Politique
Le programme électoral du PPS : méthodologie et originalité - Par Abdeslam Seddiki
Nabil Benabdellah, secrétaire général du PPS
Le PPS vient de rendre public son programme électoral national sur la base duquel il va mener la campagne pour les législatives pour essayer d’en convaincre les électrices et électeurs à voter en faveur de ses candidates et candidats. Ce faisant, le parti est resté fidèle à sa pratique puisqu’à l’occasion de chaque élection ou de ses assises nationales, il a toujours veillé à dévoiler son programme et sa ligne politique. Il le fait par respect à l’intelligence collective de notre peuple et par souci de donner de la crédibilité à l’action politique.
A travers toutes ces étapes, on relève des constantes et des changements/adaptations. Les constantes résident essentiellement dans la méthodologie et les fondamentaux du parti qui sont des invariants relevant de son identité en tant que parti national, progressiste, de gauche et démocratique. A ce titre, Il est toujours le même, mais comme tout être vivant, il subit des « métamorphoses » à travers ses adaptations aux différents contextes historiques et à l’évolution du monde autour de nous. Cette dialectique entre l’invariant et le nouveau est présente dans ses différents documents et d’une façon plus visible dans l’actuel programme électoral.
Au niveau de la méthodologie, qui est un élément distinctif de l’identité du parti, elle consiste à faire une analyse concrète d’une situation concrète. Le concret est le point de départ et le point d’arrivée. A ce dernier stade, il ne s’agit pas d’un concret superficiel et banal, mais d’un « concret pensé » qui a fait l’objet d’un questionnement intellectuel. De même, le parti privilégie l’approche globale aux analyses fragmentées et parcellisées en partant du fait que la réalité sociale (disons la formation sociale) est une totalité indivisible où le politique, le social, le culturel et l’économique s’interférent dans une combinatoire d’ensemble à tel point qu’il est difficile, voire arbitraire, de les dissocier. Leur présentation successive dans le texte est un exercice de pure forme qui n’altère nullement cette exigence méthodologique.
Il en est de même des fondamentaux du parti et de son positionnement politique. Il est et restera toujours un parti de gauche et socialiste, attaché aux valeurs de la justice sociale à la défense des travailleurs et couches défavorisées de la société, l’intégrité territoriale, la souveraineté économique, la défense de la démocratie et l’élargissement des libertés individuelles et collectives, l’attachement indéfectible aux valeurs de modernité, de progrès et d’égalité. Il le fait d’une façon créative en s’adaptant aux exigences du moment et en récusant toute vision dogmatique, toute attitude sectaire ou verbiage pseudo-révolutionnaire qui l’isolerait du peuple et des masses populaires qu’il ambitionne de défendre.
Partant de cette vision, le programme électoral du PPS est décliné sous forme d’un triptyque : développement, droits humains et démocratie. Ainsi, pas de développement sans une véritable démocratie et un respect des droits humains tels qu’ils sont universellement reconnus. L’économie est vue non seulement comme un moyen de créer des richesses à travers l’accumulation du capital et l’enrichissement de certaines catégories de la société, mais plutôt comme un acte réfléchi et conscient de la collectivité visant à améliorer le niveau de vie des citoyens et à rendre la vie simple et agréable à travers une répartition équitable des fruits de la croissance et une humanisation des rapports sociaux de production. Pour y parvenir, l’ensemble des acteurs doivent concourir à la réalisation de cet objectif. L’Etat d’abord qui se voit assumer une triple fonction : régulation, production des biens collectifs (éducation, santé, infrastructure..) et investissement dans les secteurs stratégiques d’avenir. L’entreprise privée ensuite, dont le rôle demeure essentiel dans l’étape historique que nous traversons, est appelée à effectuer une véritable mue et à changer son comportement spéculatif et rentier pour devenir une entreprise citoyenne créatrice de richesses, respectueuse des normes sociales et écologiques. Les partenaires sociaux, enfin, qui sont nécessaires à la stabilité sociale et à la création d’un climat propice au développement des affaires, doivent bénéficier d’un environnement favorable à la concertation et au dialogue social. Le tout sera couronné par l’adoption d’un pacte social de progrès qui concilierait compétitivité économique, efficacité sociale et respect des droits fondamentaux des travailleurs.
Jaloux de notre indépendance, le parti a fait du concept de souveraineté l’épine dorsale de son programme. Une souveraineté tous azimuts et à tourtes épreuves, qui ne signifie nullement autosuffisance et encore moins autarcie. Ainsi est-il question : de souveraineté alimentaire qui passe par la révision en profondeur de nos choix agricoles et de la gestion de nos ressources halieutiques ; de souveraineté industrielle qui nécessite le repositionnent du Maroc sur des filières basées sur l’usage intensif de la technologie et l’investissement massif dans la recherche scientifique, l’innovation et la valorisation de la force de travail en passant du travail simple au travail complexe ; de souveraineté sanitaire en développant une industrie pharmaceutique nationale ; de souveraineté/sécurité hydrique en mobilisant rationnellement nos ressources pour assurer l’approvisionnement régulier, et à des prix abordables, de la population en eau potable ; de souveraineté énergétique en mettant le paquet sur la production des énergies renouvelables et la transition énergétique ….Dans le même ordre d’idée, le PPS fait sienne la proposition consistant à « produire marocain et consommer marocain ». Mais il faut en assumer les conséquences notamment en matière de financement. Ce « patriotisme économique » a nécessairement un coût que la collectivité doit supporter dans son ensemble. D’où la nécessité de mobiliser suffisamment de ressources domestiques pour ne pas rester à la merci du capital international. Ce qui ne veut pas dire là aussi qu’il faille couper définitivement le cordon ombilical avec les milieux financiers internationaux. Au contraire, notre pays a tout à gagner en nouant des partenariats avec différents pays et en diversifiant ses relations sur la base du principe « gagnant-gagnant ».
On le voit, le programme électoral du PPS est d’abord une vision sur le Maroc post-covid. C’est un programme à la fois ambitieux et réaliste. Ambitieux car il s’inscrit dans une trajectoire ascendante de progrès économique et d’émancipation sociale. Réaliste dans la mesure où il tient compte des moyens dont dispose notre pays et des moyens susceptibles d’être mobilisés à court et moyen termes. Bref, c’est un programme mobilisateur qui ouvre des perspectives à notre jeunesse et lui apporte une dose d’espoir qui l’inciterait à s’engager davantage dans la vie politique et rétablir ainsi la confiance dans le pays et ses institutions.