d’Anfa. Pour les alliés, en dehors de l’URSS, cette conférence est un peu le prélude de ce que sera à la fin de la deuxième guerre mondiale les accords de Yalta (4 au 11 1945) et esquissé de ce qu’a été le monde jusqu’à la chute du l’Union Soviétique au crépuscule de 1991.

La Conférence d'Anfa a été un tournant décisif pour la coordination alliée et le renforcement des relations internationales pendant la Seconde Guerre mondiale. Pour le Maroc, cet événement a mis en lumière son importance stratégique et a préparé le terrain pour son rôle futur dans la diplomatie mondiale. La rencontre entre Roosevelt et Mohammed V a également laissé une empreinte durable, préfigurant l'éveil politique du Maroc et son chemin vers l'indépendance.

Pour le président américain Franklin D. Roosevelt et les Etats Unis, elle a représenté l’affirmation du leadership américain qui dure à ce jour. La Conférence d'Anfa a ainsi été une opportunité pour Roosevelt de consolider le rôle des États-Unis en tant que leader des Alliés. En insistant sur la reddition inconditionnelle, il a, certes, affirmé l'engagement envers la victoire totale, mais surtout engagé son pays sur la voie de la suprématie que n’a pu lui contester pendant près d’un demi-siècle que l’URSS de Staline et de ses héritiers jusqu’à l’avènement de Michaël Gorbatchev et son cortège de Glasnost et de Perestroïka.

Pour le Maroc, hôte de la conférence, très présent à travers son sultan Mohammed Ben Youssef, qui deviendra à l’indépendance le Roi Mohammed VI, cet événement historique a non seulement ouvert la voie à l’indépendance du Royaume, mais consacré sa position géopolitique stratégique dans le monde. À travers l’intervention décisive du défunt sultan, qui désigna l’éminent juge et savant Sidi Mohammed Bendriss Alaoui, alias le Cadi Bendriss, à la tête du comité d’organisation, et grâce au soutien des États-Unis, la conférence d’Anfa incarna un tournant pour le Maroc, mais aussi pour l’ordre mondial d’après-guerre.

La conférence d’Anfa s’est tenue dans le contexte d’une guerre mondiale à son paroxysme. Elle a été une réunion de concertation des Alliés portée par des personnalités qui ont marqué le cours de l’histoire : le président américain Franklin D. Roosevelt, le Premier ministre britannique Winston Churchill et les Français Charles de Gaulle et Henri Giraud, généraux d’une France occupée par l’Allemagne et engagée dans une guerre féroce pour sa libération.

Au-delà des questions stratégiques militaires, cet événement a eu un impact majeur sur la diplomatie marocaine et a servi de tremplin pour l’indépendance du Royaume. Le choix de Casablanca pour cette rencontre n’était pas anodin. Stratégiquement situé entre l’Europe, l’Afrique et les Amériques, le Maroc offrait une plateforme idéale pour coordonner les efforts des Alliés contre les pays de l’Axe, notamment après le débarquement des forces alliées en Afrique du Nord, lors de l’opération Torch en novembre 1942.

Le Sultan Mohammed Ben Youssef a su habilement saisir l’opportunité de cette rencontre et exploiter les ambitions de puissance de Washington pour exprimer les aspirations du peuple marocain à l’indépendance. Le 22 janvier 1943, lors de sa rencontre avec le président Roosevelt, il plaida en faveur de la libération du Maroc du joug colonial, tout en proposant que le Royaume adhère à la Charte Atlantique, un document fondamental dans l’édification de l’ordre mondial post-guerre.

Cette initiative de Mohammed V a aussi marqué un moment clé dans les relations entre le Maroc et les États-Unis. Roosevelt, en apportant son soutien à la cause nationale du Maroc, a non seulement renforcé la légitimé des revendications d’indépendance, mais a aussi ouvert la voie à une relation stratégique durable entre le Maroc et l’une des grandes puissances mondiales de l’époque.

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