Politique
L’interdiction comme religion
Peut-on avoir comme trouble obsessionnel compulsif l?envie it?rative d?interdire?? Adorer la prohibition au point de la sublimer, de l??riger en id?al absolu, en finalit? ultime, en raison d??tre et en objet d?autor?alisation sociale?? On me dira qu?? ce stade l?, le sujet devient maladif. Sans doute. Ce qui n?est certainement pas le cas de Mustapha El Khalfi, ministre de la communication, porte-parole du gouvernement. L?interdiction chez lui n?est pas une maladie, mais une religion. Le halal est clair et le haram l?est tout autant. Ou vous avez la foi ou vous ne l?avez pas. Il a interdit Mach loved et ?rig? son acte en d?cision de souverainet?. R?sultat, on ne parle que de ce film et partout. Nabil Ayouch, son r?alisateur, qui se pavane ? Tunis ? l?occasion du festival de Carthage au milieu d?une demi-douzaine de gardes du corps. Il nous fallait notre Salman Rushdi, d?sormais on n?a plus l?Iran ? envier. Si ?a ne tenait qu?? Mustapha El Khalfi, Mawazine et tout ce qui lui ressemble n?existeraient plus. Son r?ve c?est d?en finir avec son cauchemar, 2M. Ce qui est bien avec le porte-parole du gouvernement c?est qu?il s?assume et revendique sur le ton des p?remptoires ses interdictions comme un bilan de bonne gouvernance. On pr?te ? Lyautey cet aphorisme?: Au Maroc, gouverner c?est pleuvoir. Avec Mustapha El Khalfi, gouverner c?est interdire. Son projet de code de la presse ne r?jouit pas la profession, journalistes comme patrons. Journalistes et patrons de presse m?me combat. Il n?y a que le ministre de la communication pour fusionner contre lui les par d?finition antagonistes.
En Aout 2015, par un amendement de la loi 77.03 sur l?audiovisuel, il a interdit dans l?audiovisuel public et priv? la publicit? des jeux de hasard. Un double appauvrissement?: Celui des op?rateurs t?l? et radio et celui des soci?t?s, publiques, qui g?rent les jeux en en affaiblissant l?impact. En cons?quence un manque ? gagner pour les caisses de l?Etat. Elles sont trois entreprises ? op?rer dans ce secteur?: La Soci?t? Royale d?Encouragement du Cheval (SOREC), la Marocaine des Jeux et des Sports (MJDS) et la Soci?t? de Gestion de la Loterie Nationale (SGLN). Entre 2010 et 2015 ils ont vers? aux imp?ts pr?s de 5 milliards de dirhams. Presque 4 autres milliards sont all?s au soutien des sports et des actions sociales. Chacun connait les soubassements id?ologiques de l?action de Mustapha El Khalfi. Mais depuis sa m?saventure avec les cahiers des charges de la SNRT et de 2 M, il avance masqu?. Son plaidoyer ferait couler des larmes ? la veuve et ? l?orphelin. N?agit-il pas pour la protection des enfants et ne lutte-il pas ainsi contre les risques d?addiction aux jeux?? Et cite des pays o? ce type d?interdiction existerait. La France et la Turquie sont ses mod?les pr?f?r?s. Or rien n?est moins vrai. Mais il n?est pas ? un faux et usage de faux pr?s. Sa prochaine ?tape est fort probablement la presse papier. Pour l?instant c?est la pub audio et audiovisuelle sur Internet qui passe ? la casserole. Une d?cision qui revient ? interdire un jeu de hasard dans un casino ? ciel ouvert.
PS?: L?interdiction ou l?affaiblissement des jeux de hasard l?gaux ouvre la voix, comme dans toutes les situations de prohibition, aux jeux clandestins avec tout ce que ?a comporte comme blanchiment d?argent, organisation de gangs et menaces sur la s?curit? et l?ordre public. J?y reviendrai.