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A l'Ecole royale (2/3) – Par Seddik Maaninou
Sur cette photo on reconnait Sidi Mohammed, alors Prince héritier, au fond au milieu de Fadel Beniaich (à sa droite) et (à sa gauche) Driss Ait Mbarek, au-devant la photo Samir Lyazidi
Avant de rejoindre Almadrassa Almawlaouia, le Prince héritier Sidi Mohammed a rejoint l’école coranique le "Mssid", dans l’enceinte même du palais royal. Tout au long de sa scolarité, il a continué à mémoriser le Coran et à écouter sa récitation, ce qui l'a maintenu constamment en contact avec le Livre Saint. Les études dans le Mssid se faisaient selon la méthode traditionnelle marocaine, comme l'ont fait les sultans du Maroc à travers les âges.
Après deux ans, le prince a rejoint le cycle primaire, d'abord dans des classes à l'intérieur du palais, puis au Collège royale, que Hassan II avait dotée d'enseignants qualifiés. Ces enseignants étaient marocains et étrangers. Dans cette école, le prince était entouré d'un groupe d'élèves choisis par le roi pour l’accompagner dans son parcours scolaire. Ces élèves, provenaient de diverses régions du Maroc et de milieux populaires et moyens. Ils étaient sélectionnés pour permettre au prince héritier de vivre avec les enfants du peuple et de tisser des liens d'amitié et de camaraderie avec eux, l'aidant ainsi à comprendre leurs conditions et leurs modes de vie familiaux et se saisir ainsi des réalités marocaines.
Mohammed V a fondé l'école royale au début des années 1940, en en faisant une institution éducative pour ses enfants. Par cette initiative, Mohammed V a été le premier roi marocain à créer une école moderne au sein du palais, ouverte aux cultures humaines tout en préservant les traditions marocaines. Dans cette école, Hassan II et son frère le prince Moulay Abdallah ont étudié, et ainsi le destin a voulu que le prince Sidi Mohammed et son frère le prince Moulay Rachid y étudient également.
La prière du vendredi
Le Prince héritier et ses camarades internes suivaient un régime de vie et d'étude strict à l'école, y passant toute la semaine sans la quitter, sauf le dimanche matin pour y revenir le même soir. Le vendredi, le prince et ses amis se rendaient à la mosquée Ahl fass située dans l'enceinte du Méchouar qui abrite également le Palais. Vêtus de l'habit traditionnel marocain : djellaba blanche, tarbouche rouge et les babouches jaunes, ils montaient à bord d'un bus qui les emmenait à la mosquée et les ramenait à l'école après l’accomplissement de la prière.
Les journées débutaient à 6h30 pour le prince et ses camarades, qui se rendaien au Mssid. Ils rejoignaient ensuite dans la cour de l'école pour assister à la cérémonie de lever du drapeau national. Chaque matin, le drapeau était levé et abaissé selon le même cérémonial à la fin des cours. Un des élèves était désigné pour le récupérer avec le respect dû pour le remettre à sa place réservée dans l’école, en attendant de le hisser à nouveau le lendemain.
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Immédiatement après le lever du drapeau, tout le monde prenait le petit-déjeuner, puis les cours commençaient à 8h00 et se poursuivaient jusqu'à midi. Après le déjeuner, les cours reprenaient et se poursuivaient jusqu'à 18h00.
Le roi suivait avec attention les cours et les programmes et orientait les professeurs, aussi bien pour le prince héritier que pour son frère Moulay Rachid, qui était également interne avec ses camarades à la même école. L'école était un lieu de vie intense et d'activité constante, avec une compétition ardente entre les élèves pour obtenir les meilleures notes et les meilleures appréciations des enseignants.
Littérature et poésie
Le roi Hassan II invitait, à de nombreuses occasions, les enseignants pour discuter avec eux et les interroger afin d'améliorer le niveau de l'enseignement et des études. Il les encourageait également, lors de ces rencontres, à revoir et à modifier les références et les programmes d'enseignement. Ainsi, lorsqu'il nomma l'un des enseignants de l'institut, le ministre chargé des affaires culturelles, Al-Haj Mhammed Bahnini, en janvier 1980, comme précepteur de l'éducation des princes et princesses royaux, il lui déclara : « Nous avons décidé d'adopter une méthode d'enseignement et de transmission des connaissances qui peut sembler étrange, notamment dans les matières arabes traditionnelles que nous considérons comme les piliers de toute éducation et formation, telles que la littérature, la langue, la poésie, la théologie, la jurisprudence, la grammaire, la rhétorique et la connaissance des idées islamiques et de leurs courants. C'est pourquoi nous avons décidé d'enseigner ces matières selon la méthode traditionnelle avec des savants spécialisés. »
Il ne fait aucun doute que cette orientation vers l'importance de la langue arabe et des études islamiques est née du contexte de débats et des discussions qui traversaient la société marocaine. Le roi souhaitait ainsi que l'école ne soit pas déconnectée de son environnement. Il voulait que le prince héritier soit armé et capable de suivre toutes les évolutions intellectuelles et idéologiques. Les efforts de Hassan II visaient à préparer un « roi de l'avenir », armé pour affronter son époque et les changements, conflits et bouleversements qu'elle pourrait connaître, nécessitant une compréhension des fondements et des raisons de leur émergence. Il devait également étudier la philosophie, l'histoire, la géographie et les sciences humaines comme outils indispensables à l’ouverture au monde pour en comprendre les mécanismes et les évolutions.
À l'école, des amitiés se sont formées entre les élèves, vivant ensemble dans les salles de classe, les dortoirs, les terrains de jeu et la salle d'étude. Le prince héritier vivait ainsi au milieu de ses camarades.
Dans le réfectoire, le Prince héritier s'asseyait autour de la table, entouré de certains élèves. Il travaillait sans relâche dans la salle d'étude pour préparer ses devoirs, conscient que son père n'acceptait pas les résultats moyens. Comme il l'a dit une fois au magazine « Paris Match » en novembre 1976 : « Mon père m'a appris qu'il vaut mieux pour le prince héritier d'obtenir un zéro plutôt que d'être moyennement intelligent. » Pour atteindre ce niveau d'excellence, le prince devait travailler davantage, faire plus d'efforts et rivaliser avec ses amis.
Saut d'obstacles
Durant ses études secondaires, le prince a révélé un talent pour la peinture. Pendant ses rares moments de repos, il peignait des tableaux à l'huile, reflétant une orientation artistique et créative alliant puissance de l'observation, souplesse du pinceau et beauté des couleurs. De plus, il était et est toujours passionné par les chevaux. Comme l'équitation n'était pas une activité scolaire, il utilisait une partie de son temps de sommeil, se levant tôt pour se rendre à l’hippodrome voisin pour pratiquer la course et le saut d'obstacles. Il savait que le cheval, dans l'histoire des sultans marocains, était une source de fierté et un moyen d’exaltation. L'histoire le montre, les sultans alaouites étaient habiles à monter à cheval pour le prestige et la conduite des armées.
Le Prince héritier a terminé ses études secondaires et a passé avec succès l'examen du baccalauréat en juin 1981, ce qui a poussé son père à déclarer à Radio France Internationale : « Je suis satisfait du niveau scolaire de mes enfants et leur éducation ne me pose aucun problème. »
Après le baccalauréat, le Prince héritier a rejoint l'Université Mohammed V, à la faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Rabat. Au milieu des amphithéâtres et parmi des centaines d'étudiants, il a étudié pendant quatre ans, couronnés par une licence. Son mémoire universitaire portait sur les relations internationales du Maroc dans le cadre d'une expérience unique entre le Maroc et la Libye. Le sujet était : « L'union arabo-africaine et la stratégie du royaume dans le domaine des relations internationales ». Par la suite, il a poursuivi ses études pendant deux ans débouchant sur un master.
Résolu à former un héritier compétent et expérimenté, le roi Hassan II envoya le prince héritier pour un stage d'une année à Bruxelles, la capitale européenne, sous la supervision de l'un des principaux dirigeants de la Communauté économique européenne à l’époque, Jacques Delors. Le prince héritier travailla dans un bureau au sein du vaste bâtiment de la Communauté européenne. Ce fut une période enrichissante durant laquelle il côtoya les principales personnalités européennes et comprit de près les dynamiques politiques au sein des différents groupes parlementaires européens. Cette période fertile lui inspira le sujet de sa thèse de doctorat, qu'il présenta à l'Université de Nice Sophia Antipolis en 1993, intitulée « La coopération entre la Communauté économique européenne et l'Union du Maghreb arabe ».
Devant des dizaines de professeurs d'université, de personnalités scientifiques, diplomatiques et politiques, le prince héritier défendit sa thèse devant ses mentors, qui lui attribuèrent les plus hautes distinctions académiques, avec une excellente note, des éloges particuliers et une recommandation pour la publication et la diffusion de sa thèse. Les interventions des professeurs soulignèrent également la pertinence de l'idée, la manière dont elle avait été traitée, ainsi que ses dimensions humaines, économiques et politiques dans les relations entre les deux rives situées du sud et du nord de la Méditerranée.
Au cours de ce parcours qui dura près de trois décennies, depuis l'école coranique jusqu'au doctorat, le Prince héritier vécut son enfance et sa jeunesse en suivant les événements, en observant les évolutions, en lisant les journaux et les magazines. Grand lecteur, il est doué d’une grande mémoire.
Allée de la Bienfaisance
Dans la Résidence où il habite près de l'aéroport de Salé, appelée Les Sablons, dans laquelle il est resté même après s'être installé comme Roi dans la capitale, il recevaient tous ceux qui étaient en difficulté, en particulier les démunis et les personnes dans le besoin. Ils se tenaient en rang devant sa résidence, et il allait à leur rencontre, les embrassant et écoutant leurs doléances, s'empressant de les aider et d'alléger leurs souffrances. Il intervenait pour l’amélioration de leurs conditions de vie. En raison du grand nombre de visiteurs de cette catégorie sociale démunie et de l'attention et de la bienveillance qu'ils recevaient, les habitants de Salé ont appelé la rue où se trouve la propriété ‘’Chari’e al-ihsane’’ (Allée de la Bienfaisance).