Mémoire de Salé et histoire récente - Par Samir Belahsen

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Dans cet ouvrage on n’est ni dans l’analyse historique ni dans le jugement politique, il s’agit juste de préservation de la mémoire et c’est déjà beaucoup.

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“ La mémoire, ce passé au présent.”

François Chalais

« L'homme de l'avenir est celui qui aura la mémoire la plus longue. »

 Friedrich Nietzsche

Célébrant la publication des recommandations de l’Instance Justice et réconciliation, l’association Sala Al Moustakbal vient de publier « La mémoire de Salé et Histoire récente ». Réalisé avec l’appui du conseil national des Droits de l’Homme, et pour cheville ouvrière Habib Benmalek, l’ouvrage en deux tomes offre une contribution à la préservation de la mémoire.

Parcours politiques

Le premier tome est consacré à des parcours politiques à travers des regards croisés et surtout divers et variés. Une compilation de témoignages de camarades, de frères, de cousins et des membres des familles, un recueil qui révèle une partie de l’histoire politique de Salé.

On n’est ni dans l’analyse historique ni dans le jugement politique, il s’agit juste de préservation de la mémoire et c’est déjà beaucoup. 

« Nous affirmons ainsi l’engagement vis-à-vis de la ville, de la nation et de l’histoire d’assumer collectivement la responsabilité de l’entretien des empreintes, de l’héritage, des innovations et des actions mémorables des personnalités, des élites et des leaders de Salé, femmes et hommes, sans lesquels nous ne serions pas ce que nous sommes aujourd’hui et Salé n’aurait pas été l’un des principaux acteurs de notre histoire récente et de notre présent. », nous expliquent les auteurs.

Ces témoignages, portraits et autoportraits croisés ne devraient être lus que dans cette optique. Ils restent subjectifs et partiels, une subjectivité et une partialté revendiquées.

(Ma lecture de l’ouvrage est elle-même chargée de subjectivités, une bonne partie des personnages cités et des auteurs ont fait ou font encore mon monde.)

Une ville militante et contestataire 

La majorité des personnages, objet des différents articles, ont connu des parcours politiques ancrés dans les partis issus du mouvement national et dans les mouvements de gauche durant la deuxième moitié du XXème siècle.

On y trouve PI, PDI, UNFP, USFP, PCM(PPS), OADP, PSU,3 mars 1973, 23 Mars, Ila al Amam, Linakhdoum Achaab …

Les figures des mouvements Islamistes comme ceux de la Chabiba Islamia, El Adl et le Pjd n’y sont pas.

Parcours culturels :

Le tome 2 est intitulé « Parcours culturels », il aborde plusieurs facettes de la vie culturelle de la ville et met en valeur certains de ses acteurs.

Il nous offre d’abord un regard sur l’histoire spirituelle de la ville, ses mosquées, ses 57 oualis et ses 13 oualias et ses 21 Zaouias et son Moussem des cires (la procession des cierges) organisé chaque année au moment du Mawlid (nativité du prophète).

Une belle partie de l’ouvrage est consacrée aux écoles qui ont marqué l’histoire culturelle et même politique de Salé. Il s’agit de l’école de la muraille (Assour) appelée sous le protectorat Ecole islamique des fils des notables, de l’école Mohammedia, de l’école Annahda (Renaissance), de l’école islamique pour l’enseignement primaire pour les garçons et de l’école Lalla Aicha pour les filles. (La princesse l’avait inaugurée).

L’ouverture des « écoles nationales » était bien entendu pour les nationalistes un véritable défi politique mais c’était aussi un défi pédagogique.

Quelques articles sont consacrés à la mémoire des lieux, on y retrouve certains quartiers emblématiques de la ville : Assouk el Kebir, ses commerces, ses hommes et leurs interactions ; le quartier Rmal (les sables) qui avait été le quartier européen de la ville avec église et école ; Bab Sebta qui donnait sur les saniats du nord de la ville ; le quartier d’Essaf avec ses zaouias Soufis…

Plusieurs articles sont consacrés aux figures ayant marqué l’histoire culturelle de la ville, son tissu associatif dynamique, le cinéma, le théâtre, la Halqa, la musique, la radio, la télévision et le sport.

L’ouvrage réserve aussi quelques articles aux contributions très variées des femmes de Salé. Elles ont largement contribué à la vie spirituelle, au mouvement national, aux arts, à la vie académique et à la lutte pour la justice et la démocratie. 

Décidément cette ville mystique aura toujours des secrets à révéler. Sa mémoire mérite bien l’effort entrepris par l’association « Salé l’avenir » ; Pierre Perret disait :  “Quand on passe l'éponge, on n'éponge pas la mémoire.” 

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