Mexique: Assabil, l'auberge des migrants musulmans à la porte des États-Unis

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Des hommes parcourent le hall du deuxième étage du centre d'accueil pour migrants musulmans Assabil à Tijuana, dans l'État de Basse-Californie, au Mexique, le 17 mai 2024. En provenance d'Algérie, de Syrie, du Yémen et d'Afghanistan, des citoyens de pays musulmans lointains attendent l'asile américain dans un centre d'accueil de la ville frontalière mexicaine de Tijuana, plus habituée à voir des migrants d'Amérique latine que du Moyen-Orient. (Photo par Guillermo Arias / AFP)

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Algérie, Syrie, Yémen, Afghanistan : en marge des habituels ressortissants de pays d'Amérique latine, des citoyens de pays musulmans encore plus lointains attendent un hypothétique statut de réfugiés aux Etats Unis dans une auberge à Tijuana, dans le nord-ouest du Mexique, véritable frontière du sud global.

La diversité se lit dans les chiffres: des représentants de 177 nationalités figurent parmi les 1,39 million de personnes qui ont traversé le Mexique entre janvier et mai, d'après les chiffres officiels.

Les hôtes de l'auberge Assabil, porteurs d'histoires aussi variées que les langues qu'ils parlent, ont en commun la pratique de l'islam.

De fait, Assabil, l'un des nombreux refuges qui existent à Tijuana, est le seul qui dispose d'une mosquée dans ses installations.

"Les gens sont assez chaleureux. Ils ont tous la même religion. Tu as l'impression d'être entre frères et sœurs", affirme Maitham Alojaili, un Syrien de 26 ans qui a fui "l'instabilité" de son pays en guerre civile depuis 2011.

"Parfois, quand tu sors de chez toi, il y a une très forte probabilité que tu ne reviennes pas", raconte-t-il au sujet de la vie en Syrie, quelques minutes avant de rejoindre la grande prière du vendredi.

"Maison à Tijuana" 

Beaucoup de migrants musulmans du Proche-Orient ont remonté des routes périlleuses qui les ont conduits en Amérique du Sud et en Amérique centrale. D'autres, mieux lotis, ont pris un vol direct pour le Mexique.

"Pour moi c'est difficile d'aller en Europe parce qu'il faut un visa", raconte Yusseph Rahnali, un Algérien de 31 ans, qui est passé par l’Équateur, avant de traverser sept pays pour arriver au Mexique. Il dit avoir choisi les États-Unis "parce qu'ils acceptent tout le monde", croit-il savoir.

La migration est au cœur de la campagne pour l'élection présidentielle du 5 novembre aux États-Unis.

Candidat à sa réélection, le président américain Joe Biden a signé début juin un décret qui empêche les migrants entrés illégalement sur le territoire américain de bénéficier du droit d'asile lorsque leur nombre dépasse les 2.500 par jour sur une période de sept jours consécutifs.

Le démocrate a aussi annoncé mardi des mesures de régularisation qui pourraient bénéficier à des centaines de milliers de personnes vivant déjà aux États-Unis, des annonces aussitôt condamnées par son rival républicain Donald Trump.

"Nous pouvons à la fois sécuriser la frontière (avec le Mexique) et fournir des voies légales d'immigration", a affirmé le président américain.

Fanah Ahmadi, un journaliste afghan de 29 ans, a d'abord voyagé en Iran, où il a obtenu un visa humanitaire pour le Brésil après avoir attendu "un bon bout de temps".

"Après, j'ai voyagé à travers neuf à dix pays supplémentaires pour arriver ici, au Mexique. Il y a beaucoup d'obstacles en chemin, mais tous ces problèmes sont derrière moi, et aujourd'hui je suis ici", dit-il.

En plus d'offrir une communauté de foi et de culture, l'auberge prend en charge des détails pratiques comme le logement et la nourriture, que beaucoup de migrants ne peuvent pas payer.

"Les musulmans ont leur maison ici à Tijuana", explique la fondatrice en 2022 de cette auberge, Sonia Garcia, une Mexicaine convertie à l'islam pour son mariage.

L'auberge peut héberger jusqu'à 200 personnes, qui peuvent prier et manger halal, explique-t-elle, surprise de recevoir des migrants originaires de pays dont elle n'avait jamais entendu parler comme l'Ouzbékistan.

Les "autres" 

En 2023, les États-Unis ont arrêté un record de 2,4 millions de personnes entrées illégalement sur leur territoire.

Dans les statistiques américaines, les migrants musulmans sont regroupés dans la catégorie "autres" en raison de leur nombre réduit en comparaison avec les ressortissants des pays d'Amérique latine, d'Inde et de Russie.

Réfugiés politiques, déplacés en raison de conflits, les profils sont multiples dans l'auberge, où la durée du séjour peut varier d'une semaine à sept mois. (AFP)

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