La prochaine résolution du CS de l’ONU signera-t-elle la fin des chimères algériennes ? Par Bilal TALIDI

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Désarçonnée par le changement de la position espagnole, l’Algérie va sans doute réévaluer la situation et essayer trouver des artifices pour faire passer l’amer la pilule en interne. Une tâche d’autant plus difficile que « l’Algérie nouvelle’’ de Abdelmadjid Tebboune, et dans son sillage Ramtan Lamamra, a chevauché allègrement sur la fin de la régression de la diplomatie algérienne et son retour en force sur la scène internationale !

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Personne ne saurait minorer les acquis importants réalisés par la diplomatie marocaine dans le dossier du Sahara. Sans conteste, c’est un succès diplomatique remarquable que même les adversaires de l’intégrité territoriale ont été contraints de reconnaître, non sans amertume, tant sont réelles ses conséquences sur la crise de la diplomatie hostile aux intérêts vitaux du Royaume.

 

Dans son premier épisode, la diplomatie algérienne a tenté les de semer le doute sur la pérennité de la position américaine, cherchant à installer le scepticisme quant au maintien de l’administration Joe Biden de la reconnaissance par l’administration de son prédécesseur Donald Trump de la souveraineté pleine et entière du Maroc sur son Sahara. Pour pousser la nouvelle administration à revenir sur cette reconnaissance, des lobbys[NK1]  pro-algériens au Congrès ont été actionnés, mais leur travail s’est vite avéré limité et sans impact conséquent, faute d’un large soutien et d’une vraie influence.

On tenta en même temps de mettre à profit la phase de flottement qui semblait marquer les débuts de la nouvelle administration pour faire croire à une volonté de révision de la position américaine et de retrait de la reconnaissance par Washington de la souveraineté du Maroc sur son Sahara. Mais ce travail d’intoxication et de pollution s’est sèchement brisé sur les déclarations décisives de représentants de l’administration américaine et des porte-parole du Département d’Etat qui, non seulement confirment l’attachement de l’administration actuelle à la position de sa précédente, mais construisent sur son socle des enjeux stratégiques, commerciaux et sécuritaires dans la région, reconnaissant le rôle axial du Maroc dans cette orientation.

Parallèlement, Alger a tenté de s’engouffrer dans la brèche des relations maroco-européennes, en essayant d’exploiter les tensions entre Rabat et Berlin et Rabat et Madrid, en vue de présenter le Maroc comme un pays en conflit global avec l’Europe. Ad nauseam, Alger a agitéla carte de l’immigration clandestine que le Maroc utiliserait, selon ses dires, comme un moyen de chantage dans ses rapports avec l’Europe. L’argumentaire ainsi développé cherchait à ancrer l’idée que les relations du Royaume avec l’Europe ne seraient pas basées sur l’engagement, le partenariat et la coopération, mais plutôt sur le chantage et la tromperie !

Ne pouvant admettre au départ un changement dans la position allemande, Alger s’est livré à une fastidieuse herméneutique des termes et expressions contenues dans la déclaration du ministère allemand des Affaires étrangères pour en déduire que l’Allemagne, toujours attachée aux mêmes constantes dans son rapport à la question du Sahara, n’a guère changé de position. Mais Alger, à sa grande surprise, devait se rendre à l’évidence. Il n’assistait pas uniquement à un véritable changement dans la position de Berlin, mais au développement d’ententes stratégiques, économiques et commerciales dont l’évolution de l’attitude berlinoise était le signe précurseur.

Mauvaise appréciation

Dans une approche similaire et tout aussi erronée, Alger a pensé que l’Espagne ne changera jamais de position, que sa doctrine à l’égard du Sahara restera immuable, et qu’elle ne peut s’immoler sur l’autel du Maroc, et sacrifier sa relation stratégique avec le pays qui l’approvisionne en gaz naturel. La guerre russe en Ukraine l’a conforté dans cette appréciation lui faisant croire qu’elle allait accentuer la dépendance de l’Espagne à son égard, et que la quête en Europe de nouvelles alternatives au gaz russe, au cas où Moscou venait à actionner la carte du gaz dans ce conflit, ne laisserait d’autre choix à Madrid que de venir s’approvisionner en Algérie.

A sa grande surprise, l’annonce par Madrid d’une notable évolution de sa position sur le Sahara, a rebattu les cartes repositionnant Alger dans sa véritable dimension actuelle. L’expression de son ralliement aux positions que le Maroc a longtemps appelé à respecter, dont l’impératif de se comporter avec Rabat en partenaire et de ne pas agir unilatérales de manière à porter atteinte aux intérêts vitaux du Royaume du Maroc, a faussé tous les calculs algériens.

L’Algérie, et dans son sillage le Polisario, viennent de perdre leur dernier allié dans la thèse séparatiste à travers un infaisable référendum d’autodétermination, suite au changement des positions de Berlin et de Madrid, mais aussi après que le renforcement des relations de Rabat avec Moscou et Pékin.

Les Russes, qui doivent apprécier à sa juste valeur la position lucide et intelligente du Maroc à l’égard de la guerre en Ukraine, seront sans doute moins enclins à entraver la recherche d’une solution politique sur la base de la proposition marocaine d’autonomie.

Le prix des déboires : la tête de Lamamra

Désarçonnée par le changement de la position espagnole, l’Algérie va sans doute réévaluer la situation et essayer trouver des artifices pour faire passer l’amer la pilule en interne. Une tâche d’autant plus difficile que « l’Algérie nouvelle’’ de Abdelmadjid Tebboune a chevauché allègrement sur la fin de la régression de la diplomatie algérienne et son retour en force sur la scène internationale !

Mais à l’évidence, la diplomatie active annoncée en grande pompe s’est heurtée aux nouvelles réalités géopolitiques sur tous les fronts. Ainsi en est-il de la gestion des rapports de l’Algérie avec l’Espagne et la France, du dossier de la médiation entre l’Egypte et l’Ethiopie, des dossiers libyen et tunisien, outre ses relations avec le Maroc et la question du Sahara, et, last but not least, l’échec d’Alger à organiser le Sommet arabe, initialement prévu courant mars.

L’opinion publique algérienne n’est pas prédisposée à avaler autant de couleuvres et ne demandera pas moins pour le moment que la tête du ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra. Reste à savoir si le régime va dans l’immédiat prendre cette décision qui signerait son propre échec ?

Alger est également appelé, mais en sera-t-il capable ?, à rompre avec la diplomatie de la fanfaronnade oiseuse, en opérant des changements radicaux dans la structure de l’appareil diplomatique du pays pour lui permette de mieux saisir les mutations en cours, au lieu de s’obstiner à dilapider les opportunités précieuses qui se présentent, les transformant sottement en facteurs déstabilisateurs des relations diplomatiques de l’Algérie.

Pressions sur l’Europe, strabisme à Alger

Pays de gaz et de pétrole, l’Algérie connaît les besoins de l’Europe en cette période difficile, mais ne semble pas avoir pris la mesure des défis auxquels le Vieux continent est actuellement confronté particulièrement en besoins en énergie, et encore moins l’ampleur des pressions qu’exerce Washington sur l’Europe pour l’amener à se passer des ressources énergétiques russes. L’Europe, dans l’évaluation actuelle de ses besoins énergétiques, est dans une posture où elle a besoin de l’afflux du gaz algérien en quantités suffisantes, prête à exploiter toutes les possibilités techniques et logistiques et à utiliser tous les oléoducs disponibles. Et peu lui importent la décision d’Alger d’arrêter l’exploitation du gazoduc Maghreb-Europe, son différend avec Rabat ou encore sa position relative à la question du Sahara

En lieu et place, Alger demeure recroquevillé sur des calculs, obnubilé par le déterminant Maroc au point d’en oublier les profondes mutations que connait le monde. Et ne donne pas l’impression de comprendre que l’Algérie a autant besoin des devises européennes que l’Europe de gaz algérien si tant est qu’il peut combler la demande. Ce qui est loin d’être le cas.

Immuniser le succès diplomatique

Le succès diplomatique du Maroc et son onde de choc à Alger devraient naturellement inciter Rabat à la plus grande prudence à terme. La manne financière engrangée par l’Algérie des recettes de pétrole et de gaz, dont les cours ont culminé sur les marchés mondiaux, même si par ailleurs l’inflation à l’échelle mondiale en limite les retombées sur un pays aux besoins énormes en importations, impliquent une multiplication des défis pour le Maroc. L’expérience confirme, en effet, que les relations maroco-mauritaniennes ne sont pas à l’abri des périodes d’opulence financière à Alger. Les défis de la sécurité alimentaire peuvent également provoquer des situations dramatiques chez le voisin du Sud, ce qui risquerait d’élargir la marge de manœuvre du voisin de l’Est.

D’aucuns pourraient minimiser l’ampleur d’un pareil défi, estimant que le Maroc a tranché la question du Sahara avec le club des grands, et que la prochaine résolution du Conseil de sécurité sur la question du Sahara n’aurait besoin, au mieux, que d’une nouvelle résolution qui renforcera la résolution 2602, pour mettre un terme définitif aux convoitises et aux chimères d’Alger. Toutefois le Maroc se doit de rester en état de vigilance sans sous-estimation d’une quelconque brèche d’où pourrait surgir un quelconque ennui, et de consolider la coopération stratégique avec la Mauritanie, pour prémunir ce pays contre la tentation algérienne.

 

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