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Militaires nigériens et Cédeao soufflent le chaud et le froid
Un partisan du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) du Niger tient un drapeau nigérien lors d'une manifestation à Niamey, le 11 août 2023, près d'une base aérienne française au Niger. Des milliers de partisans des putschistes nigériens se sont rassemblés le 11 août 2023 près d'une base militaire française à la périphérie de la capitale Niamey. Les manifestants ont crié "à bas la France, à bas la CEDEAO". (Photo AFP)
Le nouveau pouvoir au Niger souffle le chaud et le froid, en annonçant ce week-end d'abord être ouvert à la négociation, puis ensuite vouloir poursuivre pour "haute trahison" le président renversé Mohamed Bazoum. Il veut ainsi démontrer que s’il reste ouvert à la voie diplomatique, il n’en est pas moins résolu à poursuivre son action et à ne pas se laisser intimider par les mises en demeure de ses pairs de la CEDEAO ou de Paris.
Dimanche soir, le régime militaire a affirmé avoir réuni les "preuves pour poursuivre devant les instances nationales et internationales compétentes le président déchu et ses complices locaux et étrangers, pour haute trahison et atteinte à la sûreté intérieure et extérieure du Niger".
Il appuie ses accusations sur des "échanges" de M. Bazoum avec des "nationaux", des "chefs d'Etat étrangers", et des "responsables d'organisations internationales".
M. Bazoum s'est entretenu plusieurs fois avec des représentants de pays alliés au Niger avant le coup d'Etat, comme les Etats-Unis, et des membres de son entourage politique.
Les militaires assurent également que M. Bazoum "reçoit régulièrement la visite de son médecin".
Selon un conseiller du président renversé, son médecin a pu le voir samedi.
"Après cette visite, le médecin n'a soulevé aucun problème quant à l'état de santé du président déchu et des membres de sa famille", ont ajouté les militaires.
M. Bazoum, retenu dans sa résidence présidentielle depuis le 26 juillet - jour du coup d'Etat - avec son fils et sa femme, avait déclaré dans plusieurs médias être un "otage", privé d'électricité et contraint de ne manger que du riz et des pâtes.
Sanctions "humiliantes"
En outre, le régime militaire a dénoncé "les sanctions illégales, inhumaines et humiliantes de la Cedeao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest)", prises lors d'un sommet de l'organisation le 30 juillet, au cours duquel avait aussi été fixé un ultimatum de 7 jours pour rétablir l'ordre constitutionnel, sous peine d'un recours à la force, qui n'a pas appliqué.
Pendant ce sommet, les Etats ouest-africains ont annoncé entre autres la suspension des transactions financières et commerciales avec le Niger, dépendant économiquement et énergétiquement de pays étrangers.
Ces sanctions "vont jusqu'à priver le pays de produits pharmaceutiques, de denrées alimentaires" et de "fourniture en courant électrique", ont déploré les militaires dans leur communiqué.
Ces déclarations surviennent après l'accueil par le régime militaire d'une délégation de chefs religieux nigérians musulmans samedi, menée avec l'accord du président nigérian Bola Tinubu, également à la tête de la Cedeao, pour "apaiser les tensions créées par la perspective d'une intervention militaire" de l'organisation.
Selon un communiqué de la médiation religieuse nigériane, le chef du régime militaire, le général Abdourahamane Tiani, avait "déclaré que sa porte était ouverte pour explorer la voie de la diplomatie et de la paix afin de résoudre" la crise.
"Force en attente"
Jeudi dernier, lors d'un nouveau sommet, les dirigeants de la Cedeao pnt également soufflé le chaud et le froid : réaffirmant privilégier la voie diplomatique pour rétablir le président Bazoum dans ses fonctions, ils n’en ont pas moins ordonné une mobilisation et un déploiement de la "force en attente" de la Cedeao.
Le calendrier et les modalités d'une éventuelle intervention militaire ouest-africaine n'ont pas été dévoilés. Mais le président ivoirien Alassane Ouattara, qui se manifeste à la tête de la ligne de l’action militaire, a estimé qu'elle devrait pouvoir intervenir "dans les plus brefs délais".
Mais de nombreux experts s’accordent sur la difficulté de mener une telle opération militaire au Niger ou dans sa capitale.
Une offensive par la voie terrestre obligerait les forces ouest-africaines à parcourir plusieurs centaines de kilomètres sur un territoire hostile, et une opération aérienne sur le palais présidentiel où est retenu le président renversé, suscite tout autant de doutes.
Une opération qui pourrait s’avérer inutile et risquée pour le président déchu. Un des proches de M. Bazoum avait assuré que le régime militaire avait brandi "la menace" de s'en prendre à lui si une intervention armée avait lieu.
Dans tous les cas de figures, Nul ne peut prédire les conséquences d’une intervention dans Niamey, non seulement pourrait causer des victimes civiles, mais également plonger l’ensemble d’une sous-région sous tension constante dans le plus total des désordres susceptible de ‘étendre à toute la région et au-delà.
Selon le général Tiani, cité dans le communiqué de la médiation nigériane, les militaires ont renversé le président Bazoum "en raison d'une menace imminente qui aurait affecté non seulement la République du Niger, mais aussi le Nigeria".
Abdourahamane Tiani avait justifié le coup d'Etat par "la dégradation sécuritaire" dans le pays, miné par la violence de groupes jihadistes comme le Mali et le Burkina voisins, également dirigés par des militaires et qui ont affiché leur solidarité avec Niamey.
Concernant les personnes proches du régime déchu arrêtées depuis le coup d'Etat, les militaires au pouvoir ont ajouté qu'ils "réaffirment leur ferme volonté de respecter (...) les engagements du Niger en matière de droits de l'homme". (Quid avec AFP)