Pedro Sanchez à Rabat : La convergence enfin de deux audaces ? Par Naïm Kamal

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Arrivée du président du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, au Maroc accueilli à sa descente d’avion par le chef du gouvernement marocain Aziz Akhannouch

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La visite de deux jours au Maroc qu’a entamée ce jeudi 7 avril 2022, le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, de par son contexte, sa portée stratégique et les perspectives qu’elle ouvre, appartient à cette catégorie de faits qui resteront, quelle qu’en soit la suite, dans les annales comme le tournant qui a tout changé ou l’occasion de plus ratée.

Le déroulé protocolaire et pratique de cette visite qui a commencé par des entretiens avec le Roi Mohammed VI, est connu. Elle devrait parapher les débuts concrets de quelque chose de nouveau entre les deux pays voisins du détroit de Gibraltar, et le chef de la diplomatie espagnole, José Manuel Albares, plus subtil que sa prédécesseure, ne s’y est pas trompé lorsqu’il a tenu dans une déclaration à indiquer que son Premier ministre participera ensuite au côté du Roi du Maroc "à la rupture du jeûne" en ce mois de Ramadan, ce qui "est un signe d'amitié très fort" de la part du Souverain. 

Des entretiens sans tabous

Au niveau le plus élevé donc, les entretiens maroco-espagnols devraient ouvrir une nouvelle étape en mettant en œuvre une feuille de route au moins à la hauteur des intentions déclarées ces derniers jours. Dans la lettre et dans l’esprit des contacts publics qui ont précédé la visite aucun sujet ne sera laissé de coté :

Echanges commerciaux, investissements, délimitation des eaux territoriales, coopération énergétique, migration, et, normalement, Sebta et Mellilia, qui constituent une source d’hémorragie des investissements au Royaume du Maroc, même s’il n’est pas improbable que ce point restera pour l’instant dans « l’antichambre » de l’histoire le temps que murissent des deux cotés du détroit les conditions d’une solution qui, selon la bonne formule de Feu Hassan II, préserve les « droits inaliénables » du Maroc et les « intérêts vitaux » de l’Espagne.

Sans doute aucun, en actant la centralité incontournable de l’initiative d’autonomie marocaine comme solution à ce qui est bien plus qu’un différent du Sahara, Pedro Sanchez a eu, pour reprendre l’expression de Khalil Hachimi Idrissi, Directeur général de l’agence MAP, ‘’l’audace des hommes d’Etat ». 

Mais c’est une audace, qui répond à une autre audace, qui lui est antérieure de quinze ans, celle du Roi Mohammed VI qui a pris sur lui en 2007 de faire le premier pas vers une solution de compromis, pragmatique, réaliste et sérieuse.

Une patience à toute épreuve 

Nul ne peut donc prétendre que le Maroc a manqué de patience en dépit des provocations algériennes et des atermoiements espagnols, souvent blessants lorsque, par exemple, ils prétendaient avoir plus de responsabilité historique à l’égard de la horde du Polisario qu’à l’endroit du Maroc et de ses populations de Tanger à Lagouira dont ils ont occupé, et parfois gazé, les territoires.

Il ne s’agit pas de minorer et moins encore de sous-estimer la nouvelle attitude de Madrid. On en mesure à sa juste valeur la portée pour une frange importante de l’Espagne encore travaillée par ses atavismes et ses tropismes.   

Mais de pas oublier que pour Rabat, la récupération du Sahara ex-colonie espagnole en 1976 est une réintégration d’une région au même titre que les autres régions indépendantes depuis 1956 (1958 pour Tarfya et 1969 pour Ifni). 

Il s’agit aussi de rappeler aux voix qui persistent en Espagne à estimer que leur Premier ministre est en train de ‘’brader’’ on ne sait quoi, que c’est l’intelligence des situations du Roi Mohammed VI et sa perception raisonnée de l’avenir commun auquel la géographie condamne les deux royaumes, qui l’ont amené à assouplir au bénéfice de l’entente et de la coopération, une position irréfragable pour les Marocains. C’est un plafond et non un plancher pour citer en substance le Souverain.  

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