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ELECTIONS DE 2021 : LE CASSE-TETE…
Tout paraît se passer comme si El Othmani et sa formation islamiste campaient dans une sorte de « bunker » face à tous les autres partis
Parler des élections prévues en 2021 peut paraître passablement décalé aujourd’hui en ces temps de pandémie. Qui a en effet en tête cet agenda ? Les citoyens n’ont en cure, confrontés qu’ils sont à des incertitudes majeures quant à l’évolution de la COVID-19. Rien de bien certain ne peut être avancé à ce sujet. Un paramètre pesant aussi sur les pouvoirs publics et en particulier sur les partis.
Pour autant, faut-il rester au milieu du gué et suspendre le processus d’organisation et de préparation de ces élections ? Trois partis d’opposition (PI, PPS et PAM) multiplient ces temps-ci l’interpellation du Chef du gouvernement, Saâdeddine El Othmani pour une relance des consultations devant conduire à un accord, autant que faire se peut, sur les lois électorales de 2021. Ils relèvent, pour mieux le souligner, que la dernière réunion entre les dirigeants des partis et le chef de l’exécutif remonte à plus de trois mois - le 15 octobre, plus précisément… ; et qu’il y a lieu de finaliser cette concertation, d’une manière ou d’une autre, sans plus tarder.
Ils invoquent le fait qu’un tel retard, s’apparentant à un « gel », ne peut que peser à terme sur les conditions des prochains scrutins en n’offrant pas d’ores et déjà un cadre de mobilisation et un point de focalisation de l’année politique en cours. Le Parlement achève dans les prochains jours sa session ordinaire d’automne ouverte le 9 octobre dernier. Faudra-t-il prévoir alors, dans les prochaines semaines, une session extraordinaire ? Ou bien faut-il attendre la session de printemps, débutant le 9 avril, pour inscrire les textes en instance à l’ordre du jour de l’examen et de l’approbation parlementaire avec une certaine précipitation ? En l’état, aujourd’hui, force est de faire ce constat : un consensus, même laborieux, a fini par prévaloir à l’issue de la dernière réunion du mois d’octobre dernier. Trois problèmes particuliers étaient restés ouverts, sans accord : le quotient électoral, le format de la liste féminine et le maintien ou non de la liste des jeunes.
Mais pourquoi El Othmani ne prend pas en mains cette situation ? Ou bien, il réactive les concertations pratiquement en panne ; ou bien, il fait adopter en conseil de gouvernement les différents projets de loi au Parlement pour leur adoption, celle-ci n’excluant pas évidemment des amendements approuvés. Mais un vote majoritaire est-il assuré ? Le PJD s’accroche au quotient électoral estimant que son abaissement de 6% à 3% le vise en particulier : ses simulations font même état d’une perte de 20 à 30 sièges.
Tout paraît se passer comme si El Othmani et sa formation islamiste campaient dans une sorte de « bunker » face à tous les autres. Avec ses alliés de la majorité actuelle formée en avril 2017, ses rapports ne sont pas au mieux : tant s’en faut. Ni le RNI de Aziz Akhannouch, ni le MP de Mohand Laenser, ni l’UC de Mohamed Sajid, ni l’USFP de Driss Lachgar ne se félicitent des relations avec lui ; l’interpellation publique, parlementaire et autre, est plutôt le lot commun de ces quatre formations. A telle enseigne que la Charte de la majorité, signée à Rabat, le 21 février 2018, n’a pas vraiment conduit à une coordination ou à une solidarité. Les cinq signataires n’arrivent même plus à se réunir…
De quoi faire le miel des partis d’opposition en embuscade. La formation istiqlalienne, conduite par Nizar Baraka, a entrepris une longue marche, depuis son élection comme secrétaire général, voici plus de trois ans, le 7 octobre 2017. Un travail de reconquête du terrain perdu, de rassemblement, de mise en avant par touches successives d’un véritable programme alternatif.
Le PPS de Mohamed-Nabil Benabdallah, qui a rejoint l’opposition en octobre 2019, accentue depuis sa critique et sa censure du cabinet El Othmani lui reprochant d’esquiver les débats de fond portant sur les politiques publiques et les défis de l’heure. Quant au PAM, dirigé par Abdellatif Ouahbi, nouveau secrétaire général depuis février 2020, il met en avant en effet sa qualité de parti désormais « normal », sans exclusive comme par le passé à l’endroit du PJD, ouvert à une formule majoritaire où il aurait sa place après 2021. Du coup, il s’est rapproché du PI et du PPS, sur une base d’une concertation régulière paraissant peut-être préfigurer, peu ou prou, une ébauche constitutive des contours d’une nouvelle majorité.
Cela dit, en laissant de côté des plans sur la comète, cette dernière interrogation : comment arriver aux élections de 2021 ? Dans quel état aussi ? Et d’abord ceci : le calendrier sera-t-il maintenu ? Sauf contrainte majeure liée à la pandémie, la réponse affirmative est retenue. Mais alors, que fait-on dans cette perspective ? Ce n’est pas qu’une affaire de textes législatifs dans les prochains mois. Ce qui est cause va sans doute bien au-delà. La fin d’une législature et d’un mandat gouvernemental doit être en effet l’occasion pour évaluer le chemin parcouru, les avancées et les retards voire les échecs.
Le bilan donc, mais aussi les perspectives d’avenir tant pour ce qui est d’un nouveau modèle de développement que des enjeux pesant sur le politique (instituions, partis, mobilisation des électeurs, gouvernance,…). Une transition démocratique et politique est en marche ; elle est heurtée sans doute ; mais elle participe d’un projet de société adossé au Nouveau Règne. Il faut œuvrer à restaurer la confiance des citoyens pour conforter les réformes et bénéficier d’un large soutien populaire. El Othmani appréhende-t-il tout cela de manière conséquente ? Pour l’heure, et au vu de son mandat de près de quatre ans, rien de bien probant à cet égard…Il veille surtout à gérer, à sanctuariser surtout son statut et le périmètre de son parti avec cette ambition et ce rêve : préempter… une troisième législature !