Politique
Partielle d’Errachidia : est-ce un indicateur du recul du PJD ?
Habib Choubani, président du conseil régional de Drâa-Tafilalet
Peut-on évaluer correctement la popularité d’un parti à partir de résultats d’élections législatives partielles ? De prime abord, non. Ce type de scrutin est généralement marqué par le recul de la participation et ne peut en conséquence constituer un indicateur significatif de la popularité d’une formation politique, même lorsque la défaite à ces élections revêt un caractère répétitif.
Ce point de vue est encore plus pertinent quand il s’agit de mesurer la popularité du PJD qui a perdu plus qu’il n’a gagné dans les partielles sans que cela n’entame sa courbe ascendante depuis les législatives de 1997.
Mais à Errachidia, les choses se présentent différemment.
D’abord parce que cette circonscription est un bastion électorale du PJD, censé être d’autant plus solide que le parti jouit sur place du soutien de son partenaire électoral et bras doctrinal, le Mouvement Unicité et Réforme connu pour avoir une forte influence dans la région.
Ensuite parce que cette circonscription est le centre d’une région qui connait une confrontation notable avec l’Administration territoriale accusée de bloquer le projet de développement de cette région. En règle générale, ce type de confrontation se répercute favorablement sur les urnes aux dépends de l’Administration.
Enfin, parce que l’Administration territoriale a géré les partielles de manière professionnelle et aucune violation qui permettrait leur contestation politique n’a été enregistrée.
Dans ces conditions, un seul constat s’impose : c’est la victoire de la tribu sur le PJD. Un bémol toutefois : le parti a obtenu plus de 9 mille voix et l’écart avec le vainqueur n’étant pas grand, signifie que la machine électorale n’a pas beaucoup perdu de son efficacité. Ce qui n’empêche pas qu’il a perdu un siège parlementaire et beaucoup de ses soutiens, notamment en milieu urbain.
Aux élections précédentes, le PJD avait a réussi à pénétrer le milieu rural que Remy Leveau désignait comme le « domaine réservé » dont l’Administration territoriale façonnait à sa guise les voix et les élus. Mais à l’occasion de ces partielles, la région a recouvré sa « normalité » et le « domaine réservé » sa dynamique traditionnelle. La tribu, dont certaines composantes avaient fourni de nombreux services au PJD, est revenu à son système traditionnel comme une unité indépendante du parti, mobilisant la collectivité contre « l’étranger » qui n’a été capable ni d’amener le développement à la ville ni de fonder des relations constructives avec l’Administration, qui l’inciteraient à lever son blocage du projet de développement de la région.
Toutes les données descriptives confirment cette analyse. Les chiffres montrent que la plupart des voix perdues l’ont été en milieu urbain, et les données du terrain indiquent que la structure du PJD n’a pas fonctionné avec la même cohésion et la même efficacité que lors des scrutins précédents.
Il n’y a pas mille et une explications à ces deux phénomènes déterminants. Une évaluation interne considère que la gestion de la direction de plusieurs rendez-vous politiques, notamment à l’occasion de la francisation de l’enseignement et de la normalisation avec Israël, a ramolli les bases électorales du parti, voire qu’elle a déteint négativement sur l’efficacité et l’engagement du MUR local dans cette partielle. Un autre point de vue estime qu’une direction qui n’a été d’aucune utilité, fut-ce par le soutien, dans la confrontation avec l’Administration sur le projet de développement de la région et de la ville, ne pouvait susciter l’adhésion de l’électorat.
Cela dit, il ne faut pas faire du recul du PJD à Errachidia le signe précurseur d’une défaite inéluctable aux échéances électorales prochaines. Car tout ce qu’indiquent les résultats de ces partielles c’est une démoralisation de l’électorat et un relâchement dans les structures électorales du parti à cause d’une mauvaise gestion politique. C’est en somme une mauvaise passe que le PJD, qui s’oriente vers la réparation de la panne de sa direction, peut rattraper, fut-il partiellement.